Des étudiants venus soutenir les 13 lycéens du lycée Léonard de Vinci mis en garde à vue lundi 2 mai 2016 | Le Monde

Pour treize étudiants du lycée Léonard de Vinci à Levallois, la rentrée des classes s’est effectuée dans les locaux de la sûreté territoriale de Nanterre, en garde à vue, puis dans les cellules des commissariats des Hauts-de-Seine. Agés de 15 à 18 ans, ils ont été convoqués lundi 2 mai pour des faits liés aux dégradations survenues dans leur établissement le 5 avril dernier.

Ce jour-là, peu avant 9 heures un blocage du lycée avait été organisé en marge de la manifestation contre le projet de loi travail. La situation s’était rapidement envenimée, et des feux de poubelles avaient été allumés provoquant un incendie dans le hall d’entrée, avant que les pompiers ne puissent venir à bout des flammes.

Le hall du lycée Léonard-de-Vinci détruit par un incendie volontaire
Durée : 01:34

Dans la journée de lundi, quelques heures après les premières gardes à vue, un rassemblement de soutien a été organisé devant les locaux de la sûreté territoriale de Nanterre. Environ 70 personnes ont manifesté, sans incident, pendant deux heures. Parmi elles, des syndicalistes de Sud PTT 92, très actifs dans l’aide aux lycéens mobilisés contre la loi travail, des parents de la FCPE (Fédération des conseils de parents d’élèves), des étudiants de la CNE (coordination nationale étudiante)…

« Nous avons été alertés par un SMS du réseau de la CNE. Nous sommes venus pour montrer aux lycéens emprisonnés injustement qu’ils ne sont pas tous seuls. Mais aussi pour montrer à la police qu’elle ne peut pas systématiquement nous réprimer », explique un étudiant de l’université Paris 6 qui préfère rester dans l’anonymat.

Une garde à vue un jour de rentrée

Selon Me Hugo Delhoume, avocat de l’un des jeunes mis en cause et présent devant les locaux de la sûreté territoriale, « cet endroit n’est pas adapté aux gardes à vue ». « C’est un service qui a plus l’habitude de la grande délinquance que des manifestations lycéennes. Ces convocations ont lieu le jour de la rentrée scolaire en Ile-de-France ce qui signifie qu’on stigmatise ces lycéens devant tout le monde. »

Un geste politique analyse pour sa part Me Dimitri Monforte, conseil d’un lycéen de 15 ans en garde à vue et membre du syndicat des avocats de France. Il s’indigne notamment du temps passé en cellule : « Avait-t-on besoin de les garder en cage pendant 24 heures pour une heure d’audition ? C’est totalement disproportionné car on sait où ces jeunes vont à l’école et où habitent leurs parents. Ils ne risquent pas de s’échapper au Brésil ! »

La mère d’un des lycéens explique de son côté que « son fils de 15 ans s’est laissé entraîner dans les débordements du 5 avril et qu’il regrette ». Le savoir dans une cellule est « difficile », même si elle estime que « cela lui fera une bonne leçon ».

À 18 h 30 les manifestants se sont dispersés et donné rendez-vous mardi matin devant la préfecture de police de Nanterre. Sur le chemin du retour, un étudiant interpelle assez vivement les policiers en faction : « Vous ne défendez pas un état de droit, mais un état capitaliste qui s’attaque aux jeunes ! » « Et toi tu as bien appris par cœur ton discours ! », lui rétorque le fonctionnaire de police. « Je l’ai appris sous les coups de votre matraque à la dernière manifestation », réplique le jeune homme.

Selon les informations recueillies auprès des forces de police, ces 13 lycéens, qui ne seraient pas tous scolarisés à Léonard de Vinci, passeront la nuit en garde à vue avant d’être déferrés devant le procureur de la République de Nanterre mardi matin. Si des poursuites sont engagées, les mineurs pourront être présentés devant un juge pour enfants et les majeurs devant la justice correctionnelle. Si aucune poursuite n’est enclenchée par le parquet, les lycéens pourront être remis en liberté, avec ou sans rappel à la loi.