Dominique Marchal, premier exploitant dont le cancer a été reconnu comme maladie professionnelle, ici le 18 février à Serres. | JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP

Il est l’un des visages de la lutte contre les pesticides. Jeudi 21 avril, Dominique Marchal a subi un revers dans le combat qu’il mène depuis plus de dix ans. Cet agriculteur de Meurthe-et-Moselle, premier exploitant dont le cancer a été reconnu comme maladie professionnelle, demandait réparation à l’Etat pour sa pathologie, qu’il impute à l’usage de pesticides. Sa demande vient d’être rejetée par la cour d’appel de Metz.

Dominique Marchal, 58 ans, souffre depuis 2002 d’un syndrome myéloprolifératif, une pathologie du sang de type cancéreux. Depuis le diagnostic, cet exploitant de Serres n’a eu de cesse, avec son épouse, de faire reconnaître le lien entre sa maladie et le benzène présent dans plusieurs pesticides et herbicides.

En 2006, après quatre années de combat, la Sécurité sociale lui donne raison : il devient alors le premier agriculteur français dont le cancer est reconnu comme étant une maladie professionnelle. M. Marchal décide de se pourvoir en justice pour demander à la commission d’indemnisation des victimes d’infraction du tribunal d’Epinal de condamner l’Etat, à travers son Fonds de garantie, à l’indemniser.

Une décision « incompréhensible »

Condamné en première instance et en appel à Nancy, l’Etat s’était pourvu devant la Cour de cassation, qui a annulé sa condamnation en décembre 2014 et renvoyé l’affaire devant la cour d’appel de Metz. Jeudi, celle-ci a estimé que les preuves de « l’imputabilité de la maladie de M. Marchal aux effets nocifs du benzène présent dans les produits phytopharmaceutiques utilisés » n’étaient pas suffisantes et a rejeté la demande d’indemnisation.

Cette décision est « injuste et incompréhensible », a réagi M. Marchal. « Nous nous laissons le temps d’avaler tout ça avant de voir la suite ». « Mes clients sont très déçus mais également en colère, a ajouté son avocat, François Lafforgue. Il a fallu passer devant plusieurs experts pour en arriver à la reconnaissance de lien entre maladie et pesticides et aujourd’hui on remet tout en cause. » L’avocat « réfléchit très sérieusement à la possibilité de se pourvoir en cassation ».

La cour d’appel se fonde notamment sur l’absence de mention du benzène sur les étiquettes des produits – ce que dénonçait l’accusation, estimant qu’il s’agissait de « désinformation volontaire ».

« Elle se borne à statuer sur la question du lien de causalité, alors que nous avions toujours apporté des éléments permettant de le démontrer, sans se prononcer sur le fond du dossier, c’est-à-dire les fautes commises par les fabricants », a estimé M. Lafforgue. A l’audience le 25 février, l’avocate générale avait demandé à la cour de reconnaître le droit de M. Marchal à être indemnisé.