Des partisans de Podemos en décembre 2015, pendant les élections, à Madrid. | PEDRO ARMESTRE / AFP

Le parti de gauche radicale Podemos a limogé son numéro trois, mercredi 16 mars, sur fond de tensions internes. Pablo Iglesias, le secrétaire général de la formation qui, en moins de deux ans, a bouleversé l’échiquier politique espagnol, a révoqué dans la nuit Sergio Pascual, responsable de l’organisation du parti. Il lui reproche « une gestion déficiente qui a gravement nui à Podemos, dans une délicate période de négociations pour former un gouvernement du changement ».

La révocation de M. Pascual – qui reste député – a lieu après une série de démissions au sein de la section madrilène du parti, qui connaît également des tensions en Catalogne, en Galice et au Pays basque.

L’investiture du socialiste Sanchez en question

La presse espagnole rapporte depuis plusieurs semaines des divisions internes au sujet de la stratégie à suivre après les élections législatives du 20 décembre. Les uns souhaiteraient que leurs députés s’abstiennent lors d’un vote d’investiture du socialiste Pedro Sanchez pour le laisser former un gouvernement avec les centristes de Ciudadanos ; les autres, que Podemos maintienne une ligne radicale et prenne le risque de nouvelles élections. Ces divergences opposeraient le numéro un Pablo Iglesias et le numéro deux Iñigo Errejon, chercheur en sciences politiques.

Dans une lettre ouverte adressée mardi aux militants, M. Iglesias avait défendu le « non » à l’investiture de M. Sanchez allié aux centristes, et mettait en garde contre les efforts des adversaires de Podemos pour mettre en avant une « division interne » :

« Ils essaient de diffuser un nouveau récit pour nous affaiblir, selon lequel il existerait un Podemos docile prêt à se rendre et à faciliter l’investiture d’un gouvernement PSOE-Ciudadanos face à un Podemos radical”. (…) Au sein de Podemos, il n’y a pas et il ne devra pas avoir de courants ni de factions qui rivalisent pour le contrôle des appareils et des moyens. »

Un parti hétéroclite mais puissant

A l’issue des législatives du 20 décembre, Podemos est devenu la troisième force politique du pays en rassemblant avec ses alliés 20,66 % des voix. Il compte 65 députés sur 350, assez pour marchander son soutien à un éventuel gouvernement dirigé par les socialistes, arrivés deuxièmes, avec 90 sièges.

Un soutien qu’il lui a pour l’instant refusé : le parti a voté deux fois contre l’investiture du socialiste Pedro Sanchez. Sans les votes de Podemos, le Parti socialiste n’a pas obtenu la confiance du Parlement et faute d’accord d’ici au 2 mai, le pays sera condamné à retourner aux urnes pour surmonter la paralysie politique.

Des analystes et des membres du parti voient dans ces tensions une crise de croissance qui pourrait nuire à Podemos si elle se prolongeait. Ce parti rassemble autant des membres du mouvement des « indignés » par l’austérité né à Madrid en 2011, des militants d’un parti altermondialiste Izquierda Anticapitalista (Gauche anticapitaliste) et d’anciens du parti écolo-communiste Izquierda Unida (Gauche unie), dont Pablo Iglesias lui-même, accusé de vouloir exercer un strict contrôle de ses troupes.