Avec deux habitués, l’Angleterre et la Russie, et deux petits nouveaux, le Pays de Galles et la Slovaquie, le groupe B de l’Euro 2016 est aussi ouvert qu’indécis.

Grâce à Harry Kane, Wayne Rooney sait où il doit mener l’Angleterre. | GLYN KIRK / AFP

  • Le favori : l’Angleterre

Pour la première fois depuis le début du 21e siècle, le meilleur buteur du championnat d’Angleterre est… anglais. Harry Kane est devenu le premier sujet de sa Majesté depuis Kevin Phillips (Sunderland, 30 buts en 1999/2000) à décrocher ce titre honorifique mais qui en dit long sur un certain renouveau du football anglais de sélection. Car le deuxième meilleur buteur est aussi anglais, un certain Jamie Vardy, et que la révélation de la saison se nomme Dele Alli, meneur de jeu de 20 ans des Spurs de Tottenham. Autant dire que le sélectionneur Roy Hodgson dispose soudainement d’éléments capables de faire de l’Angleterre autre chose que le pays qui a inventé le football moderne.

Championne du monde en 1966, et championne d’Europe des éliminations aux tirs au but depuis (trois fois, un record, en 1996, 2004 et 2012), la sélection aux Trois Lions a fait un sans faute lors des éliminatoires, 10 victoires en autant de matchs. Comme l’Espagne avant l’Euro 2012, qu’elle a remporté. Comme la France avant celui de 1992, qu’elle a quitté après un petit premier tour.

Le joueur à suivre : Bamidele Jermaine Alli. 20 ans, 33 matchs de Premier League cette saison, 10 buts, 9 passes décisives, et un titre de Meilleur Espoir du championnat le plus relevé d’Europe. Dele Alli ne brûle pas les étapes, il les carbonise. A tel point que le gamin ressemble déjà au patron de son équipe nationale, alors même qu’il ne compte que 8 sélections pour 1 but (inscrit contre la France en novembre 2015). Milieu de terrain offensif, vif et technique, doté d’un sens du but évident, Alli vole comme le papillon et pique comme l’abeille.

Gareth Bale s’apprête à faire une tête, le 5 juin à Stockholm. | Anders Wiklund / AP

  • Les outsiders : le Pays de Galles et la Russie

« Dyfalbarhad »… Voilà comment on dit persévérance en gallois. Il aura fallu aux footballeurs du Pays de Galles 14 campagnes de qualifications pour décrocher une première participation à un tournoi final de l’Euro. Pour leur grande première, les Dragons arrivent plutôt bien lancés, dans la foulée de leur superstar Gareth Bale. Le vainqueur de la Ligue des champions avec le Real Madrid a marqué 7 des 11 buts des siens lors des qualifications. En y ajoutant la paire Aaron Ramsey (Arsenal) et de Joe Allen (Liverpool) au milieu, ce Pays de Galles a les moyens de découvrir autre chose que le premier tour.

Le joueur à suivre : Gareth Bale. Encore faut-il pouvoir le suivre, puisque c’est justement tout le problème avec la fusée galloise, dont la vélocité est particulièrement adaptée à l’art de la contre-attaque. L’influence du Madrilène sur son équipe est à double tranchant, en témoigne la sévère défaite contre la Suède (3-0), les Gallois n’ayant commencé à exister que lors de l’entrée de leur étoile à l’heure de jeu…

Leonid Sloutski reste tranquille, le 6 juin à Croissy-sur-Seine. | MARTIN BUREAU / AFP

« неудача » (prononcer « neudacha »). Voilà comment on dit malchance en russe. En quelques jours, la Sbornaïa vient de perdre deux de ses meilleurs techniciens du milieu, Dzagoev et Denisov, blessés. Revigorée par l’arrivée de l’entraîneur moscovite Leonid Sloutski, qui a remplacé un Fabio Cappello en bout de course, la Russie a déjà montré, contre la France notamment en match amical (défaite 4-2), la friabilité de sa défense, composée des jumeaux Berezoutsky (33 ans), en alternance avec l’autre vétéran, Sergueï Ignatevitch (36 ans). Le déménageur Artem Dzyuba et son compère Aleksandr Kokorine vont devoir mettre beaucoup de buts…

Le joueur à suivre : Aleksandr Golovin. Dans une sélection que l’on dira expérimentée, le milieu du CSKA Moscou est le seul de son équipe à ne pas être né en Union soviétique, c’est-à-dire après le 26 décembre 1991. A 20 ans, Golovin ne compte que trois sélections en équipe nationale, mais il a été un pilier de l’équipe de Russie championne d’Europe des - 17 ans en 2013, puis de celle des - 19 vice championne d’Europe en 2015. Les blessures de Dzagoev et Denisov pourraient accélérer sa promotion chez les grands.

  • La grosse côte : la Slovaquie

De l’art de se faire remarquer… En battant l’Espagne 2-1 en octobre 2014 lors du début de leur campagne éliminatoire, les Slovaques sont devenus les premiers bourreaux de la Roja lors d’un match de qualification depuis 2006. En prenant au final la deuxième place de leur groupe, les hommes de Jan Kozak ont assuré leur ticket pour le premier Euro de leur histoire, c’est-à-dire depuis l’indépendance du pays en 1993. Ils arriveront avec une petite idée en tête, rééditer l’exploit de leur première participation à un Mondial, lorsqu’il avait atteint les huitièmes de finale en 2010 après avoir battu l’Italie.

Le joueur à suivre : Marek Hamsik. Au pays de Michal Martikan (canoë) et de Peter Sagan (cyclisme), le seul footballeur à se frayer un chemin vers la célébrité est évidemment Marek Hamsik, jamais sans sa crête. L’attaquant du Napoli est l’homme à tout faire de cette équipe qui pourra également compter sur les trublions Wladimir Weiss et Miroslav Stoch, ainsi que sur le légèrement moins « trublionnesque » défenseur Martin Skrtel.

Marek Hamsik a du style à revendre. | JOE KLAMAR / AFP

  • Le scénario probable

L’Angleterre remporte la campagne de Russie grâce au réveil de Wayne Rooney, puis venge le XV de la Rose en écrabouillant le Pays de Galles, dont le XV du Poireau avait éliminé les Anglais de leur Mondial de rugby l’an dernier. Sur Internet, le toujours dégingandé Peter Crouch, déjà célèbre pour sa « Robot dance », devient une star du web en imitant la « Biggarena » de l’ouvreur gallois Dan Biggar. Première, l’Angleterre est accompagnée en huitièmes par le Pays de Galles, porté par Bale et Ramsey, pas encore blessé. La Slovaquie arrache la troisième place du groupe grâce à un nul contre les coiffeurs british, perturbés par les cheveux d’Hamsik.

  • Le scénario improbable

Privés de Kane et Vardy, qui ont manqué le premier match après avoir passé la nuit à l’hôtel d’Angleterre de Chantilly, pourtant abandonné, les Anglais chutent contre les Russes, accrochent le nul contre les Gallois, mais s’écroulent finalement face aux Slovaques. Ces derniers, transfigurés par leur cure thermale à Vichy, leur camp de base, surprennent les autres favoris pour se qualifier en première position, grâce notamment à la nouvelle technique de défense de leur capitaine Martin Skretl, qui fait craquer les attaquants adverses en hurlant son nom dans leurs oreilles. La Russie prend la deuxième place, les Gallois la troisième, malgré la surdité soudaine de Gareth Bale. SKRETL !

Martin Skrtel met un polo. | JOE KLAMAR / AFP