Donges, blocage du dépôt pétrolier SFDM par des salariés grévistes le 24 mai 2016. | Franck Tomps pour Le Monde

Blocages de raffineries, perspective de grèves illimitées dans les transports (SNCF, RATP), menaces de coupure d’électricité… Les mouvements sociaux ne cessent de se durcir sur le territoire, entraînant chaque jour plus de perturbations et faisant apparaître plus nettement des lignes de rupture entre un gouvernement qui se veut inflexible, et un front syndical dont la CGT est aujourd’hui le fer de lance. Le premier ministre, Manuel Valls, a encore promis mardi à la CGT, qui bloque raffineries et dépôts de carburant pour obtenir le retrait du projet de loi travail, une « réponse extrêmement ferme ».

De son côté, Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, estime que le premier ministre « joue un jeu dangereux » en essayant d’« opposer la CGT aux citoyens ». M. Martinez veut croire, comme il le déclarait dans le journal de la CGT du mois de mai, que « le rapport de force peut avoir raison de tout, même d’une loi votée ». A des militants qui bloquaient le dépôt pétrolier de Total à Haulchin (Nord), il a rappelé : « Quand on se bat, on peut gagner, mais si on ne se bat pas, on est sûr de perdre. »

« Un jeu de posture »

Une position dure qui n’est pas du goût de Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, qui exclut tout recul sur le projet de loi travail. Dans un entretien au Parisien, mercredi 25 mai, il estime que l’aggravation de la contestation s’explique par « un jeu de posture de plus en plus marqué entre la CGT et le gouvernement ». « Je n’ai pas peur des vociférations de l’extrême gauche, quels que soient ses porte-voix, avertit-il encore. Je fais le pari de l’intelligence collective, qui consiste à construire des compromis équilibrés. »

L’exécutif observe avec la plus grande attention l’évolution des positions et des autres, tout en s’efforçant de montrer qu’il essaie de minimiser les perturbations pour la population. « Je ne m’en réjouis pas pour les Français qui doivent subir des problèmes d’essence, mais finalement, ce sont deux mondes qui sont en train de se confronter. En somme, c’est la confrontation entre réformisme, conservatisme et régression. Il faut tenir, c’est important pour le pays », a estimé, depuis Ramallah (Cisjordanie), le chef du gouvernement, qui, davantage qu’une rupture avec la gauche, voit dans cette confrontation musclée un avantage : « A la fin des fins, les Français diront si on a tenu ou pas tenu, si on a été cohérent ou pas cohérent, si on a assumé ou pas assumé. Je ne dis pas que c’est facile, ce n’est pas sûr que cela marche. Mais je pense que la clarification est ce qui peut nous permettre de rassembler en 2017. »

Le président de la République ne dit pas autre chose, quand il affirme devant ses visiteurs : « Quel est l’avenir du syndicalisme ? Un syndicalisme de contestation, avec le risque de ne pas trouver de débouché ? Ou un syndicalisme de compromis et de responsabilité ? Ce qui est en jeu, c’est une clarification entre les deux formes de syndicalisme avec, bien sûr, la question de celui qui va l’emporter. »