Cette semaine, nous vous conseillons le cycle consacré par Arte au cinéma produit par la RDA, un documentaire sur le « patron » Gabin, et un ou plusieurs passages sur « Le Divan » de Marc-Olivier Fogiel.

Un placard dans le mur

Les assassins sont parmi nous - bande-annonce - ARTE
Durée : 01:37

En consacrant un cycle au cinéma de l’Allemagne de l’Est, « 70 ans de la DEFA », Arte est exactement là où elle devrait toujours être, c’est-à-dire au service de la rareté et de l’exigence. Quatre films produits par la Deutsche-Film-AG (DEFA), la seule société autorisée par l’Union soviétique à produire des films en RDA, ont été diffusés depuis le 23 mai, ainsi qu’un documentaire, Quand la RDA faisait son cinéma (2016). Les cinéastes étaient naturellement confrontés à la censure et à la pression idéologique des autorités, mais la créativité a toujours pu se frayer un chemin jusqu’au public. Les Assassins sont parmi nous (1946), de Wolfgang Staudte, fut le premier produit par la DEFA et Coming out (1989), d’Heiner Carow, l’un des derniers, dont la sortie s’effectua d’ailleurs au lendemain de la chute du mur de Berlin. Ce portrait formidable – quoique assez désespéré – d’un jeune homme pris entre son désir pour les hommes et son envie de conformité à la norme est filmé dans un Berlin-Est sinistre et grisailleux, envahi de Trabant (ces petites automobiles d’une austère laideur) mais où l’on pouvait entendre le chef Claudio Abbado diriger et voir Hannah et ses sœurs (1986), de Woody Allen, au cinéma. Le cinéaste, qui mit longtemps à imposer et à pouvoir tourner ce sujet tabou et inédit dans le cinéma est-allemand, montre aussi l’étonnante scène underground homosexuelle de cette RDA au bord de l’effondrement. Renaud Machart

70 ans de la DEFA : les films sont disponibles jusqu’au 21 août et le documentaire jusqu’au 1er juin sur Arte + 7

Gabin, le patron

Jean gabin: Archimède le clochard.
Durée : 02:19

On ne se lasse jamais de revoir les scènes cultes et les entretiens télévisés de Gabin, qui fut « le seigneur du cinéma français » au long d’une carrière marquée par quelque 95 films. A l’exception d’une éclipse, au sortir de la guerre, pendant laquelle il s’était courageusement engagé dans les forces armées : Jean Gabin n’était plus le jeune boxeur aux yeux clairs de sa jeunesse, et pas encore le patriarche qu’il allait camper avec un incomparable panache dans et après Touchez pas au grisbi (1954), de Jacques Becker, qui consacre son glorieux retour sur les écrans et dans le cœur des Français. Dans ce documentaire, on entend Gabin définir en un verbe merveilleux le travail des acteurs : « Ils traduisent ! » R. Ma.

Jean Gabin, le dernier des géants, de Nicolas Henry (Fr., 2015, 55 min). Rediffusé sur OCS Géant dimanche 29 mai à 15 h 45 et 21 h 45. A la demande sur OCS GO jusqu’au 21 juin.

Divin divan

Nicolas Bedos à propos de ses TOC : "Je ne pouvais pas faire la bise aux jeunes femmes"
Durée : 03:01

Sa première « séquence » remonte déjà à février 2015, et Marc-Olivier Fogiel l’avait inaugurée avec Fabrice Luchini. Quoi de plus excitant – et de plus rassurant – que de débuter avec cet acteur trublion et toujours en verve, client idéal des plateaux de télévision ? Pourtant, ce dernier n’avait alors guère joué au malin, répondant au contraire sagement, posément, souvent avec émotion et toujours sincèrement aux questions posées par l’animateur. Et il en alla de même avec les dizaines d’invités qui se succédèrent ensuite sur le « Divan » (repris à Henry Chapier) de « MOF » . Pour ne citer que les derniers : Sheila, Daniel Cohn-Bendit, Florent Pagny, Juliette Binoche, Agnès b., Dominique Farrugia… tous ont pu et su livrer l’intime sans impudeur. Et ce grâce au dispositif de l’émission, qui emprunte à la psychanalyse et qui, de ce fait, place l’interviewé et l’intervieweur en situation singulière. Un dispositif qui isole l’invité, le laissant libre de ses mots, de ses hésitations et de ses silences. Dispositif qui oblige aussi l’animateur à rester légèrement en retrait, à capter les mots qu’il entend sans voir le regard de celui qui les énonce, et à s’adapter au cheminement d’une réponse sans trop chercher à l’interrompre. Par ce concept, « Le Divan » libère la télévision d’une de ses plus grandes névroses : l’hystérie du remplissage, du bruit et de la parole inutiles. Il réinstalle à l’antenne un espace d’écoute sans brouillage. Un moment suspendu auquel il est toujours bon de s’abandonner. Véronique Cauhapé

« Le Divan », de Marc-Olivier Fogiel. Sur Pluzz