La vidéosurveillance en entreprise se développe de plus en plus. Si l’employeur peut effectivement la mettre en place, l’introduction d’un tel dispositif est strictement encadrée.

Le recours à la vidéosurveillance doit être justifié par une finalité légitime et être proportionné au but recherché (article L.1121-1 du code du travail). La finalité est jugée légitime s’il s’agit d’assurer la sécurité des biens et des personnes.

Le dispositif sera donc proportionné si les caméras sont, par exemple, installées au niveau des entrées et des sorties des bâtiments, des voies de circulation ou encore des issues de secours. Ce qui n’est pas le cas si elles filment les zones de pause ou de repos des salariés, les vestiaires ou les toilettes ou si elles placent les salariés sous une surveillance constante.

En effet, le salarié a droit « même au temps et au lieu de travail, au respect de l’intimité de sa vie privée » (Cass.soc. 2 octobre 2011 n°99-42.942). En conséquence, les caméras ne peuvent pas être figées sur un poste de travail ou une personne particulière (CE 18 novembre 2015 n°371196), sauf circonstances particulières – par exemple manipulation de fonds par une caissière de supermarché mais même dans ce dernier cas, la ­Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) considère que la caméra doit davantage filmer la caisse que la caissière – cf. Délibération CNIL 2014-307 17 juillet 2014). Attention donc au placement des caméras.

Mise en place sous conditions

Avant toute décision, l’employeur doit informer et consulter les institutions représentatives du personnel de son projet de recourir à la vidéosurveillance, en leur précisant notamment la ou les finalités du dispositif envisagé. Puis, le dispositif doit être déclaré à la CNIL (déclaration de conformité si le traitement est conforme à la norme simplifiée 42 ; à défaut déclaration normale) à moins que le système de vidéosurveillance n’enregistre ni ne conserve les images ou que l’entreprise dispose en son sein d’un correspondant Informatique et Libertés (CIL) qui ait les moyens de sa mission.

En outre, la vidéosurveillance doit faire l’objet d’une information individuelle des salariés, principalement sur la ou les finalités du dispositif, les destinataires des images et les modalités concrètes de l’accès par les salariés à leurs données personnelles traitées par le dispositif de vidéosurveillance. Cette communication doit être complétée par la mise en place d’un panneau affiché de façon visible dans les locaux sous vidéosurveillance informant les salariés mais également les visiteurs de l’existence du dispositif, du nom de son responsable et de la procédure à suivre pour demander l’accès aux enregistrements visuels les concernant.

Enfin, l’employeur doit veiller à assurer la sécurisation des données collectées (celles-ci ne devant être consultées que par les personnes dûment habilitées) et à ne pas indéfiniment conserver les enregistrements (la CNIL considère que la conservation des images ne doit pas excéder un mois).

Les recours

Si le salarié considère que l’employeur a abusé de la finalité du dispositif (par exemple s’il estime que le dispositif vise en réalité à surveiller de manière constante et permanente chaque salarié alors qu’aucune circonstance particulière ne le justifie), il peut agir en saisissant l’Inspecteur du travail, ou les services de police, ou le procureur, étant précisé que l’auteur d’un détournement de la finalité légitime d’un dispositif encourt une condamnation pouvant s’élever jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende (article 226-21 du Code pénal). Le salarié peut également saisir la CNIL qui peut aller contrôler le dispositif et le cas échéant mettre en demeure l’employeur de se conformer à la loi ou le sanctionner.

Des éléments recueillis par l’intermédiaire d’un système de vidéosurveillance non conforme ne peuvent servir de preuve des fautes commises par un salarié : la sanction éventuellement infligée pourrait donc être jugée infondée.

Il est donc essentiel pour l’employeur de bien veiller au respect des règles encadrant la mise en place d’une vidéosurveillance car la moindre faille peut rendre inexploitable le dispositif pour lequel l’employeur a consacré un important investissement financier.

Blandine Allix, Avocat associé (www.flichygrange.com)