Eric Schmidt, le PDG d’Alphabet (ex-Google), lors d’une conférence le 2 mai. | LUCY NICHOLSON / REUTERS

C’était un procès à neuf milliards de dollars (huit milliards d’euros). La somme que réclamait Oracle, le géant des logiciels, à Google, qu’elle accusait d’avoir utilisé, sans payer de licence, des fonctionnalités de son programme Java pour concevoir Android. Google arguait de son côté que son utilisation de Java tombait sous la notion américaine de « fair use » – le droit d’utiliser de manière modérée une œuvre de l’esprit comme source d’inspiration ou pour un remix. Dotée d’une abondante et complexe jurisprudence, l’étendue de la notion de « fair use » est régulièrement débattue devant les tribunaux outre-Atlantique.

Au cœur des six ans de procédures se trouvait la question du statut des API, les interfaces de programmation qui permettent à un tiers d’interagir avec un logiciel. Ces API sont omniprésentes dans le fonctionnement de la plupart des services modernes : elles permettent par exemple de se connecter aux services de Facebook ou de Google pour récupérer des informations sur un utilisateur, ajouter un évènement à son agenda...
Android, comme de nombreux autres logiciels, utilise l’API de Java.

Or, un premier jugement datant de 2014 avait déterminé que ces API sont protégées par le droit d’auteur. Google a affirmé à l’audience que l’utilisation de l’API de Java n’avait pas été centrale dans le développement d’Android, et qu’Oracle n’avait en aucun cas le droit de prétendre à une partie des 21 milliards de dollars (18 milliards d’euros) de bénéfices générés par le logiciel.

Des courriels incriminants pour Google

A l’audience, la défense de Google a cependant été mise à mal par plusieurs témoignages, et notamment par la présentation de courriels internes à Google montrant que des responsables du projet Android estimaient qu’ils auraient dû négocier une licence. Le PDG d’Alphabet (ex-Google), Eric Schmidt, a témoigné lui-même – M. Schmidt avait par le passé travaillé pour Sun Microsystems, le concepteur original de Java avant son rachat par Oracle. Il avait également pris part à des négociations qui n’avaient pas abouti entre Google et Oracle sur l’achat d’une licence.

Oracle a d’ores et déjà annoncé son attention de faire appel. « Nous sommes persuadés que Google a développé Android en copiant, de manière illégale, des technologies-clés de Java pour pouvoir sortir leur logiciel rapidement », a dit l’avocat en chef d’Oracle, Dorian Daley, dans un communiqué de l’entreprisse. « Oracle a lancé cette procédure pour mettre un terme au comportement illégal de Google, et nous pensons qu’il existe de nombreuses bases légales pour faire appel de cette décision ».