Examen à la faculté de médecine de Marseille, en décembre 2012. | AFP/ANNE-CHRISTINE POUJOULAT

Pour devenir étudiant en médecine en Ile-de-France, il ne suffira plus d’être un excellent élève, il faudra aussi avoir de la chance. Le Service interacadémique d’affectation des étudiants en première année d’études médicales et odontologiques (Sadep) a en effet annoncé au Monde que, pour la première fois, le rectorat de Paris a fixé une capacité d’accueil limitée en Ile-­de-France en première année commune aux études de santé (Paces), en accord avec le ministère de l’éducation nationale. Seuls 7 500 étudiants seront admis, alors qu’ils étaient plus de 8 143 en 2015.

Si l’on ignore encore combien de futurs bacheliers précisément postuleront cette année, les vœux déjà formulés sur le portail Admission post­bac (APB) indiquent qu’ils seront au moins aussi nombreux que l’année dernière. « Plus de 14 108 futurs bacheliers ont inscrit Paces dans au moins l’un de leurs vœux et plus de 8 000 en premier vœu », selon Jean­-Luc Dubois-­Randé, directeur de la faculté de médecine de Paris-­Est-­Créteil-­Val­-de-­Marne. Que ces chiffres se confirment, et ce sont donc plus de 600 étudiants franciliens ayant choisi la Paces comme premier vœu qui pourraient être redirigés vers leur second choix après tirage au sort, soit près de 8 % des candidats. Etant donné l’attractivité non démentie des études de santé ces dernières années, l’hypothèse est plus que probable.

Pas de deuxième chance

« Il est difficile de dire à des bacheliers qui souhaitent s’engager dans des études très difficiles qu’ils ne pourront même pas tenter leur chance, déplore Rémi Patrice, vice-président de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf) chargé des études médicales. De plus, le tirage au sort élimine d’office des étudiants qui ont statistiquement le bon profil pour réussir, c’est catastrophique. » Sans compter qu’une fois éliminés au tirage, les étudiants n’auront pas de deuxième chance : l’année prochaine, le portail APB les considérera comme des étudiants en réorientation et non comme des nouveaux bacheliers, si bien qu’ils ne seront plus prioritaires.

A l’origine de cette décision : « Le refus d’une université parisienne de recevoir plus d’étudiants, ce qui a obligé les autres facultés d’Ile­-de-­France à définir une capacité d’accueil », selon Rémi Patrice. Ainsi, l’université de Paris-­Descartes se verra attribuer 1 682 étudiants, Pierre-­et­-Marie ­Curie en recevra 1 557, Paris-Diderot 1 572, Paris -Sud 637, Paris-­Est-Créteil 811, Paris-Nord 679 et l’université de Versailles-­Saint­-Quentin 562. En outre, afin de respecter le principe d’équité, les universités accueilleront chacune un nombre d’étudiants proportionnel à leur numerus clausus – le nombre d’étudiants sélectionnés sur concours à la fin de la première année. C’est pourquoi, mécaniquement, les universités auront désormais toutes le même taux de réussite (environ 15 %).

Si le problème ne se pose pour l’instant qu’en l’Ile-de-France, il pourrait bien s’étendre. « On s’approche du point de rupture : il y a de plus en plus de candidats et les amphithéâtres ne sont pas extensibles à l’infini. Paris n’est que le symptôme d’un problème plus global », prédit Rémi Patrice. Faut-il alors sélectionner les étudiants dès l’entrée en Paces, comme le proposait l’Ordre des médecins dans un Livre blanc publié le 26 janvier, qui appelait à « réfléchir à un système de présélection avant l’année de Paces […], afin de limiter le taux d’échec » ? Jean-­Luc Dubois-Randé ne se dit « pas pour une sélection à l’entrée » et préférerait que les universités « multiplient les passerelles entrantes et sortantes », pour intégrer des profils différents et permettre aux étudiants qui échouent en Paces de pouvoir rebondir.

L’Anemf refuse également toute sélection sur dossier, bien qu’elle affirme comprendre « que les capacités d’accueil des universités ne sont pas infinies », précise Rémi Patrice. Avant d’évoquer plusieurs pistes : « une meilleure information des lycéens en amont », la multiplication des passerelles dès le deuxième semestre de Paces et des cours numérisés pour permettre aux étudiants de travailler un maximum depuis chez eux. « On sait bien qu’un mois après la rentrée, entre les abandons et la répartition des étudiants en petits groupes de travaux dirigés, il y a suffisamment de place dans les universités pour accueillir tout le monde », rappelle­-t-­il.