Une candidate lors de l’épreuve de philosophie du bac, au lycée Fustel-de-Coulanges de Strasbourg, le 15 juin. | FREDERICK FLORIN / AFP

Mercredi matin à 8 heures, des centaines de milliers de lycéens ont découvert en même temps les sujets de l’épreuve de philosophie qui a, comme chaque année, ouvert le baccalauréat 2016. Au programme, une réflexion sur le désir, le travail ou encore l’histoire, et des textes à commenter de Machiavel, Descartes ou Hannah Arendt. A cette occasion Le Monde Campus a convié Françoise Gautier, professeure de philosophie et collaboratrice du site de soutien scolaire en ligne Les Bons Profs, à répondre à toutes les questions que vous vous posez sur cette épreuve qui stresse tant les lycéens. Verbatim de cette discussion en direct.

« Pensez-vous qu’une épreuve écrite est-elle idéale pour cette matière ?" - Aloun

Françoise Gautier : oui, je pense qu’il faut le temps de la réflexion pour cette matière. Une épreuve orale serait trop spontanée et ruinerait l’élaboration conceptuelle de la pensée. Il faut absolument préserver l’épreuve écrite, surtout pour des élèves de terminale qui n’ont pas encore d’automatisme de pensée philosophique.

« A quel point le choix des sujets de philosophie peut réellement être influencé par l’actualité ? Le sujet sur le travail tombe à pic, est-ce une simple coïncidence ? » - Thibault

Françoise Gautier : l’intérêt de la philosophie est justement de montrer qu’une pensée de plus de deux millénaires reste ancrée dans nos questionnements au quotidien. C’est ce qui explique ce lien apparent avec l’actualité. Face à cela le candidat peut être tenté de donner son opinion, mais il ne le faut pas. Il doit examiner la question en tant que problème, et voir comment on peut y répondre avec les différentes pensées vues pendant l’année. L’actualité peut d’ailleurs être utilisée comme exemple, mais un exemple ne fait pas un argument. Il faut toujours s’appuyer sur la pensée d’auteurs.

« Comment pensez-vous que les jeunes perçoivent la philosophie de nos jours ? » - Aloun

Françoise Gautier : de ce que m’en disent mes élèves, ils sont globalement contents de cette expérience. Cela les intéresse et la philosophie tranche avec les valeurs consuméristes et matérialistes de la société. C’est un espace de réflexion pure, une bouffée d’oxygène.

« Beaucoup de sujets correspondent aux prédictions d’une bonne partie des professeurs de philosophie. Pensez-vous que ces thèmes devraient être plus aléatoires pour rendre les révisions globales pour tout le monde et non directement ciblées par beaucoup d’élèves ? » - Dim

Françoise Gautier : pour ma part je n’ai jamais fait de prédictions : le programme est vaste, et les sujets sont souvent transversaux. Nous ne sommes pas « Mme Soleil ». Un sujet tombé une année peut être convoqué l’année suivante sous une autre forme.

Il me semble que, cette année, les sujets ont été plutôt bien choisis. Ils sont intelligents, pas trop faciles ni trop difficiles. Alors que certaines années, la pertinence des sujets m’avait semblé très discutable. 

« Comment fonctionne le barème en philo ? » - Shawnfrost508

Françoise Gautier : il n’y a pas de barème en philosophie, mais une évaluation globale d’une copie. On ne peut pas « barémer » une dissertation ou un commentaire de texte. La copie doit être réfléchie, problématisée, argumentée et référencée. Ce qu’on note finalement, c’est un niveau de philosophie. De nombreux critères explicites et implicites sont pris en compte. C’est par exemple la capacité à conduire une introduction cohérente qui définisse bien les termes, la problématique et annonce le développement.

Ensuite, il faut que chaque partie suive bien le développement annoncé, qu’il y ait une logique, et que la pensée progresse. C’est un niveau de réflexion qu’on évalue. Ensuite, des commissions d’harmonisation nous permettent de nous mettre d’accord. On est en général tous d’accord pour reconnaître la très bonne ou la très mauvaise copie. Ce qui peut diverger, c’est la note que l’on attribue.