Le ministre de la défense israélien Moshe Yaalon (à d.) a présenté sa démission au premier ministre Benyamin Nétanyahou (à g.), vendredi 20 mai. | Sebastian Scheiner / AP

L’humiliation n’était pas acceptable. Le ministre de la défense israélien, Moshe Yaalon, a annoncé vendredi 20 mai qu’il avait présenté sa démission à Benyamin Nétanyahou. « J’ai informé le premier ministre ce matin qu’en raison de sa conduite dans les derniers développements et du manque de confiance en lui, je démissionnais du gouvernement et de la Knesset [parlement] pour prendre du temps en retrait de la vie politique. »

Cette décision de Moshe Yaalon intervient alors que les négociations entre le Likoud, la formation de M. Nétanyahou, et Yisrael Beiteinou, celle d’Avigdor Lieberman, s’accélèrent, afin d’élargir l’actuelle majorité. Forte de seulement 61 sièges à la Knesset (sur 120), elle pourrait ainsi gagner six nouveaux membres. En échange, M. Lieberman, qui a été ministre des affaires étrangères à deux reprises dans le passé, réclame le portefeuille de la défense.

Cette demande intervient alors que les rapports entre le premier ministre et Moshe Yaalon s’étaient fortement dégradés ces derniers mois. M. Yaalon, membre du Likoud, figure très respectée et expérimentée de l’appareil sécuritaire, était devenu le protecteur de l’état-major. Celui qui parlait de « boussole morale », réclamait l’application stricte des règles déontologiques, refusait les accès populistes de la droite nationaliste religieuse. Le 15 mai, il encourageait encore les militaires à s’exprimer sans peur et à ne pas suivre le vent.

Du côté des hauts gradés

Dans le conflit très ancien, souvent sourd, parfois public, entre M. Nétanyahou et les plus hauts gradés du pays, M. Yaalon avait pris le parti de ces derniers. Ce conflit remonte notamment à la question du programme nucléaire iranien. Les militaires israéliens ont toujours adopté des positions réalistes sur ce sujet, doutant de la possibilité d’empêcher le développement des capacités iraniennes par la force. Ces généraux incarnent aussi les élites israéliennes traditionnelles, que M. Nétanyahou cherche à remplacer, ou à museler, dans différents secteurs : au sein de la société civile comme dans la vie culturelle ou les médias.

M. Lieberman, connu pour ses provocations, mais homme opportuniste avant tout, n’a aucune expérience en matière militaire. Il arriverait donc avec une plus grande souplesse d’esprit. « La seule chose qui a sifflé près de ses oreilles sont des balles de tennis », raillait le Likoud, dans un communiqué, en début d’année. « Menteur », « charlatan » ou « M. Zigzag » sont quelques noms d’oiseaux lancés en retour par M. Lieberman à l’attention de M. Nétanyahou. Une autre membre de son parti, Sofa Landver, pourrait hériter du ministère chargé de l’absorption des migrants.

Parmi les autres demandes de M. Lieberman figurent la peine de mort pour les Palestiniens jugés coupables de terrorisme, ou encore l’obtention de fonds, auprès du ministère des finances, pour le règlement des pensions pour les retraités qui ont émigré de l’ex-URSS au début des années 1990. La question de la peine de mort risque d’être âprement débattue sur le plan judiciaire. Le procureur général, Avichai Mandelblit, devrait s’opposer à une telle proposition, comme ses prédécesseurs.

Le successeur de Moshe Yaalon à la Knesset sera automatiquement Yehuda Glick, le suivant sur la liste du Likoud aux élections de mars 2015. Cet activiste messianique à la barbe rousse milite depuis des années en faveur de la construction d’un nouveau temple juif sur l’Esplanade des mosquées (Mont du temple pour les Juifs), à Jérusalem-est. Victime d’une tentative d’assassinat en 2014, il trouverait ainsi une tribune inédite pour pousser en faveur de nouveaux droits d’accès à ce lieu saint, pour les juifs.