C’est la triste histoire d’un espoir de médaille olympique évanoui dans l’ivresse du jeu. Le petit monde du badminton japonais n’en revient toujours pas. Son joueur vedette,, 21 ans, premier Nippon à avoir décroché une médaille – de bronze à Djakarta en août 2015 – lors d’un championnat du monde et à avoir remporté le BWF Super Series Masters – à Dubaï en décembre 2015 –, a fréquenté les tripots clandestins en marge de ses entraînements et compétitions.

M. Momota, numéro deux mondial et sur lequel comptait le Japon pour ramener une médaille des Jeux olympiques de Rio, a été exclu le 10 avril de l’équipe nationale et interdit de compétition jusqu’à nouvel ordre par sa fédération de badminton.

Le joueur est puni car il aurait effectué six visites, entre octobre 2014 et janvier 2015, dans des casinos illégaux tenus par des yakuzas liés à la puissante organisation Sumiyoshi-kai, dans le quartier de Kinshicho, à Tokyo. Au fil de parties de baccara, il aurait perdu 500 000 yens (4 000 euros). En conférence de presse, il a présenté ses excuses. « Je savais que c’était interdit, a-t-il déclaré. Mais je n’ai pas pu arrêter. »

Bars à hôtesses

La version officielle est quelque peu démentie par la presse populaire, aussi bien informée mais moins pudique. En réalité, il aurait été bien plus assidu, aurait fréquenté les bars à hôtesses et était connu pour son goût du bling-bling. NTT East, qui emploie M. Momota, a annoncé qu’il ferait l’objet de trente jours d’interruption d’activité. L’équipe masculine de l’entreprise ne participera à aucune compétition pendant six mois.

Le choc est d’autant plus violent dans l’archipel que le joueur, natif du département de Kagawa (centre), a étudié à Tomioka, dans le département de Fukushima (nord-est). Cette ville a été totalement évacuée après la catastrophe nucléaire de mars 2011. Le joueur, qui avait alors 16 ans, était en compétition en Indonésie au moment du drame. Il a été aidé à son retour dans l’archipel par un autre joueur de badminton, Kenichi Tago, six fois champion du Japon. Ce dernier a également été reconnu coupable de paris illégaux et a été banni à vie.

Sur le plan pénal, les deux joueurs risquent jusqu’à trois ans de prison et 500 000 yens (4 000 euros) d’amende. Ayant également fait des paris illégaux, six autres joueurs de l’équipe nationale masculine de badminton ont reçu des avertissements. Les responsables de l’équipe seront sanctionnés.

« Une trahison de l’esprit olympique »

Pour le président de la fédération, Kinji Zeniya, les punitions sont lourdes car « les joueurs doivent être des modèles pour les enfants ». « C’est une trahison de l’esprit olympique », a fulminé le ministre des Jeux olympiques Toshiaki Endo, pour qui les joueurs n’ont « aucun droit de représenter le Japon ».

L’affaire embarrasse le Japon car elle suit celle des paris illégaux dans le base-ball. Plusieurs dizaines de joueurs d’équipes phares du sport le plus populaire de l’archipel, notamment des Yomiuri Giants ou des Hanshin Tigers, ont avoué avoir parié sur différentes rencontres entre novembre 2015 et mars.

Certains, comme le lanceur des Yomiuri Kojiro Takagi, ont été lourdement sanctionnés. Le scandale avait incité le porte-parole du gouvernement, Yoshihide Suga, à parler de « trahison » à l’endroit des fans. Là encore, l’affaire est mal tombée. Le Japon milite pour que le base-ball redevienne un sport olympique, si possible lors des JO de Tokyo de 2020.