Le ministère des finances à Bercy. | LOIC VENANCE / AFP

Le ministère des finances a annoncé, mercredi 8 juin, avoir déposé une plainte pour violation du secret fiscal après la publication par Le Canard enchaîné d’une liste nominative de cinquante contribuables ayant bénéficié d’une importante réduction de leur impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

Cette liste, dressée de façon confidentielle par la Direction générale des finances publiques (DGFIP) et reproduite par le journal satirique dans son édition de mercredi, recense le montant de l’ISF acquitté en 2015 par 50 contribuables parmi les plus fortunés, après l’application d’un mécanisme de plafonnement.

Seule une partie des noms sont masqués par l’hebdomadaire, qui révèle ceux de plusieurs personnalités publiques ou médiatiques, comme Liliane Bettencourt, Bernard Arnault ou Hélène Darty, pour dénoncer « le résultat burlesque d’une législation bricolée et rafistolée depuis des années ».

« Délit sanctionné par le code pénal »

La publication de ces informations, « couvertes par le secret fiscal », est « un fait d’une très grande gravité », ont réagi Michel Sapin, ministre des finances, et Christian Eckert, secrétaire d’Etat au budget, faisant part de leur « indignation » après ces révélations. « La divulgation d’informations fiscales nominatives par des personnes qui en sont dépositaires à titre professionnel constitue un délit sanctionné par le code pénal », soulignent MM. Sapin et Eckert, qui indiquent que la DGFIP a porté plainte contre X auprès du procureur de Paris.

Le ministre et son secrétaire d’Etat précisent par ailleurs avoir « demandé à l’Inspection générale des finances de diligenter une enquête, dans les meilleurs délais », pour déterminer la façon dont cette liste s’est retrouvée entre les mains de journalistes et a été publiée.

Plafonnement et « ingéniosité » financière

L’impôt de solidarité sur la fortune, instauré en 1989, est payé par les ménages dont le patrimoine dépasse 1,3 million d’euros. Ces derniers peuvent toutefois bénéficier d’un plafonnement, l’impôt sur les revenus ajouté à l’ISF ne devant pas dépasser 75 % des revenus perçus – un niveau jugé « confiscatoire » par le Conseil constitutionnel.

Grâce à ce mécanisme, 11 des 50 contribuables fortunés recensés par la DGFIP n’ont pas payé d’ISF en 2015, les autres ayant vu leur note sensiblement allégée. Au total, 21,2 millions d’euros d’ISF ont été payés par ces 50 contribuables, alors que le montant initial était de 219,6 millions, précise Le Canard enchaîné.

Une situation due, selon l’hebdomadaire, à l’« ingéniosité » des conseillers financiers embauchés par ces personnalités, qui minorent le revenu imposable de leurs clients, en laissant par exemple « dormir dans des sociétés financières les dividendes d’actions et les revenus d’assurances-vie » de leurs clients.