Capture d’écran d’une vidéo de la chaîne flamande TV Brussel montrant Salah Abdeslam se promenant dans les rues de Molenbeek en août 2014. | AP

C’est, sans doute, une autre piste négligée, alors qu’elle aurait permis de repérer Salah Abdeslam avant les attentats du 13 novembre 2015 à Paris : trois semaines avant les attaques contre des terrasses de café et la salle de concert du Bataclan, le dixième membre des commandos s’affichait sur les réseaux sociaux avec le drapeau de l’organisation Etat islamique (EI).

La radio-télévision belge RTBF a révélé l’information mardi 17 mai au matin, mais celle-ci avait, en fait, été divulguée, en son temps, par l’Organe de coordination pour l’analyse de la menace (OCAM), qui informe régulièrement les autorités belges. Selon la RTBF, cette piste a été négligée, n’entraînant aucune réaction de la police fédérale ou des services de renseignement.

Salah Abdeslam a arboré l’emblème de l’EI le 23 octobre 2015 sur sa page Facebook. Même repérée par les services de l'OCAM, cette indication quant au risque potentiel représenté par cet individu n’a donc eu aucune conséquence. L’épisode sera vraisemblablement au cœur des discussions de la commission parlementaire qui examine actuellement les attentats commis le 22 mars en Belgique, mais qui entend déterminer également si les diverses enquêtes menées antérieurement ont, oui ou non, négligé des éléments-clés.

Les députés devraient aussi tenter de déterminer si l’éventuelle implication d’Abdeslam dans les attentats de Bruxelles a été correctement analysée. Il avait été arrêté le 18 mars à Molenbeek mais, semble-t-il, interrogé pendant très peu de temps sur les éventuels attentats qu’auraient pu commettre, en Belgique cette fois, certains de ses complices.

Il apparaît en tout cas, dès maintenant, qu’un travail plus minutieux aurait sans doute permis de repérer plus tôt le terroriste, un proche d’Abdelhamid Abaaoud, le coordinateur présumé des attaques de Paris, par ailleurs dirigeant de la cellule de Verviers, démantelée en janvier 2015.

Manque de moyens humains

Un informateur de la police de Molenbeek a signalé dès janvier 2015 le rôle possible d’Abaaoud et d’Abdeslam dans les filières djihadistes. Plus tard, une policière de la section antiterroriste a reçu des indications quant à la radicalisation de Salah Abdeslam et de son frère Brahim. L’information transmise par la policière à sa hiérarchie a eu peu d’écho.

C’est en juin 2015, indique la RTBF, que Salah Abdeslam a ouvert un profil Facebook avec un nom de guerre. Là non plus, aucune suite : le magistrat fédéral qui avait ouvert une information judiciaire en janvier avait déjà refermé le dossier.

Faute de moyens humains, selon la version officielle, les services belges n’ont pu s’intéresser aux nombreux véhicules loués par Salah Abdeslam pour se rendre en Grèce, en Autriche et en Hongrie pour véhiculer des complices avant les attentats de Paris. Ni écouter ses conversations. La Belgique a appris par l’EI en novembre 2015 qu’il avait séjourné en Syrie.

Dernier élément que devraient bientôt examiner les députés : il se confirme que, plusieurs mois avant l’arrestation d’Abdeslam, un policier de Malines avait informé son supérieur de l’adresse de l’une des planques possibles de l’homme recherché. Rue de Dries, à Forest, à l’endroit où, le 15 mars, une perquisition dite « de routine » avait tourné à la fusillade. Le suspect était parvenu à fuir, couvert par son complice Mohamed Belkaid, un Algérien abattu par les forces spéciales.