Le référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne a lieu le 23 juin. | DAMIEN MEYER / AFP

Dans un mois précisément, jeudi 23 juin, le Royaume-Uni va décider de son maintien ou non dans l’Union européenne (UE). Ce référendum, souvent réduit au mot « Brexit » (pour « british exit », sortie des Britanniques de l’UE) est capital pour l’avenir du pays et de l’Europe – « la décision d’une génération », comme l’a résumé le premier ministre David Cameron.

1 - Pourquoi organiser un tel référendum ?

L’organisation d’un référendum sur le maintien du Royaume-Uni au sein de l’Union européenne est une promesse de David Cameron qui remonte à 2013. A l’époque, le premier ministre conservateur, cerné par la montée en puissance du parti populiste pour l’indépendance du Royaume-Uni (Ukip) et par les eurosceptiques de son propre camp, affirme qu’en cas de reconduction à Downing Street, il demandera à ses citoyens de se prononcer sur la place de leur pays en Europe avant la fin 2017. M. Cameron est attendu au tournant sur le sujet : en 2009, avant même de devenir chef du gouvernement, il avait dû admettre que s’il arrivait au pouvoir, il ne pourrait organiser le référendum qu’il avait promis sur le traité de Lisbonne.

Après la nette victoire des conservateurs aux législatives de 2015, le compte à rebours est enclenché. M. Cameron négocie d’abord avec Bruxelles un « statut spécial » au Royaume-Uni, en matière d’immigration, de souveraineté et de gouvernance économique. Un accord est trouvé le 19 février 2016 et le premier ministre annonce dès le lendemain la date du référendum. Ce sera le 23 juin, soit un peu plus de 41 ans après un premier référendum, organisé en 1975, qui avait vu une nette victoire des partisans d’un maintien du Royaume-Uni dans l’UE (à 67,2 %).

2 - Quel est l’enjeu du vote ?

Un vote en faveur du Brexit engendrerait une situation inédite, puisque jamais un pays membre n’a encore quitté l’Union européenne. Certes, si les Britanniques font ce choix, ils ne partiront pas pour autant de l’UE du jour au lendemain : les traités prévoient une période de deux ans de négociation des conditions de sortie, en particulier sur l’accès au marché unique européen.

Une telle décision aurait toutefois des conséquences immédiates, sur le plan financier – de nombreux économistes prévoient une violente secousse sur les marchés financiers et un coup de frein des investissements – et politique, alors que l’Union européenne est déjà fragilisée par la crise des réfugiés et la montée des populismes. Mais les partisans et les opposants au maintien du Royaume-Uni dans l’UE n’ont évidemment pas la même lecture des conséquences d’un Brexit, les seconds estimant qu’une souveraineté retrouvée serait bénéfique en termes d’emplois et d’économie.

3 - A quelle question vont répondre les électeurs ?

La question posée est la suivante : « Should the United Kingdom remain a member of the European Union or leave the European Union ? » (« Le Royaume-Uni doit-il rester membre de l’Union européenne ou quitter l’Union européenne ? »).

Les votants auront le choix entre deux réponses :

  • « Remain a member of the European Union » (« Rester membre de l’Union européenne »)
  • « Leave the European Union » (« Quitter l’Union européenne »)

La question et les choix proposés peuvent sembler verbeux. Mais la formulation évite, selon la Commission électorale, des confusions : avec une interrogation directe (dont la réponse est « oui » ou « non »), les votants sont supposés savoir que leur pays est déjà membre de l’UE et peuvent être influencés par la connotation positive du mot « oui » ou négative du « non ».

Le bulletin avec lequel les électeurs britanniques vont voter, le 23 juin. | electoralcommission.org.uk

4 - Qui est appelé à voter ?

Plusieurs catégories de personnes sont autorisées à prendre part au vote :

  • les Britanniques résidant au Royaume-Uni ;

  • les Britanniques vivant à l’étranger mais ayant été enregistrés sur les listes électorales au Royaume-Uni depuis moins de quinze ans ;

  • les Irlandais et les citoyens des 53 pays membres du Commonwealth résidant au Royaume-Uni ou à Gibraltar ;

  • les Irlandais vivant à l’étranger mais nés en Irlande du Nord et ayant été enregistrés sur les listes électorales en Irlande du Nord depuis moins de quinze ans.

Les citoyens d’un pays de l’Union européenne résidant au Royaume-Uni ne peuvent donc pas participer au vote, excepté les citoyens de Chypre, de Malte – deux pays de l’UE et du Commonwealth – et d’Irlande.

5 - Le déroulement du vote

Le référendum a lieu jeudi 23 juin, de 7 heures à 23 heures (heure locale). Le dépouillement commence dès 23 heures et les résultats devraient être connus le 24 juin.

6 - Qui est contre le Brexit ?

  • Chez les conservateurs, la campagne du « Remain » est menée par le premier ministre David Cameron. La majorité des membres de son gouvernement est sur la même ligne, comme les ministres des finances George Osborne, des affaires étrangères Philip Hammond ou de l’intérieur Theresa May.
  • Les travaillistes ont officiellement pris position pour le maintien du Royaume-Uni dans l’UE par la voix de leur leader Jeremy Corbyn, pourtant peu europhile. La grande majorité des élus du parti est sur cette ligne.
  • Les indépendantistes écossais du SNP, qui sont aux commandes en Ecosse et constituent la troisième force du Parlement britannique, sont opposés au Brexit.
  • En France, l’exécutif estime que la sortie du Royaume-Uni de l’UE serait une mauvaise chose. Nicolas Sarkozy s’est aussi récemment dit « totalement opposé » à un Brexit.
  • Dans le reste du monde, les avis sont majoritairement contre un Brexit : Angela Merkel, Barack Obama, le premier ministre du Japon Shinzo Abe ont par exemple tous déclaré qu’ils souhaitaient voir le Royaume-Uni rester dans l’UE. Le Fonds monétaire international (FMI) et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont également averti des conséquences néfastes qu’aurait, selon eux, un Brexit.

7 - Qui est pour le Brexit ?

  • Chez les conservateurs, l’ambassadeur le plus remarqué d’un départ du Royaume-Uni de l’UE est Boris Johnson, qui vient de quitter la mairie de Londres. Autres figures notables, les ministres de la justice Michael Gove et de la culture John Whittingdale ont également pris position en faveur du Brexit.
  • Quelques travaillistes militent pour le Brexit. Ils sont accompagnés du millionnaire John Mills, qui est aussi le plus gros donateur du parti travailliste.
  • Le parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (Ukip) est résolument pour la sortie du Royaume-Uni de l’UE.
  • En France, le Front national, qui milite pour qu’un référendum similaire soit organisé, est favorable au Brexit.
  • Dans le reste du monde, la voix la plus audible qui s’est prononcée en faveur du Brexit est celle de Donald Trump, candidat républicain à la présidence des Etats-Unis.

8 - Que disent les sondages ?

A un mois du vote, les sondages donnent plutôt gagnant le camp du « Remain ». Dans une enquête de YouGov pour le Times publiée mercredi, 44 % des personnes interrogées se disent pour le maintien du Royaume-Uni en Europe, 40 % contre. Une deuxième enquête, effectuée par Ipsos-Mori et publiée par l’Evening Standard, fait état d’un écart beaucoup plus important entre partisans du maintien (55 %) et d’une sortie de l’UE (37 %).

Mais des sondages récents donnent des écarts resserrés, voire des résultats contraires, avec un Brexit gagnant.

Il y a un an, les instituts de sondage avaient été critiqués après s’être largement trompés sur les résultats des législatives, en raison de la non-représentativité de leurs échantillons. Reste à savoir si les sondeurs ont tiré des leçons de cette débâcle.