L’épargne solidaire a permis en 2015 d’injecter 290 millions d’euros dans des entreprises, des associations… | JAY DIRECTO / AFP

« Tous les indicateurs de la finance solidaire sont au vert, c’est une bonne nouvelle pour le financement des entreprises à forte utilité sociale et environnementale », se réjouit Sophie des Mazery, la directrice de l’association Finansol. La raison de cet optimisme : la forte hausse de l’encours de l’épargne solidaire, qui a progressé de 23,7 % à 8,46 milliards d’euros en 2015, selon le baromètre annuel publié par Finansol lundi 30 mai.

Les trois composantes de la finance solidaire affichent une vive croissance. L’épargne salariale, premier contributeur, bondit de 25,6 % à 5,2 milliards d’euros ; les produits bancaires (livret, assurance-vie, compte à terme… avec lesquels les particuliers reversent tout ou partie des intérêts à des organismes) grimpent de 22,5 % à 2,72 milliards d’euros ; les fonds collectés directement par les entreprises solidaires progressent de 13,5 %, à 540 millions d’euros.

« L’an dernier, les réseaux bancaires ont mis en avant ce type de produits et en ont lancé de nouveaux. Cela montre que lorsque les banques jouent le jeu, en prenant le temps de faire un travail de pédagogie auprès des clients, ces derniers adhèrent », explique Mme des Mazery.

290 millions d’euros injectés en 2015

D’ailleurs, le nombre de particuliers ayant souscrit un produit d’épargne solidaire continue de progresser, pour s’établir fin 2015 à 1,083 million d’euros. En donnant du sens à leurs placements, en acceptant d’en partager les (maigres) intérêts, ces épargnants solidaires ont permis l’an dernier d’injecter 290 millions d’euros dans des entreprises, des associations… Concrètement, cent quarante structures d’insertion ont été soutenues, plus de 4 500 personnes ont été logées, et 74 projets liés aux énergies renouvelables, financés, détaille l’étude.

Bien qu’en croissance, cette épargne solidaire reste marginale : elle ne représente que 0,19 % des 4 700 milliards d’euros de placements financiers des ménages, loin de l’objectif de 1 % que s’est fixé Finansol.

« Pour atteindre ce niveau, il faudrait que tous les produits d’épargne réglementés et que l’assurance-vie intègrent un volet solidaire », plaide Mme des Mazery. Si du côté de l’assurance-vie – qui pèse 1 592 milliards d’euros –, rien n’est prévu, les lignes bougent du côté du livret de développement durable (LDD).

Livret de développement durable solidaire

Le projet de loi relatif à la lutte contre la corruption et la transparence de la vie économique, dite « loi Sapin 2 », qui sera discuté à l’Assemblée nationale à partir du 6 juin, prévoit, en effet, que le LDD ait une option solidaire. Dès le 1er janvier 2017, les banques devront proposer à leurs clients détenteurs d’un LDD de partager une partie de leurs intérêts avec une association ou une entreprise de l’économie sociale et solidaire (ESS).

« Pour avoir davantage d’impact, nous plaidons plutôt pour que ce soit une partie des encours qui soit fléchée vers des entreprises de l’ESS, et non une part des intérêts », explique Mme des Mazery, tout en reconnaissant que cette première étape va dans le bon sens.

A terme, les effets pourraient être non négligeables. Imaginons que 10 % des détenteurs d’un LDD acceptent de partager la moitié de leurs intérêts (ce niveau n’est pas inscrit dans la loi, les modalités feront l’objet d’un décret). En se fondant sur l’encours et la rémunération actuels (101 milliards d’euros à un taux de 0,75 %), le LDD-solidaire permettrait de verser chaque année 37 millions d’euros aux associations et entreprises de l’ESS. Soit sept fois plus que le montant aujourd’hui récolté grâce aux produits d’épargne bancaire solidaire.