L'Uruguayen Luis Suarez, pas en réussite face à Valence le 17 avril au Camp Nou. | JOSEP LAGO / AFP

Il y a encore quelques semaines, le FC Barcelone traversait cette saison 2015/2016 en marchant sur l’eau. La réalité est en train de rappeler les Blaugranas à leur condition d’êtres humains. Depuis leur défaite lors du Clasico, face à l’ennemi juré du Real Madrid (2-1 à domicile), les Catalans voient leur destin leur échapper.

Alors que le sort du championnat semblait scellé, la série de trois défaites consécutives du Barça a complètement rebattu les cartes. Quand les partenaires de Leo Messi s’effondrent, les deux clubs madrilènes, le Real et l’Atlético, amorcent le sprint final en trombe.

Le dimanche 17 avril, à l’issue de la 33e journée de Liga, L’Atlético a ainsi rejoint Barcelone en tête du classement avec le même nombre de points. Le Real, lui, n’est plus qu’à une unité. Les deux clubs de la capitale espagnole peuvent encore rêver d’un doublé championnat-Ligue des champions. Eliminé de la compétition européenne face à l’Atlético, le Barça, lui, peut tout perdre.

  • Barcelone : la machine enrayée

Neymar a fait preuve de beaucoup de gestes de frustration lors de la défaite face à Valence le 17 avril. | LLUIS GENE / AFP

Mené par l’irrésistible trio « MSN » (Messi-Neymar-Suarez) depuis le début de la saison, le Barça connaît depuis quelques semaines un cycle de défaites quasiment inexplicable. La défaite contre le Real Madrid à domicile, le 2 avril, n’aurait pu être qu’un épiphénomène. La prestation des Catalans face aux Merengue n’avait rien remis en question. Le jeu blaugrana, toujours aussi séduisant, ne laissait en rien présager du délitement qui allait suivre. Trois jours plus tard, le FC Barcelone allait être fidèle à l’adage selon lequel une grande équipe ne perd jamais deux fois de suite. Face à l’Atlético Madrid, en match aller de quart de finale de Ligue des Champions, Leo Messi et les siens s’imposaient 2 buts à 1, et s’entrouvraient la porte des demi-finales.

Mais le week-end suivant, la rechute. Au Pays Basque, face à la Real Sociedad, les Catalans renouaient avec la défaite, 1 but à 0. Contrairement à ce qui s’était passé une semaine plus tôt, la réaction sur la scène européenne n’allait pas avoir lieu. Face à des Colchoneros survoltés, le Barça laissait filer l’Atlético en demi-finales de Ligue des champions. Il y aura la Liga pour se consoler, pouvait-on penser.

Sauf que le 17 avril, lors de la 33e journée de championnat, le FC Barcelone a encore poursuivi sa chute, pris dans un tourbillon de défaites. Au Camp Nou, c’est cette fois le FC Valence qui est venu enfoncer un peu plus la tête des Catalans sous l’eau. En trois journées, les neuf points d’avance qu’ils avaient sur l’Atlético ont fondu comme la neige sous les premiers rayons de soleil du printemps. Le Real Madrid, à un petit point, leur souffle sur la nuque.

Le Barça est aujourd’hui à la croisée des chemins. Il peut tout perdre, mais il a encore son destin entre ses mains. « Il reste cinq matches et si nous les gagnons nous serons champions, a pragmatiquement analysé Luis Enrique, l’entraîneur du club. Nous dépendons encore de nous-mêmes, ça oui, mais notre crédit est épuisé et nous avons conscience du défi qui nous attend. Nous allons l’affronter comme doit le faire un joueur du Barça, la tête haute. » Même avec le destin contre lui, le technicien catalan reste confiant en son équipe. La récente spirale de défaites ne serait pas aussi remarquable si elle ne semblait pas anormale pour cette équipe. Avant sa défaite face au Real Madrid, Barcelone était sur une série de 39 matchs sans défaite toutes compétitions confondues.

Cependant, ces dernières semaines ont mis en lumière des fêlures dans la machine barcelonaise. Contre Valence, Neymar, inefficace depuis plusieurs matchs, a exprimé sa frustration en giflant un joueur adverse. Buteur dimanche, Messi n’avait marqué depuis 514 minutes. Luis Suarez, tueur de sang froid depuis le début de la saison, a raté contre Valence un but qui lui tendait les bras, sur la ligne de but. Autant de symboles qui montrent que quand la MSN ne fonctionne plus, le Barça non plus.

Une dépendance qui reflète également un banc insuffisamment fourni, pour palier ces états de méforme. Et qui questionne sur la gestion du groupe par Luis Enrique, critiqué par plusieurs médias qui lui reprochent notamment de trop souvent remplacer le Croate Ivan Rakitic par le Turc Arda Turan, recrue qui peine à faire ses preuves.

  • Real : en mission « remontada »

Le Real Madrid s'est largement imposé 5 buts à 1 sur la pelouse de Getafe, le 17 avril. | Francisco Seco / AP

La saison du Real Madrid commence à ressembler à un miroir inversé de celle de son rival barcelonais. En trois semaines, les Merengue se sont ouvert le champ des possibles, alors qu’ils semblaient destinés à une saison blanche. Comme pour le Barça, le point de bascule remonte au Clasico du 2 avril. Ce qui ne semblait être qu’une victoire de prestige, pour le premier Clasico de Zinédine Zidane à la tête de l’équipe, s’est révélée en réalité être un tournant sportif. Ces trois points subtilisés à leur rival pourraient être ceux qui décideront du destin des deux clubs à l’issue du championnat.

Avec un point de retard et cinq matchs à disputer, le titre est plus proche que jamais pour le Real. S’ils possèdent un handicap face à Barcelone, c’est celui du calendrier. Car le club royal peut encore rêver d’une couronne continentale. Un permis qu’ils se sont offert d’eux-mêmes, alors qu’ils se trouvaient dans une bien mauvaise posture. Défaits 2 buts à 0 lors du match aller dans quarts de finale de Ligue des Champions à Wolsburg, les Madrilènes ont renversé la vapeur grâce à une « remontada » signée par un triplé de Cristiano Ronaldo (3-0).

Il y a quatre journées, le Real, à douze points du Barça, n’apercevait même pas les contours du trophée de la Liga. Aujourd’hui, il peut presque le toucher. Opposés à Manchester City en demi-finale de Ligue des Champions, les hommes de Zidane ont hérité d’un adversaire à leur portée. Portés par un mouvement fastueux, ils peuvent faire d’une saison qui paraissait vouée à la famine, une année d’opulence. Après la victoire face à Getafe 5 buts à 1 lors de la 33e journée, Zinédine Zidane a publiquement fait état de son appétit : « Si l’on me proposait aujourd’hui de signer pour remporter la Ligue des champions mais de ne pas gagner le championnat, et bien je ne signerais pas ! »

  • L’Atlético : la meute affamée

Grâce à sa victoire 3-0 face à Grenade à Vicente Calderon, l'Atlético Madrid a rejoint le FC Barcelone au nombre de points. | GERARD JULIEN / AFP

L’Atlético de Simeone prouve cette année encore qu’il fait partie des grands d’Europe, et que désormais, il faut compter à trois en Espagne. Depuis la saison 2013/2014, « l’Atléti » n’est plus simplement l’autre club de Madrid. Champions d’Espagne en 2014 et finalistes en Ligue des champions, les Colchoneros peuvent aujourd’hui espérer faire au moins aussi bien.

Lors des trois dernières journées de Liga, marquées par les trois défaites consécutives du Barça, l’Atlético a enchaîné trois victoires et refait son retard de 9 points. Deuxièmes à la différence de but (+41) derrière Barcelone (+59), les Madrilènes devront compter sur un faux pas des Catalans lors des cinq derniers matchs pour pouvoir les doubler. Et espérer la même chose du Real, qui avec un seul point de retard et une meilleure différence de buts (+68), peut quasiment être considéré comme à égalité.

Comme ses deux adversaires, l’Atlético n’aura pas droit à l’erreur dans ce finish. Comme le Real, il peut rêver de la Ligue des Champions, qui manque à l’armoire à trophées du club. Le titre qui serait le faîte de l’Atlético construit par Diego Simeone. Difficile de dire quelle est la priorité de l’entraîneur argentin dans cette fin de saison. Mais au vu de l’énergie dégagée par son collectif, cette équipe semble être omnivore et capable de rivaliser avec le Bayern Munich en demi-finale de le compétition européenne. Antoine Griezmann et ses coéquipiers affichent une régularité qui reflète une confiance et une sérénité bienveillantes à l’orée des échéances décisives qui se profilent.

Seul grand championnat européen où le titre est encore complètement incertain, la Liga pourrait donc voir son dénouement se jouer dans les toutes dernières journées. Chacun des trois candidats devra avoir les nerfs solides dans une fin de saison aux airs de mort subite, où chaque erreur pourrait être fatale.