L’heure tourne pour les professeurs des écoles : à un an de la fin du quinquennat de François Hollande, qui avait fait de l’école sa priorité, les instituteurs guettent chaque prise de parole, chaque déplacement de « leur » ministre. Il faut dire que ces dernières semaines, Najat Vallaud-Belkacem n’a pas manqué une occasion de faire miroiter cette fameuse « revalorisation » des salaires.

Mardi 12 avril, sur RMC, la ministre de l’éducation a affirmé qu’elle la jugeait « juste et légitime ». A la mi-janvier, sur France Inter, elle reconnaissait la « faible rémunération » des professeurs, ajoutant que, dans le cadre des négociations sur les carrières des fonctionnaires, elle espérait « aboutir rapidement ». Entre les deux, le 30 mars, lors de la publication des résultats des lycées — sujet pour le moins éloigné des arbitrages sur les salaires —, Najat Vallaud-Belkacem insistait, dans un entretien au Monde.fr, sur le « devoir de les revaloriser ». Et ajoutait : « Rien ne justifie que les enseignants français soient en moyenne moins bien rémunérés que leurs homologues européens. »

Cette inégalité au sein de l’OCDE, qui place la France parmi les « mauvais payeurs », se double d’une autre, à l’échelle franco-française, traçant une ligne de fracture parmi les 840 000 professeurs : le salaire moyen d’un instituteur avoisine les 2 210 euros net, de source ministérielle, quand celui d’un professeur du secondaire atteint pratiquement 2 640 euros.

« Que va-t-il nous rester, à nous ? »

Dans cette même interview, Mme Vallaud-Belkacem précisait « s’être fixé comme horizon début mai ». Une annonce attendue, donc, lors des journées d’études des 2 et 3 mai consacrées au bilan de la « refondation » engagée par la gauche en 2012. « Elle garde cette sucrerie pour ce moment très symbolique, ce joli décor », témoigne sous couvert de l’anonymat un observateur haut placé.

Reste qu’à l’approche de l’échéance, et en pleine fronde contre le projet de loi travail, des inquiétudes se font entendre dans le petit monde du syndicalisme enseignant sur l’issue des discussions d’ores et déjà engagées. « Le gouvernement vient de lâcher 500 millions d’euros en direction de la jeunesse. C’est une juste cause, il ne s’agit pas de jouer les professeurs contre les élèves — lycéens et étudiants. Mais que va-t-il nous rester, à nous ? » interroge un syndicaliste.

Une première étape avait été franchie du temps de Vincent Peillon. Peu avant l’été 2013, au plus fort de la contestation des nouveaux rythmes scolaires, le « ministre prof » avait mis sur la table une enveloppe pour les professeurs du primaire. Son nom : indemnité de suivi et d’accompagnement des élèves (ISAE). Son montant : 400 euros. Depuis, Snuipp-FSU et SE-UNSA, deux des organisations représentatives dans le premier degré, n’ont cessé de réclamer l’« alignement » de l’ISAE sur l’indemnité de suivi et d’orientation des élèves (ISOE) — perçue, elle, par les professeurs du second degré et dont le montant atteint… 1 200 euros. Pétitions et courriers s’entassent, dit-on au ministère de l’éducation comme à l’Elysée, pour réclamer cet « égal traitement » de tous les professeurs quel que soit leur lieu d’enseignement. Les instituteurs ont d’ailleurs manifesté sur ce seul mot d’ordre le 26 janvier.

La « parité le plus vite possible »

« On guette la fumée blanche, témoigne le secrétaire général du Snuipp-FSU, Sébastien Sihr. Deux scénarios se dessinent : soit l’augmentation d’un coup — mais j’avoue que je n’y crois pas trop —, soit une montée en puissance accompagnée d’un calendrier permettant d’atteindre, à la rentrée prochaine, l’égalité des indemnités. Pour nous, l’annonce qui vient doit, a minima, porter sur 400 euros supplémentaires. »

Le SGEN-CFDT réclame, lui aussi, la « parité le plus vite possible », et estime plausible « une revalorisation de 400 euros de suite, et encore 400 à la veille de la présidentielle », précise son porte-parole, Frédéric Sève.

La gauche ne peut pas laisser ce sujet à la droite, font valoir les syndicats. D’autant que Nicolas Sarkozy et le parti Les Républicains ont, au début d’avril, avancé leurs pistes pour l’école. Parmi elles, l’antienne « travailler plus pour gagner plus ». « Le temps de présence des enseignants sera augmenté de 25 % en contrepartie d’une rémunération accrue », proposent Les Républicains. Alain Juppé, qui s’était emparé du sujet à la rentrée 2015 avec son livre Mes chemins pour l’école (Lattès), propose, lui, une augmentation de 10 % des instituteurs.