La liste est désormais entièrement connue. La Commission consultative de sélections olympiques a annoncé, mercredi 13 juillet, le nom des athlètes tricolores qui partiront au Brésil pour les Jeux (du 12 au 21 août en ce qui concerne l’athlétisme) – 26 étaient déjà connus depuis le 28 juin. Parmi cette délégation de 53 athlètes, la récolte de médailles s’annonce plutôt maigre. Lors des récents championnats d’Europe d’athlétisme à Amsterdam (6-10 juillet), les Bleus n’ont récolté que 10 médailles, un total peu encourageant, même si cet événement n’était pas l’objectif majeur de la saison.

« La tête est à Rio, elle n’est pas là (à Amsterdam) », a tenu à relativiser Bernard Amsalem, le président de la Fédération française d’athlétisme. Il est vrai que le bilan médiocre néerlandais sera oublié en cas de moisson réussie à Rio, à condition de ramener plus de médailles qu’aux derniers Jeux disputés dans l’hémisphère Sud, à Sydney, en 2000 (zéro pointé). Tour d’horizon des Bleus qui pourraient briller au Brésil.

  • Les chances de médailles

Renaud Lavillenie lors des championnats d’Amsterdam, le 8 juillet. | MICHAEL KOOREN / REUTERS

Tous les quatre ans, rares sont les athlètes français à monter sur un podium olympique. Lors des trois derniers Jeux, les Bleus n’ont remporté une seule médaille d’or, grâce au perchiste Renaud Lavillenie, à Londres, en 2012. La dernière édition en date fut d’ailleurs la plus prolifique du XXIe siècle, avec trois breloques gagnées, dont une d’or, une d’argent (Mahiedine Mekhissi, 3 000 m steeple), et une de bronze (le relais 4 × 100 m masculin).

Mieux qu’à Pékin, en 2008, où Mekhissi, encore lui, avait été le seul médaillé (argent), avant que Mehdi Baala ne récupère sur tapis vert le bronze du 1 500 m avec la disqualification de Rachid Ramzi, pris par la patrouille antidopage. Pour trouver la trace de la dernière médaille obtenue chez les femmes, il faut remonter à Athènes, en 2004, et le bronze obtenu par le relais 4 × 100 m féminin. A priori, la disette des Bleues devrait se poursuivre à Rio, sauf improbable surprise.

Malgré son zéro pointé aux derniers championnats d’Europe à Amsterdam, le 8 juillet, lors d’une finale perturbée par le vent, Renaud Lavillenie sera la principale chance de médaille française. L’athlète entraîné par Philippe d’Encausse reste le leader d’une discipline qu’il domine toujours de la perche et des épaules. Détenteur de la meilleure performance mondiale de l’année (5,95 m), lors des championnats de France à Angers, le 26 juin, il peut devenir le deuxième perchiste de l’histoire à conserver son titre olympique, après l’Américain Bob Richards, dont le doublé commence à sérieusement dater (1952, 1956).

Mais la mauvaise surprise d’Amsterdam – et ses « conditions de merde », dixit le Français – l’a rappelé : même quand on est habitué à s’envoler à de hautes altitudes, la perche reste une discipline aléatoire. Il lui faudra se méfier de l’Américain Sam Kendricks (5,92 m en 2016), qui l’a battu au meeting de Shanghaï, le 14 mai. Sans oublier le jeune Canadien Shawn Barber (5,91 m cette année), sacré champion du monde en titre à Pékin, en 2015, devant un Lavillenie qui avait dû se contenter du bronze.

Jimmy Vicaut, visiblement pas ravi de sa médaille de bronze gagnée aux championnats d’Europe à Amsterdam, le 7 juillet. | FABRICE COFFRINI / AFP

Décevant à Amsterdam, où il s’est crispé face à la concurrence et n’a obtenu « que » le bronze sur 100 m - avant de récolter l’argent avec le 4 × 100 m –, Jimmy Vicaut, recordman d’Europe (9 s 86), possède tout de même la troisième performance de l’année. Derrière les Américains Justin Gatlin et Trayvon Bromell, mais devant un certain Usain Bolt (9 s 88), dont le début de saison a été perturbé par les blessures. Auteur, depuis le début de l’année, de trois courses en dessous des 10 secondes, dont deux sous la barrière des 9 s 90, Vicaut, à 24 ans, semble dans la forme de sa vie.

Une inconnue de taille, pourtant : sera-t-il enfin capable de confirmer dans un grand championnat ? Sa récente contre-performance aux Pays-bas rappelle qu’il pioche souvent lors des échéances importantes. Mais la déconvenue d’Amsterdam peut aussi servir de déclic pour Rio et le replacer dans un statut moins exposé d’outsider. Toujours en sprint, le relais 4 × 100 m masculin pourrait aussi tenter de se rapprocher du podium, et renouveler sa performance de Londres 2012.

Disqualifié à Londres, en 2012, contraint à l’abandon en 2008, à Pékin, Yohann Diniz n’a jamais réussi ses Jeux. A 38 ans, le marcheur, détenteur du record du monde du 50 km marche (3 h 32 min 33 s) et triple champion d’Europe, joue sûrement sa dernière carte olympique, même s’il a annoncé en avril vouloir poursuivre jusqu’aux Jeux de 2020. Auteur de la meilleure performance de l’année (3 h 37 min 48 s), le sociétaire de l’EFS Reims a finalement décidé de se concentrer sur le 50 km marche. Il devra se méfier, entre autres, de l’Australien Jared Tallent, ex-Poulidor des Jeux et qui a fini par récupérer des médailles d’or que les Russes avaient récolté de manière indue.

Le Français Mahiedine Mekhissi lors des championnats d’Europe, à Amsterdam, le 8 juillet. | FABRICE COFFRINI / AFP

Si le Jamaïcain Omar McLeod, auteur de 5 des 6 meilleures performances de l’année sur 110 m haies, paraît intouchable, Dimitri Bascou, tout récent champion d’Europe, pourrait viser un podium, dans une discipline où les Français excellent souvent (Wilhem Belhocian, Pascal Martinot-Lagarde…).

Pour Mahiedine Mekhissi-Benabbad, la mission paraît plus compliquée, lui qui a été perturbé une bonne partie de l’année 2015 après une opération au pied. Seulement 24e performeur mondial du 3 000 m steeple, il a été sacré à Amsterdam, sans avoir enlevé son maillot cette fois-ci. Double vice-champion olympique (2008 et 2012), il est le seul athlète européen capable de s’inviter au milieu des Kényans. Même s’il semble encore loin de son meilleur niveau et n’a pas encore pu se frotter au gratin de sa discipline cette année, il a déjà prouvé par le passé qu’il décevait rarement lors des grands rendez-vous.

  • Les finalistes potentiels

Le décathlonien Kévin Mayer pourrait avoir sa place dans la catégorie du dessus. Problème : dans sa discipline figure un épouvantail qui réduit le podium à deux strapontins. L’Américain, sauf tempête carioca, devrait occuper la première marche. Derrière le recordman du monde, Mayer cherchera à faire bien mieux que sa 15e place obtenue à Londres, alors qu’il n’avait que 20 ans. Quatrième des Mondiaux de Moscou en 2013 puis forfait à ceux de Pékin en 2015, le spécialiste des épreuves combinées est l’auteur de la 4e meilleure performance de l’année (8 446 points).

Vice-championne du monde (2013) et d’Europe (2014), Mélina Robert-Michon n’a pas encore franchi la ligne des 65 mètres cette saison (64,96 m), et la championne de France (16 fois au cours de sa carrière) ne figure qu’au 13e rang des bilans mondiaux. Pierre-Ambroise Bosse, plutôt décevant à Amsterdam, tentera de faire aussi bien que lors des derniers Mondiaux à Pékin, en 2015 (5e), mais le défi s’annonce ardu.

Même si elle semble loin des inatteignables Caster Semenya (Afrique du Sud) et Francine Niyonsaba (Burundi), la jeune Rénelle Lamote, 22 ans, continue sa progression sur 800 m. Au cours de meetings internationaux réussis ce printemps, elle a abaissé son record personnel à 1 min 58 s 01 (7e meilleure performance de l’année). Huitième des Mondiaux de Pékin, la Française, qui a depuis franchi un palier, peut espérer se qualifier pour la finale.

Médaillée de bronze au lancer de marteau lors des Mondiaux de Pékin, alors qu’elle n’avait que 21 ans, Alexandra Tavernier n’a pas tout à fait atteint les sommets tutoyés l’année dernière (une meilleure performance à 72,16 m, contre 74,39 m en 2015). Eliminée lors des qualifications à Amsterdam, après trois essais mordus, elle peut tout de même espérer bien mieux à Rio.

Double championne d’Europe (2012, 2014), Antoinette Nana Djimou n’a pas réussi la passe de trois à Amsterdam, où elle a remporté l’argent. Forfait aux Mondiaux de Pékin en 2015, l’heptathlète est habituée des places de finalistes, à Moscou en 2013 (8e), Daegu en 2011 (7e) ou Berlin (7e). Il lui sera toutefois difficile de faire mieux que lors des derniers Jeux de Londres (5e).

  • Le grand absent

Teddy Tamgho se prend le genou de douleur, le 25 juin, à Angers. | JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP

Les Jeux et Teddy Tamgho, histoire compliquée. Ou pas d’histoire du tout, en fait. Forfait à Rio, après une fracture du condyle médial du fémur (une structure articulaire du genou), lors des championnats de France à Angers, en juin, le champion du monde 2013 du triple saut avait pourtant réalisé les minima olympiques après être revenu d’une longue période de blessure, en rebondissant à 17,15 m.

Ce nouvel épisode est le dernier en date d’un sombre feuilleton. En juillet 2008, aux championnats du monde de Bydgoszcz, Tamgho est sacré avec un saut à 17,33 m. La marque le situe au-delà des minima (17,10 m), mais le vent, trop fort, empêche la validation de la performance. Qu’à cela ne tienne, il réalise 17,19 m le 29 juillet à Monaco. Problème : il est déjà trop tard. En 2012, une série de blessures à la cheville l’empêchent de sauter à Londres. En 2020, Teddy Tamgho aura 31 ans. Et peut-être l’occasion de disputer ses premiers Jeux, à Tokyo.