De nature calme et réservée, Michel Dussuyer, sélectionneur des Eléphants de Côte d’Ivoire est sorti de son silence habituel, à une semaine d’affronter dans un match sans enjeu des éliminatoires de la CAN 2017, les Panthères du Gabon (pays hôte de la prochaine Coupe d’Afrique et qualifié d’office). Le technicien français est « irrité » de devoir gérer les états d’âme et les ego des joueurs au sein de la sélection ivoirienne.

Le 20 juillet, cela fera un an que vous êtes à la tête de la sélection ivoirienne. Quel changement avez-vous constaté dans le groupe, après son titre continental en début 2015 ?

Fondamentalement, il n’y a pas eu de révolution. Seulement, il y a une organisation de jeu qui est un petit peu différente. Nous essayons de travailler et progresser dans une autre philosophie de jeu. Il s’agit donc plus d’une évolution. En son temps, cette équipe avait déjà entamé une révolution pendant la Coupe d’Afrique des nations 2015 en Guinée équatoriale avec l’arrivée de jeunes joueurs talentueux, à savoir Eric Bailly et Wilfried Kanon. Cela doit se poursuivre. Nous avons eu à disputer sept matchs, il y a des choses qui sont positives, lorsque je tire le bilan. Mais il y a des secteurs qui doivent s’améliorer.

Depuis votre arrivée, le capitaine habituel Yaya Touré n’a toujours pas rejoint la sélection et ne cesse de différer son retour. Est-ce un handicap dans vos plans ?

C’est vrai, c’est un joueur qui pesait beaucoup sur l’animation offensive de l’équipe. Avec sa qualité technique, on connaît son influence et on voit qu’il manque dans ce secteur de jeu. C’est frustrant de le voir chaque fois reporter son arrivée. Maintenant, nous avons eu à travailler sans lui jusqu’à présent.

J’espère que nous allons tous les deux finir par se rencontrer, même si le temps qui passe n’est jamais bon. J’espère en tout cas pouvoir compter sur lui pour le dernier match important des éliminatoires de la CAN 2017 contre la Sierra Leone, en septembre.

Vous modifier constamment votre liste de joueurs convoqués en sélection. Cela est-il dû aux états d’âme des joueurs que vous n’arrrivez pas à gérer ?

C’est toujours mouvant une sélection. Après, on travaille en s’appuyant sur des gens en qui je peux avoir confiance et je sais qu’ils peuvent tirer le groupe vers le haut. C’est l’objectif que nous devons avoir en commun. La Côte d’Ivoire est sur le toit de l’Afrique, j’ai à cœur de défendre ce titre. Il y a des enjeux et des échéances élevées et c’est mieux qu’il y ait une bonne dynamique.

Mais comme dans tout groupe, il y a des états d’âmes à gérer. C’est le cas de Cheick Tioté [milieu de terrain de Newcastle]. Je viens régulièrement vers lui en essayant à plusieurs reprises de le joindre au téléphone. Il ne me répond pas. J’ai vu aussi qu’il n’avait pas tiré un trait sur le passé. Moi je ne fais pas partie de ce passé. J’ai besoin de joueurs qui s’investissent à 100 %. Si ce n’est pas le cas pour Cheick, j’en tire les conclusions qui s’imposent.

Vous êtes aussi agacé par le cas de son coéquipier en club, l’attaquant Seydou Doumbia. Il avait claqué la porte avant le match retour contre le Soudan, le 29 mars…

Oui, j’ai été agacé par ce que j’ai lu et entendu, les interprétations dans la presse. Il faut dire que Seydou Doumbia s’était blessé à la mi-temps du match aller des éliminatoires de la CAN 2017 contre le Soudan [le 25 mars]. Avant la manche retour, il est venu m’informer qu’il devait se faire soigner en Angleterre. Je m’en tiens aux faits. Après on me dit que c’est parce que je fais des classements sous influence d’autres joueurs. Mais c’est mal me connaître. Ces choses m’ont beaucoup irrité.

J’ai attendu des démentis qui ne sont pas venus. Il y a des choses qui se font en famille, ce n’est pas beau de les exposer sur la place publique. Cela fait neuf ans que je suis en sélections africaines, je connais suffisamment l’environnement et la pression. Je suis responsable de mes choix.

Tous ces problèmes assurent-ils une quiétude à l’équipe pour avancer ?

Je suis à la tête d’une équipe qui a des ambitions légitimes pour gagner des titres. Et moi j’ai à cœur de gagner un titre. J’ai besoin de joueurs qui se mettent au service du groupe pour qu’une dynamique s’instaure. L’automne sera difficile avec le début des éliminatoires du Mondial 2018, juste après celles de la CAN 2017. Il est important de travailler ensemble pour atteindre les objectifs. Il y a un effectif de qualité et une organisation plus rigoureuse autour de cette équipe. Il faut pouvoir tirer le meilleur profit.