« La Révolution Holocracy. Le système de management des entreprises performantes », de Brian J. Robertson (éd. Alisio, 288 pages, 24 euros.) | DR

La leçon la plus importante sur le plan professionnel, Brian J. Robertson l’a apprise le jour où il a failli s’écraser en avion. Ce PDG d’une société d’éditions de logiciels passe alors son brevet de pilote et parcourt, pour la première fois, une longue distance en solitaire. Un voyant qu’il ne connaît pas s’allume, mais plutôt que d’essayer d’en comprendre la signification, le jeune pilote préfère vérifier le bon fonctionnement de tous les autres instruments. Une décision erronée, qui a failli lui être fatale : il se retrouve perdu, en plein orage, sans lumière ni radio.

Dans les mois qui ont suivi, il repense aux décisions prises ce jour-là, et parvient à une conclusion intéressante. « Je continuais de répéter la même erreur, pas dans mon avion, mais avec l’équipe que j’étais censé diriger au bureau. En fait, l’erreur qui a failli être fatale dans mon cockpit est commise chaque jour dans la plupart des organisations », explique dans son best-seller La révolution Holocracy celui qui est aujourd’hui connu pour avoir inventé un système révolutionnaire de management des entreprises : l’holocratie.

Le principe est simple : il s’agit de s’appuyer sur la sagesse collective de toutes les personnes de l’entreprise afin de développer l’agilité, la transparence, et l’innovation. Cela passe par une série de changements fondamentaux : la structure hiérarchique pyramidale est remplacée par une structure plus réceptive d’équipes auto-organisées. La réalisation de soi et l’auto-direction donnent des modèles d’organisation variés. Le processus de prise de décision doit être plus démocratique, même le langage est réinventé afin de développer une culture d’entreprise porteuse de sens.

L’entreprise peut, en effet, être pensée comme un avion doté de capteurs, c’est-à-dire les êtres humains, qui ressentent pour son compte la réalité. « Trop souvent, un capteur possède des informations essentielles qui sont ignorées et ne sont donc pas exploitées », regrette Brian J. Robertson.

Dans la plupart des équipes, les opinions qui ne sont pas partagées par le leader ou la majorité sont souvent écartées. Comment alors réorganiser l’entreprise pour en faire un organisme évolutif, capable de sentir les choses, de s’adapter, de comprendre et d’intégrer ?

Réponse au changement de paradigme

La plupart des entreprises modernes sont bâties sur le paradigme de l’ère industrielle, que Brian J. Robertson baptise « prévoir et contrôler » : atteindre la stabilité et le succès grâce à une planification en amont, un contrôle centralisé et des mesures pour éviter de dévier du cap.

Si ce modèle a porté ses fruits, dans les environnements statiques de l’ère industrielle, les entreprises doivent affronter de nouvelles difficultés dans le monde postindustriel actuel : plus de complexité, d’interconnexions, des échéances plus courtes, une instabilité économique et environnementale. Certains dirigeants comprennent la nécessité d’adopter d’autres approches, mais le principe de prévision et de contrôle n’offre pas l’agilité nécessaire.

Brian J. Robertson l’a personnellement expérimenté lors de la création de sa propre société d’éditions de logiciels : la structure organisationnelle et le système de management se transforment en « véritable goulet d’étranglement pour le traitement de tout ce que je captais ».

Pour véritablement changer les organisations, il ne suffit pas d’ajouter des processus et d’améliorer la culture d’entreprise. Il faut véritablement bouleverser ce que l’auteur appelle le « système d’exploitation », c’est-à-dire les fondations sur lesquelles reposent les processus opérationnels de l’organisation.

Derrière la philosophie, la pratique

Après des nombreuses années d’expérimentation, Brian J. Robertson donne finalement naissance à un nouveau système d’exploitation : « Holocracy » (l’holocratie), une « nouvelle technologie sociale servant à diriger et faire fonctionner une organisation, qui suit un ensemble de règles très différentes de celles en vigueur dans une organisation conventionnelle ». Aujourd’hui, Holocracy fait fonctionner des centaines d’organisations de nature et de taille variées.

L’ouvrage décortique le fonctionnement de ce nouveau système : après avoir montré la manière dont le nouveau système d’exploitation Holocracy distribue l’autorité, l’auteur passe en revue les détails de son fonctionnement pour donner enfin des conseils pour la mise en œuvre de l’holocratie.

Le livre se veut un défi : Holocracy n’est pas une philosophie mais une pratique, difficile à comprendre sans la vivre concrètement. « Dans la mesure où Holocracy n’a pas vu le jour depuis un bureau et sur la base de certains principes ou idées, la traduire en mots et en concepts est d’autant plus ardu ».

L’auteur invite donc les lecteurs à aborder le livre non comme un condensé d’idées, mais comme le guide d’une nouvelle pratique ne se résumant pas à Holocracy, qui n’est qu’un exemple de système employant l’organisation autonome entre pairs et l’autorité distribuée.

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