Le gouverneur de l'Ohio, John Kasich, le 29 avril à Burlingame en Californie. | STEPHEN LAM / REUTERS

Les lois de physique politique ont fini par rattraper John Kasich. Le plus mal loti des candidats républicain a fini par abandonner la course, mercredi 5 mai, au lendemain d’une nouvelle défaite essuyée dans l’Indiana face au favori Donald Trump. De tous les revers subis par le gouverneur de l’Ohio, le dernier était le plus explicable puisque M. Kasich avait accepté de ne pas faire campagne dans cet Etat pour donner toutes les chances au troisième homme de la course à l’investiture républicain, Ted Cruz. L’abandon de ce dernier, mardi soir, a sonné la fin des espoirs du front anti-Trump interne au camp républicain : ceux d’évincer le milliardaire au cours d’une convention « ouverte », en juillet, à Cleveland. M. Kasich en a tiré les conséquences en se retirant à son tour.

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Au cours de la campagne, le gouverneur de l’Ohio a accumulé les soutiens de prestigieux titres de presse sans jamais réussir à convertir cette opinion favorable en bulletins de vote. En septembre, le site conservateur Redstate l’avait d’ailleurs défini comme une sorte d’« idiot utile », en le définissant comme « un républicain pour ceux qui n’aiment pas les républicains ». Encouragé en février par un électeur du parti adverse, il en avait plaisanté : « J’aurais dû me présenter à la primaire démocrate. »

M. Kasich avait mis un point d’honneur à l’emporter dans son propre Etat, un objectif atteint le 15 mars. Il a également obtenu des deuxièmes places dans le New Hampshire, le Massachusetts et le District de Columbia. Mais son total de délégués est resté inférieur à celui de Marco Rubio, qui avait abandonné au soir de son revers en Floride, il y a un mois et demi.

Faire valoir son bilan

C’est parce qu’il a considéré qu’aucun candidat modéré ne s’imposait d’emblée dans la course à l’investiture républicaine pour la présidentielle du 8 novembre que M. Kasich s’est porté sur les rangs, en dépit d’une forte concurrence qui a au final servi Donald Trump en dispersant les voix de cette famille républicaine. Et c’est parce que la colère qui secoue la base républicaine a rendu inaudible ce courant pragmatique qu’il s’est heurté au même mur qui a poussé successivement en dehors de la course Chris Christie et Jeb Bush avant M. Rubio.

Ordinairement pondéré et réaliste, M. Kasich, 63 ans, est apparu au cours des débats comme une variante du « conservatisme compassionnel » que le gouverneur du Texas, George W. Bush, avait imposé lors de la campagne présidentielle de 2000. Il a été parmi les premiers à s’inquiéter de l’ascendant pris par un outsider inattendu, le magnat de l’immobilier Donald Trump, sans pour autant parvenir à le mettre en difficulté lors des débats, puis en tentant de l’ignorer délibérément pour se présenter comme « le seul adulte » de ces discussions souvent houleuses.

Depuis l’annonce de sa candidature, après une première tentative avortée en 2000, le gouverneur, depuis 2010, d’un swing State (« Etat indécis ») particulièrement décisif pour la présidentielle n’a cessé de faire valoir son bilan, à ses risques et périls. Il s’appuyait en effet sur son expérience à la Chambre des représentants, à la commission des forces armées et à celle du budget, à un moment où le Congrès est une source d’exaspération pour une partie de la base républicaine. Et que dire de sa brève expérience dans le secteur privé, au sein de la banque d’affaires Lehman Brothers…

Fils d’un couple d’émigrants tchèque et croate, né en 1952 près de Pittsburgh, en Pennsylvanie, John Kasich, étudiant, avait été reçu, en 1970, à la Maison Blanche, par le président républicain, Richard Nixon, alors au faîte de sa carrière. Il avait obtenu cette faveur après avoir envoyé une lettre au président, dans laquelle il avait exprimé ses préoccupations concernant le sort des États-Unis. Huit ans plus tard, il était élu au Sénat de l’Ohio et, en 1983, il commençait une carrière fructueuse au Congrès des Etats-Unis. A moins d’être choisi pour le poste de vice-président par M. Trump dont il est l’exacte contraire, l’abandon de mercredi sonne probablement la fin de ses ambitions nationales.