A Onzain le 2 juin. | GUILLAUME SOUVANT / AFP

L’épisode pluvieux et les crues ne sont toujours pas terminés, vendredi 3 juin, mais les assureurs recueillent déjà des dizaines de milliers de déclarations de sinistres et commencent à estimer le prix des réparations. Chaque inondation est unique, mais, pour donner un ordre de grandeur, celles d’octobre 2015 sur la côte d’Azur avaient coûté 605 millions d’euros en dommages, selon l’Association française de l’assurance.

Le coût des inondations actuelles « devrait en être assez proche », estime Joaquim Pinheiro, directeur général sinistres chez Covéa (GMF, MAAF, MMA). Depuis le vendredi 27 mai, le groupe a reçu 16 000 déclarations : 7 000 dues aux inondations, 7 000 liées à la grêle du weekend dernier, et 2 000 pour dommages électriques. Chez Allianz, le nombre de coups de fil a bondi de 60 % depuis le début de la semaine.

Lors de ces événements, les assureurs déclenchent leur plan de crise : renforcement des centres d’appel et numéro vert dédié, envoi de camions avec agents et experts dans les zones touchées afin d’accélérer les premières indemnisations, conseils prodigués sur les réseaux sociaux.

Dommages significatifs

Les inondations donnent souvent lieu à des dommages significatifs. « Si l’eau stagne plusieurs heures ou plusieurs jours, cela peut rendre un véhicule totalement irréparable », avertit Jean-Francois Sutter, directeur de l’indemnisation chez Allianz France. Dans les habitations, les dommages peuvent avoir atteint la structure du bâtiment, les murs porteurs, les installations électriques. « Les objets peuvent être souillés du fait de l’eau, il faut nettoyer les murs et les sols. Les travaux sont plus lourds si l’eau a stagné longtemps, avec de la maçonnerie, de la plâtrerie... Il ne suffit pas d’une couche de peinture. Ce sont des dossiers au coût unitaire très élevé. »

Les personnes touchées doivent informer leur assureur le plus tôt possible, ne rien jeter et prendre des photos des objets souillés (ou rassembler des factures par exemple) pour témoigner de leur existence et de leur valeur avant le dommage. Le délai de déclaration est normalement de dix jours, mais la plupart des assureurs l’ont décalé jusqu’au 30 juin. Ils ont également prolongé les périodes de relogement d’urgence.

Etat de catastrophe naturelle

Cependant, tout le monde ne sera pas remboursé. Pour les véhicules, il faut une assurance tous risques et non au tiers. Pour les maisons et bâtiments, certains contrats ne prévoient de remboursement que si l’état de catastrophe naturelle est déclaré sur la commune. Ce régime prévoit alors une franchise réglementaire de 380 euros pour les particuliers et de 1 140 euros pour les entreprises. Les maires doivent faire une demande formelle auprès de leur préfet, puis lui-même auprès du ministère de l’intérieur. En fonction des éléments recueillis, ce dernier envisage alors de publier un arrêté. « Toutes les procédures de catastrophe naturelle doivent être engagées pour que nous puissions les mettre en œuvre dès le Conseil des ministres de mercredi prochain », a déclaré Manuel Valls, jeudi 2 juin, à Nemours. Certains assureurs comme la MAIF et la Macif indemnisent même sans l’arrêt de catastrophe naturelle.

Il faudra néanmoins s’armer de patience. Une fois l’eau partie, les murs doivent encore sécher, ce qui peut amplifier les dégâts. Après la tempête Xynthia de 2010, « il avait fallu attendre plusieurs mois, rappelle Floreal Sanchez, chargé de mission Incendie, accidents et risques divers à la MACIF. On ne peut pas réintégrer le bâtiment s’il n’est pas sec. Il faut du soleil, et pas de nouvelles intempéries qui augmenteraient l’humidité. »

En outre, dans les cas de gros sinistres, les assureurs doivent envoyer sur place des experts libéraux. « Notre but est d’accélérer l’indemnisation des assurés, mais parfois ils ont des difficultés à trouver des entreprises pour effectuer les remises en état », précise Isabelle Braud, responsable de la cellule de crise de la MAIF.

Fonds de soutien pour les collectivités territoriales

Restent enfin les installations publiques, non couvertes par les compagnies d’assurance privées, car l’Etat est son propre assureur. Or, « les catastrophes naturelles sont très coûteuses pour la collectivité, avec la mobilisation des services de secours, les voiries et bâtiments publics endommagés », explique M. Sutter d’Allianz.

Le premier ministre Manuel Valls a donc annoncé, le 2 juin à Nemours, la mise en place dun fonds de soutien pour les collectivités territoriales touchées. De son côté, la présidente du Conseil régional d’Ile-de-France, Valérie Pécresse (Les Républicains), va proposer la mise en place d’un fonds d’urgence d’un million d’euros pour les communes d’Ile-de-France sinistrées, a annoncé mercredi 1er juin la Région. Le conseil départemental de Seine-et-Marne, particulièrement touchée, envisage lui de débloquer 600 000 euros d’aides.

Le réchauffement climatique accroît la fréquence des catastrophes naturelles. Allianz active désormais son plan d’urgence cinq à dix fois par an, contre deux à cinq fois par an il y a une dizaine d’années. Chez AXA, le poids des catastrophes naturelles dans la prime habitation des maisons est passé de moins de 20 % en 2000 à 29 % en 2015. « L’augmentation tendancielle des catastrophes par le changement climatique se traduira inéluctablement par une hausse des primes des maisons », explique-t-on chez l’assureur.