Olivier Zarrouati, PDG de Zodiac. | BENOIT TESSIER / REUTERS

Si, en avion, vous n’avez pas la chance de voyager en classe business ou en première, vous avez sûrement expérimenté l’épreuve de l’attente aux toilettes. Fabrice Brégier, le patron d’Airbus, voyage sûrement en première, mais cela ne l’a pas empêché de devoir attendre lui aussi. Mais c’était pour livrer des avions tout équipés à ses clients. Et il a fini par pousser un coup de gueule. En janvier, il a accusé son fournisseur Zodiac de lui avoir fait louper 15 livraisons de son tout nouveau A350, faute de cabinets livrés à l’heure.

Voilà un an et demi que l’équipementier ­Zodiac, l’un des plus importants fournisseurs mondiaux de sièges et d’équipements intérieurs d’avions, se débat dans des problèmes de retard. Des difficultés qui lui ont coûté la confiance de ses clients et une chute de ses bénéfices et du cours de son action, qui a perdu 40 % en un an. Pas étonnant donc que cet accident industriel ait immanquablement alimenté les rumeurs d’un rachat de l’entreprise. Jeudi 21 avril, l’agence Bloomberg a soufflé sur les braises en indiquant que le groupe Safran, premier équipementier aéronautique européen, étudiait une offre de rachat de l’entreprise, valorisée aujourd’hui 5,5 milliards d’euros.

Bien entendu, les deux entreprises nient toute discussion. Mais le PDG de Zodiac, Olivier Zarrouati, avait lui-même entretenu une certaine ambiguïté en indiquant en mars être « réceptif à ce qu[’ils] considérer[aient] comme étant dans l’intérêt des actionnaires de l’entreprise ». Le genre de phrases toutes faites qui prennent soin de ne fermer aucune porte. La famille Domange et ses alliés, y compris l’entreprise elle-même, contrôlent le conseil d’administration et près du quart du capital. Elle n’a jamais fait part de son intention de vendre et avait résisté fermement aux avances du même Safran quand celui-ci avait fait une tentative en 2010. Mais les nombreux fonds d’investissement anglo-saxons actionnaires pourraient faire pression.

La facture du succès d’hier

Tout dépendra probablement du bon achèvement du redressement de l’entreprise qui conditionnera le retour en grâce boursier. A l’occasion de la présentation de ses résultats semestriels ce jeudi 21 avril, Olivier Zarrouati a de nouveau usé de sa sémantique subtile pour indiquer que le groupe n’était pas « sorti de crise, mais en train d’en sortir ». C’est cette trajectoire nouvelle qui sera suivie de très près par tous les acteurs industriels et financiers qui rôdent autour du dossier.

Le patron de Zodiac paie la facture de son succès d’hier. Sa boulimie d’acquisitions, notamment aux Etats-Unis, qui a propulsé l’entreprise au premier rang mondial de son secteur, n’a pas été suivie de la rationalisation industrielle et managériale nécessaire. Il s’est alors retrouvé incapable de suivre l’accélération de la production de ses partenaires Boeing et surtout Airbus. Il n’est pas bon de faire attendre trop longtemps ses clients à la porte des toilettes.