Karim Benzema, le 8 octobre 2015, lors du match France-Arménie. | VALERY HACHE / AFP

Didier Deschamps, sélectionneur de l’équipe de France, et Noël Le Graët, président de la Fédération française de football (FFF), ont tranché : Karim Benzema ne disputera pas l’Euro en France, du 10 juin au 10 juillet. L’attaquant du Real Madrid l’a annoncé le premier, sur son compte Twitter, mercredi après-midi :

Quelques instants plus tard, la FFF publiait un communiqué pour expliquer sa décision :

« MM. Le Graët et Deschamps se sont rencontrés pour évoquer la situation de M. Benzema. Le président de la Fédération et le sélectionneur tiennent à rappeler que la performance sportive est un critère important mais pas exclusif pour décider de la sélection au sein de l’Equipe de France de football. La capacité des joueurs à œuvrer dans le sens de l’unité, au sein et autour du groupe, l’exemplarité et la préservation du groupe sont également prises en compte par l’ensemble des sélectionneurs de la Fédération. Il en résulte que Noël Le Graët et Didier Deschamps ont décidé que Karim Benzema ne pourra pas participer à l’Euro 2016. »

L’avocat de Benzema en veut à Valls

Eric Dupond-Moretti, l’avocat de Karim Benzema, a réagit au micro de RMC, disant en vouloir « au premier ministre de s’être mêlé de la sélection en équipe de France » de l’attaquant français alors que « ce n’est pas son job ». Mi-mars, Manuel Valls avait estimé que « les conditions [n’étaient] pas réunies » pour un retour de Benzema en équipe de France. « Ils ne peuvent pas se fonder sur la mise en examen pour lui interdire l’Euro. C’est ce que je suis allé leur dire. A l’évidence, ce n’est pas retenu », a ajouté Me Dupont-Moretti.

« Je n’ai pas de commentaire à faire sur les choix sportifs qui sont ceux du sélectionneur, a pour sa part déclaré le ministre des sports Patrick Kanner sur BFM TV. Ma responsabilité, c’est d’offrir des stades qui fonctionnent, une sécurité absolue en lien avec Bernard Cazeneuve, le ministre de l’intérieur, et faire que cet Euro soit une véritable fête ».

Sur le plan juridique, rien ne s’opposait à la sélection du meilleur buteur en activité de l’équipe de France (27 buts), toujours mis en examen pour complicité de tentative de chantage dans l’affaire de la sextape de Mathieu Valbuena, mais dont le contrôle judiciaire avait été levé le 11 mars. Didier Deschamps, qui dévoilera le 12 mai la liste des 23 joueurs retenus pour disputer le tournoi, a visiblement choisi de s’éviter toute polémique pendant l’Euro.

Pression politique

Le capitaine des Bleus champions du monde en 1998 et d’Europe en 2000 ne sera pas resté insensible aux sondages réprobateurs publiés ces dernières semaines. Selon une étude réalisée en décembre par l’institut Elabe pour RMC-BFMTV, 82 % des Français étaient opposés à un retour en équipe de France de l’ex-pépite de l’OL. A la fin de février, une étude établie par Odoxa pour RTL donnait un résultat quasi similaire avec 70 % de sondés hostiles.

« C’est l’un des dossiers les plus complexes que j’aie eu à gérer à la FFF, confiait de son côté au Monde, Noël Le Graët, quelques jours avant de prendre sa décision. Car il y a une contradiction entre l’opinion publique et ce que je ressens pour ce garçon-là. Je l’aime bien sans parler de l’affaire. On peut demander à Laurent Blanc ou à Didier, à tous ses entraîneurs, Gérard Houllier à Lyon, Zidane aujourd’hui, il s’est toujours bien conduit au niveau de l’entraînement, du groupe, des sponsors. Mais dans la vie de tous les jours, dans une équipe, il n’est pas rejeté par ses copains, il écope d’un carton jaune que de temps en temps. Jamais un entraîneur ne l’a foutu dehors car il est arrivé en retard ou n’a pas mouillé le maillot. »

Le patron de la FFF aura donc fini par céder à la pression politique qui s’était exprimée notamment par la voix du premier ministre.