En février, le patronat et les syndicats s'étaient déjà rassemblés au siège du Medef pour des négociations sur le renouvellement de la convention de l'assurance-chômage. | PHILIPE BRAULT / AGENCE VU POUR LE MONDE

Syndicats et patronat se retrouvent à la table des négociations, jeudi 28 avril, pour une cinquième séance sur l’indemnisation du chômage. Cette réunion intervient une semaine après que son président, Pierre Gattaz, a menacé de se retirer des négociations « si rien ne bougeait » sur le projet de loi travail, qui sera étudié à l’Assemblée nationale le 3 mai. Les partenaires sociaux vont tenter de trouver un terrain d’entente pour alléger les comptes de l’Unedic, l’organisme qui gère l’assurance-chômage, en déficit chronique depuis 2002, aggravé depuis 2008.

Situation financière de l'Unedic de 1990 à 2018
En milliards d'euros courants
Source : Unédic

Cette dette n’est toutefois pas causée principalement par l’indemnisation des chômeurs, mais par les ponctions de l’Etat, notamment pour financer Pôle Emploi.

Moduler la durée d’indemnisation selon le taux de chômage

C’est une nouvelle proposition émise par les organisations patronales (Medef, CGPME et UPA). Alors qu’actuellement, un jour cotisé donne droit à un jour indemnisé en cas de chômage (sur une durée maximale de deux ans), elles souhaitent faire moduler ce ratio en fonction du taux de chômage :

  • 1,2 jour indemnisé pour 1 jour cotisé quand le taux de chômage est supérieur à 12 %,

  • 0,8 jour indemnisé quand il est inférieur à 8 %.

Ce système existe déjà dans certains pays, sous différentes formes, comme en Suisse ou aux Etats-Unis. Selon Eric Courpotion, de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), « ce système serait inéquitable car deux demandeurs d’emplois ne seraient pas indemnisés de la même façon en fonction du mois où ils s’inscrivent à Pôle emploi ». Le syndicaliste souligne également « l’incertitude sur le financement » du régime avec un tel mécanisme.

Des mesures sur les seniors

Si le taux de chômage des seniors (plus de 50 ans) reste inférieur à celui de la population active (7 % contre 10 %), ils restent plus longtemps sans emploi. Actuellement, les demandeurs d’emploi de 50 ans et plus peuvent être indemnisés jusqu’à trente-six mois, au lieu de vingt-quatre pour les autres actifs.

Les jeunes davantage touchés par le chômage
Taux de chômage (au sens du BIT) par catégorie d'âge.
Source : Insee

Ce que propose le patronat

Le patronat souhaite relever à 59 ans, contre 50 ans actuellement, l’âge d’entrée dans la catégorie « senior ». Les chômeurs entre 50 et 59 ans ne seraient indemnisés que pendant deux ans maximum. En parallèle, leur compte personnel de formation (CPF) serait crédité de 500 heures.

Ce que proposent les syndicats

La CFTC et la Confédération française démocratique du travail (CFDT) sont favorables à relever cet âge d’entrée dans la catégorie « senior ». La première propose un recul de 50 à 52 ans ainsi que l’obligation pour les employeurs se séparant d’un senior de lui financer une formation qualifiante d’au moins six mois, tandis que la seconde n’a pas précisé le niveau du relèvement envisagé et souhaite taxer les entreprises qui se séparent de salariés seniors.

De son côté, la CGT souhaite introduire une contribution patronale sur les ruptures conventionnelles des seniors.

La surtaxation des contrats courts

Pour apaiser la jeunesse manifestant contre la « loi travail  », le gouvernement a proposé le 11 avril de surtaxer davantage les CDD de moins de trois mois afin de favoriser l’embauche en CDI. Cette surcotisation, qui existe depuis 2013, contribue à financer l’assurance-chômage.

Ce que propose le patronat

Les syndicats patronaux sont vivement opposés à cette mesure. Dans un communiqué, la CPGME déplorait après cette annonce qu’« au lieu de s’interroger sur les raisons qui poussent les employeurs à embaucher en CDD et de regarder comment les inciter à préférer les CDI, le gouvernement choisit la voie de la sanction financière  ». Le Medef, lui, assure que «  taxer n’est pas une solution  » et «  ne crée pas d’emplois  ». Ils exigent donc le retrait de cette mesure.

Ce que proposent les syndicats

La CGT souhaite augmenter la surcotisation patronale déjà existante et l’étendre à tous les types de contrats courts, y compris les contrats par intérim. Le syndicat Force ouvrière (FO) propose quant à lui un système de bonus-malus, consistant à pénaliser les employeurs qui abusent des contrats courts et à récompenser les entreprises qui jouent le jeu et recrutent en CDI.

La dégressivité des allocations

Aujourd’hui, les chômeurs indemnisés touchent une allocation de retour à l’emploi (ARE) fixe, qui dépend de leur ancien salaire. Cette somme ne change pas quelle que soit la durée de cette période de chômage. La dégressivité des allocations, qui était en vigueur en France de 1986 à 2001, consiste à réduire ce montant au fil du temps pour encourager les allocataires à retrouver du travail.

Ce que propose le patronat

Les syndicats patronaux souhaitent rétablir la dégressivité des indemnisations au chômage pour sanctionner l’absence de recherche d’emploi. En février, lors de précédentes négociations, le président du Medef mettait l’accent sur «  l’incitation à travailler pour tous les gens qui peuvent travailler  ».

Ce que proposent les syndicats

Pour les syndicats, il n’est pas question de réintroduire la dégressivité des allocations. En revanche, la CFDT plaide pour une dégressivité des cotisations : il s’agirait de rendre les cotisations dégressives dans le temps, quel que soit le type de contrat. La Confédération française de l’encadrement (CFE-CGC) et la CFTC, elles, souhaitent que cette dégressivité se fasse sur les cotisations patronales, calculées en fonction de la durée dans l’emploi.