Présentation de la nouvelle console de Microsoft, à Los Angeles, lundi 13 juin | KEVORK DJANSEZIAN / AFP

En 2017, la famille des consoles de jeux vidéo va s’agrandir. Le japonais Sony et l’américain Microsoft ont tour à tour annoncé de nouvelles machines, le premier dans l’édition du 10 juin du Financial Times, le second lundi 13 juin au soir à l’occasion de sa conférence annuelle pré-E3 (pour Electronic Entertainment Exposition), le Salon du jeu vidéo qui se déroule du 14 au 16 juin à Los Angeles (Californie).

Peu d’informations ont été données pour l’instant. La première est surnommée « PlayStation 4 Neo », et la seconde « Projet Scorpio ». Sony présente sa protégée comme une console « haut de gamme », Microsoft comme un « monstre » de 6 téraflops – une unité de mesure de la puissance de calcul. Elles seront toutes les deux compatibles avec la norme télévisée 4K ultra haute définition, et suffisamment puissantes pour fonctionner avec des casques de réalité virtuelle (le PlayStation VR, côté PlayStation ; le constructeur de la Xbox n’a pas précisé lequel).

Véritable rupture

Bref, sur le papier, les deux machines répondent au pacte de surenchère classique de la nouvelle console, dont la principale fonction est de rendre obsolète son prédécesseur pour le remplacer commercialement. Sauf que pour une fois elle ne le remplacera pas. « Elle [la PlayStation 4 Neo] vise à coexister et à compléter la PS4 de base. Nous commercialiserons les deux versions en parallèle », a ainsi assuré Andrew House, président de Sony, au Financial Times. Microsoft est allé encore plus loin en annonçant un troisième modèle, la Xbox One S, plus compacte que sa console Xbox One d’origine, compatible 4K, qui ne représente pas à un gain de puissance, contrairement au Projet Scorpio, mais qui lit les mêmes jeux.

« Ce ne sont pas trois consoles différentes, explique au Monde Hugues Ouvrard, directeur de Xbox France. Nous essayons de casser cette habitude des générations de consoles, en proposant un environnement dans lequel jeux et accessoires sont tous rétrocompatibles d’une machine à l’autre. »

Pour l’industrie du jeu vidéo, il s’agit d’une véritable rupture. La décision de sortir une console améliorée marque une première pour Sony, qui avait toujours, jusqu’ici, préféré sortir un nouveau modèle.

De son côté, Microsoft avait multiplié les différentes déclinaisons en gamme et en design de sa précédente machine, la Xbox 360, entre 2005 et 2012, mais toutes restaient liées à un écosystème relativement stable et surtout aux performances techniques équivalentes. Jusqu’alors, la mise en avant d’un saut en matière de puissance était justement un argument commercial pour promouvoir une nouvelle machine.

Pourquoi ce nouveau paradigme ? Les raisons sont nombreuses. D’une part, l’augmentation continue des budgets de développement prend les éditeurs à la gorge. Pour que la création de jeux vidéo reste économiquement viable, il faut assurer leur rentabilité en maximisant le nombre de consoles sur lesquelles ils peuvent tourner – raison pour laquelle les jeux multisupports sont désormais la norme.

Les titres tourneront ainsi à partir de 2017 sur des consoles de puissance différente.

« C’est un peu comme regarder un film en 4K ou sur un téléviseur classique : ça reste le même film, et ça restera le même jeu, veut croire M. Ouvrard. Nous pensons que les éditeurs seront très intéressés, parce qu’ils ont tout intérêt à avoir le parc de machines le plus important possible. »

Autre raison : la mode médiatique des casques de réalité virtuelle, que l’industrie espère être la tendance forte des années à venir. Le problème est que ces dispositifs d’affichage immersifs reposent sur une résolution et une fluidité d’animation extrêmement élevées et sont gourmands en ressources.

Une offre peu convaincante

L’offre est pour l’instant peu convaincante, relève M. Ouvrard :

« Aujourd’hui, en matière de réalité virtuelle, vous avez le choix entre deux types de casques : des casques puissants, à haute résolution, qui coûtent cher et fonctionnent avec un PC, comme l’Oculus Rift ou le HTC Vive. Et des casques à plus basse résolution. Dans un an et demi, quand le Projet Scorpio sortira, il aura la puissance technique nécessaire pour tirer pleinement parti de la réalité virtuelle – une technologie qui sera alors mûre. »

Reste à convaincre les joueurs de passer à la caisse une seconde fois en moins de trois ans pour certains. Sony, qui a confirmé le prix de 400 dollars pour le PlayStation VR, commercialisé en octobre, veut croire que l’ancien rythme de remplacement des consoles n’est plus en phase avec l’esprit du temps. « Le consommateur est habitué à un rythme différent dans l’innovation technologique grâce en grande partie à la cadence des améliorations dans les smartphones et les PC », assure Andrew House. « Avec les progrès techniques, la réduction de taille des composants, les consoles se rapprochent de plus en plus des PC », suggère quant à lui Hugues Ouvrard. Mode passagère ou tendance profonde, ce seront les joueurs qui en jugeront.