La vie des affaires offre parfois des revers bien étranges. Il y a trois ans à peine, le groupe PSA, au fond du trou, était fustigé pour son tropisme trop européen. Aujourd’hui, le constructeur français se retrouve à nouveau pris dans la nasse, mais pour la raison inverse : pas assez d’usines en Europe. Plus précisément, en Grande-Bretagne.

PSA n’a pourtant rien d’une banque de la City, mais figure désormais comme l’une des principales victimes collatérales du vote des Britanniques, jeudi 23 juin. Depuis cette date, son cours de Bourse a chuté de plus de 25 %, nettement plus que son compatriote Renault (–18 %) et que la plupart des autres sociétés industrielles. A cela deux raisons. D’abord sa situation commerciale. Le groupe est le quatrième vendeur d’automobile du pays, avec 8,5 % du marché, ce qui représente 11 % de son chiffre d’affaires. Ensuite parce qu’il ne dispose plus d’usines automobiles sur place. Il a fermé son site de Ryton, près de Coventry, en 2007. Il importe tout ce qu’il vend, à la différence de constructeurs comme Nissan, Toyota, Honda ou BMW.

Touché par la chute de la livre

De ce fait, le constructeur, comme tous les importateurs, est particulièrement touché par la chute de la livre, de plus de 10 % depuis l’annonce des résultats du vote. Pour les analystes de Barclays, cités par l’Agence Option finance, une baisse de 1 % de la livre a un impact de 1,6 % sur le résultat opérationnel de la branche automobile, soit environ 30 millions d’euros. Ce qui signifierait un manque à gagner de plusieurs centaines de millions d’euros. Pas négligeable.

La parade la plus simple consiste à augmenter ses tarifs d’autant. La société a annoncé, au lendemain des résultats, étudier d’éventuels « ajustements » de ses prix de vente pour préserver sa rentabilité face à l’instabilité monétaire. Avec le risque de perdre des parts de marché dans un contexte commercial déjà tendu. « PSA a démontré son savoir-faire pour gérer avec succès son business dans des contextes de forte volatilité de la monnaie, comme en Argentine », indique le groupe.

Il est vrai que le pays de la pampa est un bon terrain d’entraînement en matière de chaos monétaire. La dernière dévaluation du peso argentin date de 2014, avec une chute brutale de 18 % du cours et une flambée immédiate du prix des voitures. Un cauchemar pour les constructeurs étrangers. Et PSA n’a redressé la barre que récemment en relocalisant le maximum de composants qui approvisionnent son usine locale. L’intégration dépasse désormais les 65 % avec un objectif de 85 %. Impossible à réaliser au Royaume-Uni, faute de production sur place. On comprend donc l’ardeur des industriels européens dans leur soutien au camp du maintien du pays dans l’Union européenne. A contrario, certains exportateurs comme Nissan ou BMW pourraient y trouver leur compte s’ils intègrent plus de composants locaux dans leurs fabrications. Ce qui n’arrangerait pas les affaires des autres industriels européens. Sacré « Brexit » !