Quarante personnalités, dont des responsables politiques et syndicaux ou des intellectuels, lancent, dans le quotidien Libération du 19 mai, un appel pour demander au gouvernement de légiférer afin de limiter les salaires des patrons. Les signataires de ce texte demandent à ce qu’un dirigeant « ne puisse pas être rémunéré plus de 100 smic [salaire minimum interprofessionnel de croissance], soit 1,75 million d’euros par an ».

Cette initiative intervient après les polémiques sur les salaires de patrons comme ceux de Renault et PSA Carlos Ghosn et Carlos Tavares, et la menace brandie mardi par le président François Hollande de passer par la loi. L’appel, lancé par Libération, est assorti d’une pétition en ligne.

« Un motif de fierté nationale »

Les signataires y estiment que l’on vit « une période inédite dans l’histoire du capitalisme contemporain » où l’écart entre les rémunérations a « explosé ». « Le gouvernement a fait en 2013 le pari de l’autorégulation et celui-ci a échoué », insiste le texte. « En 2015, la rémunération totale des patrons du CAC 40 a augmenté entre 5 % et 11 % selon les évaluations. »

L’appel précise par ailleurs que le principal argument justifiant ces salaires parfois mirobolants « celui d’un marché mondial des très hauts dirigeants qui nécessiterait un alignement des salaires par le haut » – n’est corroboré par aucune étude économique sérieuse. « En se comportant de la sorte, notre élite économique entretient un sentiment de chacun pour soi délétère. »

Anticipant la possibilité d’une censure du Conseil constitutionnel en cas de loi, les signataires avancent que « le gouvernement peut trouver les moyens » d’éviter cet écueil et mettent l’accent sur le fait que la France sera pionnière en la matière : « un motif de fierté nationale. » Quant aux craintes éventuelles des investisseurs étrangers, ils rétorquent qu’ils « profiteront d’un vivier de dirigeants bon marché ».

Quelques-uns des signataires de l’« appel des 40 au CAC 40 »

Le premier secrétaire du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis, le président de l’Assemblée nationale Claude Bartolone (PS), la maire de Paris Anne Hidalgo, les députés socialistes Benoît Hamon et Karine Berger ou encore l’ex-ministre Arnaud Montebourg (PS) et la députée écologiste Cécile Duflot figurent parmi les signataires de ce texte.

Les responsables syndicaux Laurent Berger (CFDT), Philippe Martinez (CGT), Carole Couvert (CFE-CGC), Luc Bérille (Unsa), Eric Beynel et Cécile Gondard Lalanne (Solidaires) ont également paraphé l’appel, comme l’économiste Thomas Piketty, le militant écologiste Nicolas Hulot, ou le président de l’Unef William Martinet.

Ont aussi apporté leur soutien les sociologues Dominique Méda et Michel Wieviorka, l’historien Pierre Rosanvallon, la pneumologue Irène Frachon, ou encore l’écrivain et réalisateur Raphaël Glucksman.