Simone Gbagbo est actuellement incarcérée à Abidjan, en Côte d'Ivoire. | Rebecca Blackwell / AP

La Cour suprême de Côte d’Ivoire a rejeté jeudi 21 avril le pourvoi en cassation de Simone Gbagbo, l’ex-première, ouvrant définitivement la voie à son procès pour crimes contre l’humanité. « Je suis fortement déçu (…). La Cour suprême a rendu une décision politique », a réagi Me Rodrigue Dadjé, un des avocats de Mme Gbagbo.

Le 27 janvier, la chambre d’accusation avait renvoyé Mme Gbagbo, 66 ans, devant les assises pour crimes contre l’humanité. Elle s’était alors pourvue en cassation. Mais le 17 mars, la Cour de cassation avait rejeté ce pourvoi, arguant que son mémoire avait été déposé « tardivement ». Affirmant avoir déposé ce mémoire dans les temps, Me Dadjé avait contesté cette décision.

L’épouse de l’ancien président Laurent Gbagbo – actuellement jugé à par la Cour pénale internationale (CPI), à La Haye –, a été condamnée en mars 2015 à vingt ans de prison, notamment pour attentat contre l’autorité de l’Etat, lors de la crise postélectorale de 2010-2011.

Une « justice opérationnelle »

Mme Gbagbo est actuellement incarcérée à Abidjan. Considérée comme une protagoniste de la crise, l’ancienne « Dame de fer », à la personnalité très controversée, est également poursuivie pour crimes contre l’humanité par la CPI. Mais Abidjan refuse son transfèrement à La Haye malgré plusieurs requêtes de la Cour, affirmant être en mesure d’assurer à l’ex-première dame une justice exemplaire sur le sol ivoirien.

« Les infractions pour lesquelles elle est poursuivie à Abidjan sont les mêmes que celles de la CPI. Or le principe de la CPI est ceci : ou vous jugez la personne, ou vous nous la remettez », avait expliqué un magistrat ivoirien ayant requis l’anonymat. Alassane Ouattara, le président de la Côte d’Ivoire, a affirmé au début de février qu’il « n’enverrait plus d’Ivoiriens » à la CPI, estimant que son pays avait désormais une « justice opérationnelle ».

La crise postélectorale est née du refus de M. Gbagbo de reconnaître la victoire de M. Ouattara à la présidentielle de novembre 2010. Des violences avaient fait plus de 3 000 morts en cinq mois. Si les deux camps se sont montrés coupables d’exactions pendant la crise de 2010-2011, aucun responsable pro-Ouattara n’a à ce jour été inquiété, ce qui nourrit les accusations par l’opposition de « justice des vainqueurs ».