Squelette d'un Tyrannosaurus Rex présenté lors de l'exposition "Fossil World" en 2014 à Munich. | SVEN HOPPE/AFP

Exhumé en Ouzbékistan et vieux de 90 millions d’années, un « cousin » de Tyrannosaurus rex est décrit dans la revue scientifique PNAS datée du 14 mars. Bien que Timurlengia euotica ne fasse que la taille d’un cheval et qu’il ne représente pas toutes les caractéristiques de T. rex, les auteurs de la découverte axent l’essentiel de leur description sur ses relations de parenté avec l’illustre dinosaure, qui vécut, lui, entre 68 et 66 millions d’années avant notre époque. Comme s’ils souhaitaient que la gloire de ce dernier rejaillisse sur leur protégé, doté pour se grandir du patronyme d’un conquérant sans pitié, Tamerlan (1336-1405). Il a certes le mérite de suggérer que le gigantisme des tyrannosauridés est probablement une caractéristique tardive de leur évolution.

Le paléoartiste chargé de donner chair à ce nouveau venu l’a représenté recouvert de plumes, tout comme celui qui a dessiné la couverture de T. rex superstar, l’ouvrage consacré par le paléontologue Jean Le Loeuff à l’« irrésistible ascension du roi des dinosaures ». Ce choix d’illustration témoigne des dernières avancées en paléontologie, qui soulignent l’importance des duvets et filaments dont la trace a pu subsister jusqu’à nous. Il montre aussi que la façon de représenter les dinosaures est une œuvre inachevée et mouvante.

Voyage en « tyrannosauritude »

C’est précisément l’un des thèmes du livre de Jean Le Loeuff, qui rappelle que notre idée de la posture des dinosaures en général et de T. rex en particulier n’a cessé d’évoluer au fil des siècles et des découvertes. Et que littérature et cinéma ont souvent tardé à prendre en compte les dernières avancées de la science. La mode du « tyrannosaure kangourou », bondissant à l’aide de sa queue puissante, a eu une postérité durable. Et Jurassic World (Colin Trevorrow, 2015), dernier blockbuster hollywoodien, persiste à montrer des bestioles glabres, se désole-t-il, même s’il estime qu’à l’âge adulte, T. rex était probablement dépourvu de plumes.

Le voyage en « tyrannosauritude » que Jean Le Loeuff propose fait revivre les savants, prospecteurs et aventuriers – ils étaient parfois un peu des trois – qui ont permis à ces mondes perdus d’émerger des entrailles de la Terre. Il raconte comment les fossiles ont inspiré les artistes et créateurs, de saint Augustin à Spielberg en passant par Balzac.

Cette promenade érudite dans le temps et l’espace est fort plaisante, l’écriture est enlevée, même si certains passages citant des œuvres mineures de science-fiction auraient mérité d’être abrégés au profit de pages plus étoffées sur la physiologie et le comportement des tyrannosaures.

L’auteur souligne que la France a longtemps été rétive au charme violent de T. rex, lui préférant le placide diplodocus – qui sert d’ailleurs d’emblème au musée des fossiles d’Espéraza (Aude), que dirige Jean Le Loeuff. Pourquoi cette dilection hexagonale pour un brouteur géant plutôt que pour un tueur sanguinaire ? Il faudrait un livre pour répondre, affirme le paléontologue, dont on attendra donc les prochains ouvrages avec curiosité.

T. rex superstar, de Jean Le Loeuff (Belin, 242 p., 19 €).