Après un décès, chacun doit déclarer ce qu’il a reçu du défunt avant sa mort. Sous peine d’être accusé de recel successoral. | PHILIPPE HUGUEN / AFP

Argent, famille, immobilier… Toutes les semaines, nous analysons les derniers arrêts de la Cour de cassation et leurs conséquences.

Après un décès, chacun doit déclarer ce qu’il a reçu du défunt avant sa mort, afin que tout soit intégré dans la succession et qu’aucun héritier ne soit lésé – c’est inscrit dans le code civil. Le risque, sinon ? Etre accusé de « recel successoral » et se voir privé de sa part sur les biens recelés. Mais, attention, il n’y a recel que s’il y a eu volonté de dissimulation, a rappelé, en mars, la Cour de cassation, s’exprimant sur deux cas distincts.

La première affaire débute en 2007. Edouard, alors âgé de 86 ans, verse près de 400 000 euros sur une assurance-vie, dont son épouse, Monique, est bénéficiaire. A la mort d’Edouard, trois ans plus tard, ses fils issus d’un premier mariage assignent Monique en justice. Ils demandent d’une part le « rapport » à la succession de la somme (sa restitution), d’autre part que la veuve soit reconnue coupable de recel successoral car elle n’a pas signalé cette libéralité.

La Cour de cassation ne les a suivis que partiellement. Certes, elle a retenu le caractère disproportionné des primes versées, compte tenu de l’âge d’Edouard, et en a conclu que la veuve devait « rapporter » la somme à la succession. Rappelons que l’assurance-vie n’est pas intégrée à la succession, sauf si les primes sont jugées exagérées. Par contre, pas question pour la Cour de valider un recel : rien ne prouve que Monique a délibérément dissimulé la chose. Elle ne sera donc pas privée de ses droits sur ce montant lors du partage.

« Des cas courants »

Les juges ont été moins cléments envers Richard, accusé de recel successoral dans la seconde affaire. L’homme disposait depuis 2000 d’un compte commun avec sa mère, Agnès, alimenté par les pensions de cette dernière. A la mort d’Agnès, en 2010, le compte était quasi vide et Richard a été poursuivi par ses deux sœurs.

Les juges ont constaté que les retraits effectués à partir de 2004 excédaient les besoins d’une personne âgée, qui plus est logée gratuitement. Ils en ont conclu que Richard avait bénéficié de donations indirectes de sa mère toutes ces années. Et il y a bien eu ensuite recel, car il a été prouvé que Richard avait sciemment omis de les mentionner. Résultat : non seulement il doit « rapporter » à la succession près de 70 000 euros, mais en outre il n’aura aucun droit sur cette somme lors du partage.

« Les cas de recels successoraux sont courants, mais la difficulté est de prouver la dissimulation volontaire, précise Me Anthony Bem, avocat spécialiste du droit des successions. Une bonne stratégie consiste à pousser la personne à la faute en lui écrivant en amont de la procédure pour lui demander de déclarer tout ce qu’elle a reçu du défunt. Si elle ne vous dit pas tout dans sa réponse, la dissimulation est prouvée ! »

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