La Seine en crue, le 3 juin 2016 à Paris. | Olivier Laban-Mattei/MYOP pour Le Monde

La RATP a déclenché, vendredi 3 juin dans l’après-midi, son plan de prévention face à la crue de la Seine à Paris, en faisant acheminer du matériel pour murer des entrées de métro au cas où le fleuve atteindrait les 6,60 m. Entretien avec Eric Dyèvre, directeur de la gestion des infrastructures à la RATP.

Comment la RATP va-t-elle faire face à la crue ?

Nous avons armé notre cellule de crise. Compte tenu des informations fournies par le service de prévision des crues, nous avons décidé d’engager notre logistique, c’est-à-dire de faire transporter en banlieue proche, dans sept sites de stockage, du matériel habituellement stocké dans un rayon de 100 km autour de Paris. Nous avons activé nos fournisseurs et nos transporteurs : la nuit prochaine et tôt demain matin, trente gros camions doivent apporter 50 000 parpaings, 250 bétonneuses, des instruments de levage, du ciment… Tout cela nous permettra de dresser des remparts contre l’eau autour des stations de métro les plus exposées.

A ce stade, vendredi 3 juin, en fin d’après-midi, nous ne pouvons pas encore savoir si cela sera utile ou non. Notre plan d’action élaboré en 2002 prévoit le déclenchement de ce processus à partir du moment où la cote de la Seine atteint 6,60 mètres, ce qui va probablement se produire pendant la nuit. Nous ne savons s’il y aura une aggravation de la crue ensuite, cela dépend entre autres des pluies.

Pourquoi employer des parpaings et pas les batardeaux en aluminium ou les barrières en inox dont dispose la RATP ?

Un millier de nos agents sont formés pour réceptionner le matériel et ériger des murets autour des stations qui pourraient être inondées : il y en a 70. Nous n’aurons pas recours aux batardeaux parce que les stations qui sont les plus exposées ne sont pas équipées pour. Au total, la RATP a identifié 470 points d’entrée possible si l’eau montait encore davantage.

Quelles sont les stations de métro vulnérables ?

Ce sont évidemment celles qui se situent le plus près de la Seine : Dugommier, Bercy, Quai-de-la-Gare, Chevaleret, Nationale sur la ligne 6 ; vers Eglise-d’Auteuil sur la 10 et Mairie-de-Clichy sur la 13. La ligne 14, très profonde, devra entièrement fermer si l’on dépasse les 6,60 mètres. Certaines gares RER sont aussi concernées : Charles-de-Gaulle-Etoile, Auber, Châtelet-les-Halles et Gare-de-Lyon. Je vous rappelle que le tronçon du RER C qui traverse le centre de Paris est déjà fermé, ainsi que les stations Saint-Michel et Cluny-La-Sorbonne qui présentaient des risques à cause des ruissellements importants. Des correspondances ne sont plus assurées, à Invalides notamment.

Lors de grandes crues, il n’y a pas que les débordements du fleuve, il se produit aussi des phénomènes de résurgence. Souvenez-vous de la gare Saint-Lazare encerclée par l’eau en 1910 : elle se trouve dans une cuvette.

Est-ce que la fermeture d’une station entraîne celle de toute la ligne ?

Pas forcément, les trains peuvent ne circuler que sur certains segments. Cependant nous pouvons arrêter la circulation pour des raisons de sécurité, si l’évacuation de voyageurs devient impossible par exemple. Nous estimons que 140 km de tunnels peuvent potentiellement être sous l’eau.