Philippe Poutou, lors d'une manifestation des employés de Brittany Ferries pour sauver leurs emplois, le 23 novembre 2013 à Morlaix. | FRED TANNEAU / AFP

C’est finalement Philippe Poutou qui représentera le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) en 2017. Cinq ans après avoir été le premier candidat à l’élection présidentielle du NPA, l’ouvrier de chez Ford a de nouveau été désigné, dimanche 20 mars à Nanterre, pour porter les couleurs du parti dans treize mois. « Il y a quasiment eu l’unanimité pour qu’il soit candidat », assure Alain Krivine, figure historique de la formation d’extrême gauche.

M. Poutou explique au Monde qu’il n’avait pas forcément envie à tout prix de repartir, mais que, « dans une situation difficile, le plus simple, c’était que ce soit [lui] qui y retourne ». « J’ai une petite expérience, souligne le candidat de 49 ans. Je n’arrive pas en terrain inconnu, même si on sait que ce sera une campagne compliquée. » Ce dernier compte désormais sur les manifestations contre le projet de loi sur le travail pour faire entendre la voix du NPA. « Cela nous a redonné la pêche, affirme-t-il. On a envie de régler des comptes. Cette présidentielle, pour nous, c’est une tribune. »

En 2012, une campagne difficile

En 2012, alors inconnu, M. Poutou avait obtenu 1,15 % des voix au terme d’une campagne difficile. Comme Nathalie Arthaud, la candidate de Lutte ouvrière (LO), il avait souffert de la concurrence de Jean-Luc Mélenchon, qui avait attiré sur sa candidature une partie des suffrages de l’extrême gauche. Mais à l’approche du premier tour, cet ouvrier, qui faisait ses premiers pas dans la politique nationale, avait gagné en sympathie et terminé devant la candidate LO.

Un an plus tôt, M. Poutou avait eu la délicate mission de succéder à Olivier Besancenot, candidat à deux reprises de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), en 2002 et 2007. Ce dernier, qui avait réalisé les meilleurs scores du parti avec plus de 4 % des suffrages à deux reprises, n’avait pas voulu se représenter cinq ans plus tard. Et a fait savoir qu’il ne souhaitait toujours pas rempiler en 2017.

Mécanicien à l’usine automobile Ford de Blanquefort, en Gironde, M. Poutou s’était fait connaître à travers son combat à la CGT pour la sauvegarde des emplois au sein de son entreprise. En 2014, il avait quitté la direction resserrée du NPA, critiquant un comité exécutif du parti « trop parisien » et dénonçant des « problèmes de fonctionnement, de manque de démocratie, de manque de respect entre camarades ». Même s’il reconnaît qu’il y a encore des « débats » en interne, le candidat se félicite d’une certaine « unité » retrouvée. « En 2011, c’était galère, on était coupé en deux et je n’étais pas connu, se souvient-il. Là, on se sent un peu moins démunis. » Trois porte-parole de campagne l’accompagneront au cours des prochains mois, dont M. Besancenot. « Cela permet de limiter la personnalisation », juge M. Poutou.

Ces dernières années, le mouvement d’extrême gauche a vécu des temps difficiles. En 2009, la Ligue, devenue le NPA, connaissait son apogée avec plus de 9 000 militants et l’idée de créer un parti de masse. Mais plusieurs crises internes ont eu raison de cet idéal. Depuis, la formation a perdu son financement public dans la foulée des législatives de 2012 et, au lendemain de la présidentielle, a dû faire face au départ de nombreux cadres et militants pour le Front de gauche.

Comme en 2012, M. Poutou devra affronter la concurrence d’une autre candidature à l’extrême gauche, celle de Mme Arthaud. Il lui faudra déjà réunir les 500 parrainages d’élus, nécessaires pour pouvoir se présenter. Une tâche qui pourrait être rendue plus complexe pour les « petits » candidats par une proposition de loi actuellement débattue au Parlement. Selon ce texte, les élus devraient désormais transmettre leur parrainage directement au Conseil constitutionnel, alors qu’auparavant ils pouvaient le remettre au candidat. « C’est une barrière supplémentaire, mais c’est à nous de montrer que ça vaut le coup qu’on soit présents », explique M. Poutou.