Place de la bataille de Stalingrad, le 14 avril, la foule a été encadrée par des CRS. Après avoir reçu des projectiles, les policiers ont chargé et lancé des gaz lacrymogènes. | THIERRY PASQUET/SIGNATURES pour M Le magazine du Monde

Dès son début, place de la bataille de Stalingrad, jusqu’à la fin prématurée du parcours place de la République, la mobilisation contre le projet de loi El Khomri du jeudi 11 avril, à Paris, a été ponctuée d’incidents entre manifestants et forces de l’ordre.

La tension s’est fait sentir dès le début de la journée : le matin, deux membres de la direction du lycée Voltaire, dans le 11e arrondissement, ont été agressés. L’un d’eux a reçu un « coup violent » à la tête, l’autre a reçu un sac de gravats. Le rectorat a déposé une plainte, soutenu par la présidente de la région, Valérie Pécresse (Les Républicains).

Les incidents ont continué lors d’une manifestation de lycéens, « pas vraiment autorisée », comme le confie une des participantes : « A 11 heures, nous sommes partis de la place de la République, pour aller vers Jaurès [nord-est de Paris]. Une fois arrivée là-bas, je n’ai pas compris ce qui s’est passé, on a été bloqués, et pris comme dans une nasse. »

Place de la bataille de Stalingrad, la foule a été encadrée par des CRS. Après avoir reçu des projectiles, les policiers ont chargé et lancé des gaz lacrymogènes. Ils ont interpellé quatre personnes, avant même le début de la manifestation officielle. Bohèm, lycéenne au lycée Rodin dans le 13e arrondissement :

« J’ai fui dans un restaurant chinois à côté de la place. Une des filles qui étaient avec moi avait la tête en sang, et elle a été emmenée aux urgences. Après, j’ai pu retourner vers la place, on est restés au moins une heure à attendre de pouvoir repartir. »

Quand le cortège, rejoint par les organisations étudiantes et les syndicats (Coordination nationale étudiante, Solidaires étudiants, Mouvement inter luttess indépendant), est reparti en direction de la place de la Bastille, il a été « encadré de très près par la police », comme le raconte Xavier Chiarelli, du syndicat Sud-Poste-92.

« Je n’ai rien compris à ce qui m’arrivait »

A 15 h 30, la manifestation est arrivée place de la République, s’apprêtant à poursuivre son chemin jusqu’à la Bastille. Les manifestants scandaient leurs slogans contre le projet de loi El Khomri, appelant à la grève générale. Soudain, un bruit sourd a retenti sur la place, vite envahie par des fumées. Selon l’AFP, c’est le même schéma qui s’est répété : les CRS ont été visés par des projectiles, ils ont chargé et envoyé des gaz lacrymogènes pour calmer la foule.

Les 1 700 personnes ont très vite été dispersées, trouvant refuge dans les rues adjacentes à la place de la République, en se cachant le visage. Ali, étudiant en philosophie, a reçu de très près un jet de gaz lacrymogène :

« Je n’ai rien compris à ce qui m’arrivait. Je parlais avec le policier à côté de moi, et d’un coup, ils se sont énervés et ont commencé à charger. »

Quatre personnes au total ont été légèrement blessées d’après l’AFP. Les manifestants ont tenté de se rassembler, mais les policiers ont entouré la place et fermé ses entrées. « C’est comme s’ils bloquaient la place, c’est ridicule », soulignait un des participants. Interrogées par Le Monde, les forces de l’ordre sur place refuseront de commenter « les événements de la journée », jusqu’au nombre de personnes présentes sur la place.

La manifestation s’arrêtera là : après une vingtaine de minutes de flottement, les responsables étudiants ont jeté l’éponge. Une des membres de l’organisation :

« De toute façon, ils ne nous laissent pas passer, c’est fini. Maintenant, on va rentrer. »

Près de 400 personnes étaient encore présentes sur la place de la République, redevenue calme, aux alentours de 16 heures. La manifestation finie, c’est Nuit debout qui s’apprêtait à recommencer.