Dans une station-essence de la région du Delta, en décembre 2012. | AKINTUNDE AKINLEYE / REUTERS

Mobilisés contre l’augmentation soudaine de 67 % du prix de l’essence à la pompe, les syndicats nigérians ont appelé à une grève illimitée « si mardi à minuit, le gouvernement n’a pas ramené les tarifs à 86,5 nairas (0,38 euro/0,43 dollar) par litre ». Le Nigeria, dont 70 % des revenus dépendent du pétrole, est le premier producteur de brut d’Afrique.

La fin de l’essence subventionnée, qui doit entraîner une hausse des prix à 145 nairas (0,64 euro/0,73 dollar) par litre, est censée s’accompagner d’une libéralisation du secteur qui permettrait à de nouveaux acteurs de se fournir en devises sur le marché parallèle pour importer du carburant. Objectif : mettre fin aux pénuries qui obligent depuis des mois les Nigérians à faire la queue devant les stations-service.

L’effondrement des cours du baril, entraînant celui de la monnaie nationale, a en effet plongé le pays dans une grave crise financière. Pour soutenir le naira, le gouvernement a dû puiser dans ses réserves de change (62 milliards sur près de 100 milliards de dollars, soit 88 milliards d’euros). Les dollars manquent, les importations sont gelées (certaines sont interdites), le port de Lagos est pratiquement à l’arrêt. Abuja doit, en outre, composer avec une série de pannes sur les oléoducs, et surtout l’entrée en action en début d’année d’un groupe armé, les militants du Niger Delta Avengers, actifs dans la zone de production pétrolière.

Lire l’analyse de Jean-Philippe Rémy  : Au Nigeria, le président Buhari impuissant face à la crise

Le précédent de 2012

Bien qu’il soit le premier producteur du continent, le Nigeria est contraint d’importer des produits pétroliers, ses quatre raffineries ne suffisant pas à sa consommation. Le gouvernement avait l’habitude de maintenir un prix à la pompe assez bas et de payer la différence aux importateurs, mais ces derniers prenaient régulièrement le pays en otage en refusant de distribuer le pétrole tant qu’ils n’avaient pas touché les subventions de l’Etat. En janvier 2012, le gouvernement avait déjà tenté de mettre fin à ces subventions, ce qui avait fait doubler les prix. Les violentes manifestations de dizaines de milliers de personnes, qui ont fait une dizaine de morts, l’avaient ensuite obligé à renoncer à cette mesure.

D’après le Nigeria Labour Congress (NLC), à l’origine de l’appel à la mobilisation avec le Trade Union Congress (TUC), la grève devrait affecter les banques, les aéroports, les ports, les marchés et les administrations. Elle est également destinée à obliger le gouvernement à revenir sur la récente hausse des tarifs de l’électricité, dans un pays dont la production est à la peine, avec seulement 4 000 mégawatts pour 170 millions d’habitants.