Le Congrès des députés brésilien, où sera examinée la procédure de destitution de Dilma Rousseff lors d'un vote solennel le 17 avril. | EVARISTO SA / AFP

La présidente brésilienne, Dilma Rousseff, joue dimanche 17 avril son mandat à quitte ou double au Parlement de Brasilia, où les députés doivent se prononcer à partir de 14 heures (19 heures à Paris) sur sa destitution, lors d’un vote sous tension, et sous l’œil crispé de plus de deux cents millions de Brésiliens.

  • Quel est l’objet du vote de dimanche ?

La présidente en exercice est visée depuis le 2 décembre 2015 par une procédure de destitution (« impeachement »), visant à la contraindre de quitter le pouvoir avant le terme de son second mandat.

La procédure a été lancée formellement par deux juristes : Miguel Reale et Helio Bicudo, ce dernier étant l’un des fondateurs du Parti des travailleurs, le parti de gauche auquel appartient Dilma Rousseff. Mais elle a surtout bénéficié de l’appui politique (indispensable) d’Eduardo Cunha, président de la Chambre des députés, ancien allié et aujourd’hui ennemi juré de Dilma Rousseff.

La procédure arrive dimanche 17 avril à sa phase cruciale, avec le vote solennel des députés. En cas de majorité des deux tiers en faveur de la destitution, la décision finale sera entre les mains du Sénat.

Lire le recueil de tribunes : Faut-il destituer Dilma Rousseff ?
  • Que reproche-t-on à Dilma Rousseff ?

D’avoir maquillé les comptes publics en 2013, un an avant sa réélection, en ayant recours à une mécanique dite de « dribble fiscal » : faire financer des dépenses budgétaires par des emprunts auprès d’établissements bancaires publics permettant d’en retarder le débit.

Outre cette affaire, Mme Rousseff pâtit depuis longtemps d’une impopularité historique pour un chef de l’Etat depuis le retour de la démocratie au Brésil, en 1985. En creux, c’est aussi la sclérose du Parti des travailleurs, au pouvoir depuis quatorze ans, qui est dénoncée par une bonne partie des Brésiliens.

  • L’issue du vote est-elle prévisible ?

Le scrutin devrait être très serré. Encore confiante il y a quelques semaines, Dilma Rousseff a vu passer dans l’opposition ses deux alliés gouvernementaux : le Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB, centre) à la fin de mars et le Parti progressiste à la mi-avril. Autant de voix qui pourraient faire basculer le vote en faveur de la destitution.

Un décompte réalisé en début de semaine par le quotidien Estado de Sao Paulo dénombrait 298 députés qui seraient en faveur du départ de la présidente et 119 pour son maintien. Tout dépendra donc du choix de la petite centaine de députés encore indécis.

  • Qu’adviendrait-il en cas de destitution ?

Si Dilma Rousseff était destituée, la présidence reviendrait à l’actuel vice-président, Michel Temer. Agé de 75 ans, il est le président du PMDB.

Peu populaire, M. Temer est suspecté d’avoir bénéficié de financements illégaux lors de la campagne menée avec Mme Rousseff et a été cité par des inculpés du dossier Petrobras dans de sombres histoires de ventes illégales d’éthanol. La présidente l’accuse aujourd’hui d’être à la tête d’une tentative de « putsch » visant à conquérir le pouvoir pour éloigner les menaces de poursuites judiciaires, un « coup d’Etat » institutionnel visant à s’emparer du pouvoir qu’ils n’ont pu conquérir dans les urnes en 2014.

Le Parti des travailleurs fait également planer la menace d’une remise en cause des acquis sociaux et démocratiques en cas d’arrivée de la droite au pouvoir.

Entre le maintien de la gauche et le retour de la droite, l’écologiste Marina Silva, en tête des sondages, promeut une « troisième voie », en appelant à la convocation de nouvelles élections.