Au Brésil, l’affaire Petrobras, vaste réseau de corruption qui a coûté plus de deux milliards de dollars au groupe étatique pétrolier, implique plusieurs dizaines d’hommes et femmes politiques, membres du gouvernement, élus du parti des travailleurs, la formation de la présidente Dilma Rousseff, ou hauts responsables de l’opposition. Panorama des principales personnes éclaboussées par le scandale.

Dilma Rousseff : une présidente sur le fil

La présidente du Brésil, Dilma Rousseff, à Brasilia le 9 mai 2016. | ADRIANO MACHADO / REUTERS

La présidente brésilienne, qui fait l’objet d’une procédure de destitution, est accusée dans plusieurs affaires, dont celle de Petrobras.

  • Petrobras : ancienne ministre des mines et de l’énergie entre 2003 et 2005, le ministère de tutelle de Petrobras, et ancienne présidente du conseil d’administration du géant pétrolier, elle ne pouvait, pour beaucoup de Brésiliens, qu’être au courant des pratiques de la société au cœur d’une tentaculaire affaire de corruption. La présidente n’aurait pas bénéficié directement des pots-de-vin, mais ils auraient pu servir au financement de ses campagnes présidentielles de 2010 et 2014.
  • Maquillage des comptes du pays : Elle est également soupçonnée d’avoir eu recours à la mécanique dite du « dribble fiscal » pour maquiller les comptes du pays en 2013. Son gouvernement aurait ainsi financé des dépenses budgétaires par des emprunts aux banques publiques. Cette manœuvre, souvent utilisée par les gouvernements précédents, lui aurait permis d’être réélue en 2014, malgré une situation économique difficile.
    Les comptes publics brésiliens de 2014 ont été rejetés à l’unanimité par le tribunal des comptes de l’union, le 7 octobre 2015. La procédure de destitution qui vise aujourd’hui Dilma Rousseff a été initiée dans la foulée, en décembre 2015, par Miguel Reale et Helio Bicudo, ce dernier étant l’un des fondateurs du Parti des travailleurs, le parti de gauche auquel appartient Dilma Rousseff.
  • Entrave à la justice : Des soupçons d’entrave à la justice pèsent aussi sur Dilma Rousseff. Alors que l’étau judiciaire commençait à se resserrer autour de son prédécesseur et mentor, Lula Da Silva, la présidente a décidé de l’appeler au gouvernement en mars 2016. Officiellement pour l’aider à rétablir la situation économique du pays. Officieusement pour assurer l’immunité judiciaire à Lula et lui permettre d’échapper aux poursuites dont il fait l’objet.
    Mais le juge fédéral Sergio Moro, chargé de l’enquête Petrobras, a diffusé l’enregistrement d’une conversation téléphonique entre les deux protagonistes, qui a accentué les soupçons. On y entend Dilma Rousseff dire à Lula de n’utiliser le décret de nomination au gouvernement qu’en cas « d’absolu nécessité ». Comprendre : s’il est cerné par la justice et n’a plus aucune échappatoire.

Du côté du parti des travailleurs (PT)

De haut en bas et de gauche à droite : Lula da Silva, Delcidio do Amaral, Ricardo Berzoini et Joao Vaccari.

  • Luiz Inacio Lula da Silva. Décrit par le procureur général, Rodrigo Janot, comme l’acteur central de « l’organisation criminelle » ayant orchestré les financements occultes, l’ancien président (2003-2010) est au cœur de la tempête politique. Il est notamment soupçonné d’être, avec son épouse, le vrai propriétaire d’un triplex situé dans la station balnéaire de Guaruja, enregistré au nom du groupe de construction OAS, entreprise impliquée dans le scandale Petrobras. Le procureur a par ailleurs demandé au tribunal suprême fédéral (STF) l’autorisation d’enquêter pour « entrave à la justice ».
  • Delcidio do Amaral. Le parlementaire dirigeait le groupe sénatorial du PT jusqu’à son arrestation en novembre dans le cadre de l’enquête Petrobras. Il avait été pris en flagrant délit alors qu’il tentait d’acheter le silence d’un ancien directeur du groupe pétrolier en prison. Incarcéré à son tour, il a décidé de collaborer avec la justice en échange d’une remise de peine. Ses nombreuses dénonciations ont conduit à des demandes d’enquête. Il a déclenché un séisme politique en soutenant que Dilma Roussef et Lula avaient bénéficié du vaste réseau de corruption.
  • João Vaccari Neto. L’ancien trésorier du parti a été condamné en septembre 2015 à quinze ans de prison pour corruption passive dans le cadre de l’affaire Petrobras.
  • Jaques Wagner, Ricardo Berzoini, Edinho Silva. Respectivement chef de cabinet de Dilma Rousseff, ministre attaché à la présidence, et ministre de la communication sociale, ils font partie de la garde rapprochée de la présidente. Comme Lula, ils sont visés par une demande d’enquête de Rodrigo Janot, pour corruption et association de malfaiteurs.

Chez les centristes du PMBD, ancien allié du gouvernement

De haut en bas et de gauche à droite : Michel Temer, Romero Juca, Eduardo Cunha et Renan Calheiros.

  • Michel Temer. Le vice-président du Brésil, qui remplacerait Dilma Rousseff si elle était destituée, a été mis en cause par plusieurs inculpés du dossier Petrobras. Mais à ce stade, le procureur estime qu’il n’y a pas d’indices suffisants pour réclamer une enquête. Par ailleurs, il a été condamné à verser une amende pour infraction à la loi sur le financement de campagnes électorales. Il risque une inéligibilité de huit ans, présidentielle de 2018 incluse.
  • Romero Juca. Ce sénateur proche de Michel Temer est également dans le viseur du procureur général, dans l’enquête principale pour corruption et association de malfaiteurs.
  • Eduardo Cunha. L’ancien président de la chambre des députés a été suspendu le 5 mai pour entrave aux enquêtes le visant dans le cadre du scandale de corruption Petrobras. Il est en instance de jugement pour corruption. Il est également fragilisé depuis la

    révélation, en octobre 2015, de l’existence de comptes cachés en Suisse à son nom et au nom de membres de sa famille. Les sommes, qui se chiffrent en millions d’euros, seraient issues de pots-de-vin touchés lors de contrats de forage en mer.

  • Renan Calheiros. Président du Sénat, il est lui aussi soupçonné d’avoir touché des pots-de-vin du réseau monté au sein du groupe pétrolier. Il a survécu à d’autres affaires par le passé.

A droite : des membres du PSDB et du PP impliqués

Waldir Maranhao et Aecio Neves.

  • Waldir Maranhao. Catapulté le 5 mai à la présidence de l’Assemblée après la suspension du président de la chambre basse, Eduardo Cunha, le député du parti progressiste (PP), est lui-même soupçonné de corruption dans le dossier Petrobras.