Depuis quelques mois, Donald Trump poursuit de sa vindicte le juge Gonzalo Curiel qui instruit depuis San Diego le procès lié à des allégations de fraude à l’encontre de la Trump University. | Steve Helber / AP

Donald Trump, le candidat républicain à la Maison Blanche régulièrement accusé de racisme et de xénophobie, s’est attiré depuis vendredi 3 juin une nouvelle volée de critiques… de la part du Parti républicain (GOP).

Ses dernières saillies obligent le GOP à prendre ses distances avec les propos qu’il a de nouveau tenus visant le juge de district Gonzalo Curiel, qui instruit à San Diego le procès lié à des allégations de fraude à l’encontre de la Trump University.

Depuis le début de mars il poursuit le magistrat de son courroux. Vendredi, dans une interview au Wall Street Journal, le milliardaire s’est livré à une nouvelle philippique contre le magistrat.

M. Trump a suggéré que les origines mexicaines du juge Curiel (fils d’immigrants mexicains, il est né en 1953 à East Chicago, dans l’Indiana) influençaient son opinion dans cette affaire, le candidat républicain ayant fait campagne au début des primaires de son parti pour la construction d’un mur à la frontière mexicaine pour arrêter l’immigration illégale. Sur CNN, Donald Trump a encore détaillé ses griefs :

« Il est fier de son héritage. C’est un Mexicain. Nous sommes en train de construire un mur entre ici et le Mexique. La conséquence, c’est qu’il rend des jugements très injustes, des jugements auxquels on ne peut même pas croire. Cette affaire aurait dû se terminer il y a des années. »

Le magistrat a été nommé à San Diego en 2006 par le gouverneur républicain Arnold Schwarzenegger. En 2011, le président Obama l’a promu juge fédéral des Etats-Unis, promotion confirmée par le Sénat. Il a poursuivi le cartel de Tijuna (aussi connu sous le nom d’organisation Arellano Félix), dont un des tueurs avait pour mission de l’assassiner.

En Californie, où le nombre d’habitants d’origine hispanique dépasse celui des White Anglo-Saxon Protestants (WASP), et même s’ils sont peu mobilisés par les élections, comme l’indique le Public Policy Institute of California, les déclarations anti-Mexicains du candidat ont suscité d’importantes manifestations, parfois émaillées de violences.

Inquiétudes du GOP

Les cadres du GOP qui ont encore à l’esprit le rapport d’« autopsie » du parti écrit après la défaite de Mitt Romney en novembre 2012 – qui prévoyait une refondation du GOP en s’adressant aux femmes, aux jeunes et aux « non-Blancs » – s’inquiètent des retombées des propos du candidat auprès de l’électorat latino.

Lors de l’émission « Meet the Press », sur NBC, le chef de la majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, a souligné qu’il ne pouvait « que désapprouver » les déclarations de Donald Trump.

« Je suis inquiet pour le vote hispanique, l’Amérique est en train de changer. » « Je crois que c’est une grande erreur pour notre parti de faire une croix sur les Latino-Américains. Cela me préoccupe et j’espère qu’il (Trump) changera de cap là-dessus. »

Le responsable républicain a rappelé que les Etats-Unis étaient un pays d’immigrants et que sa propre épouse, l’ancienne secrétaire au travail Elaine Chao, ne parlait pas anglais à son arrivée dans le pays à l’âge de huit ans.

L’ancien président de la Chambre des représentants Newt Gingrich, cité comme possible colistier de Donald Trump, a qualifié les propos du milliardaire d’« inexcusables ». « C’est l’une des pires erreurs commises par Trump », a-t-il dit sur Fox News.

Le sénateur Bob Corker, qui préside la commission sénatoriale des affaires étrangères, a dit « ne pas excuser les commentaires » de Donald Trump, dans une interview à ABC.

Samedi, le président de la Chambre des représentants, Paul Ryan, qui s’est rallié sur le tard au magnat de l’immobilier, avait regretté les déclarations de M. Trump.

Seul l’ancien ministre de la justice Alberto Gonzales, qui est d’origine mexicaine, a estimé dans une tribune parue dans le Washington Post que Donald Trump était en droit de questionner l’impartialité du juge Curiel. Mais il s’est ravisé et a ajouté, dimanche, dans une interview sur Fox News :

« J’aurais certainement adopté une autre approche. A chaque fois que vous dites quelque chose à propos de la nationalité d’un juge, je pense que cela abaisse sa charge et nuit à la justice dans son ensemble. »

Donald Trump a essuyé de nouvelles critiques après avoir évoqué un Afro-Américain présent à un meeting à Redding, en Californie. Il a lancé à l’assistance : « Regardez mon Afro-américain par ici, regardez-le ». | Rich Pedroncelli / AP

Dans la même veine, il a poursuivi son dérapage en affirmant, lors de l’émission « Face The Nation », de CBS, qu’un juge musulman pourrait le traiter de manière inique parce qu’il a proposé d’interdire temporairement aux musulmans d’entrer aux Etats-Unis.

Vendredi, le candidat a aussi essuyé de nouvelles critiques lors d’un meeting à Redding, en Californie. Il a lancé à l’assistance : « Regardez mon Afro-Américain par ici, regardez-le », a-t-il dit en apercevant un Afro-Américain présent dans la foule. « Etes-vous le plus grand ? », lui a-t-il demandé.

Gregory Cheadle, l’homme en question, est candidat pour les républicains dans le premier district congressionnel de Californie. Il explique à NPR qu’il n’est pas un partisan de M.Trump, « je suis venu l’écouter parce que je suis quelqu’un d’ouvert ».

La porte-parole de campagne de Donald Trump, Hope Hicks, a expliqué que le candidat « s’adressait simplement à un supporteur dans la foule ». « Il n’y avait évidemment pas de malveillance », a-t-elle affirmé. M. Trump était « reconnaissant pour le soutien que lui apportait cette personne », a-t-elle déclaré sur la chaîne d’information en continu CNN.