L’hôpital Pasteur, CHU de Nice, a dû traiter 107 blessés, dont 25 en urgence absolue, dans la nuit du jeudi 14 juillet. | Claude Paris / AP

Toute la nuit, ils ont été sur le pont pour gérer l’afflux de victimes de l’attentat qui, jeudi 14 juillet dans la soirée, a fait au moins 84 morts sur la promenade des Anglais de Nice, fauchés par un camion qui a foncé dans la foule. Si une cinquantaine de blessés ont été accueillis par l’établissement pédiatrique Lenval, le plus proche du lieu de l’attaque, c’est l’hôpital Pasteur-II, le CHU de Nice, qui a dû prendre en charge le plus gros contingent de blessés : 107 personnes, dont 25 urgences absolues.

Au sein du CHU de Nice, « depuis vendredi matin, plus aucune victime n’est en situation d’urgence absolue, mais une dizaine de personnes restent en réanimation et leur pronostic vital est engagé. Quatre personnes sont décédées, explique un médecin anesthésiste-réanimateur. Le plan blanc a été levé en fin de nuit ».

Gestion « efficace et réactive »

Ce dispositif, prévu pour les situations sanitaires d’urgence et de crise, a permis de rappeler du personnel et d’organiser les secours. L’hôpital a ainsi mis sur pied une équipe d’une vingtaine de chirurgiens, une vingtaine de médecins réanimateurs et autant d’internes, qui ont permis de renforcer le bloc opératoire, ainsi que de nombreux infirmiers.

Surtout, l’exercice de simulation d’une attaque terroriste, mené le 8 mars dans toute la ville, a facilité, selon le médecin, une gestion de la crise sanitaire « efficace et réactive » : « L’équipe médicale et soignante était prête, nous avions le matériel chirurgical nécessaire, et nous connaissions tous les circuits pour réorienter les victimes entre le déchocage, les urgences, etc. » Des secrétaires ont également été détachées pour accompagner les médecins de façon à identifier les victimes, faciliter leur prise en charge et informer les familles.

« Mon message, c’est de saluer l’extraordinaire réactivité de l’hôpital et des personnels de santé », a déclaré la ministre de la santé Marisol Touraine, interrogée par BFM-TV depuis Nice, saluant le « travail [réalisé] pour sauver et tenter de sauver des vies ».

« Nombre de morts monstrueux »

« La gestion a été bonne. Au début, c’était un peu la sidération, puis les choses se sont mises en route, comme lors de l’exercice, confirme le professeur Nicolas Venissac, chirurgien thoracique au CHU, appelé dans le cadre du plan blanc. Mais, même quand on s’y prépare, personne ne s’y attend vraiment. Surtout qu’on avait vu tous les cas de figure, des attaques d’armes à feu, d’armes blanches, d’armes chimiques, des explosions, mais pas un attentat avec un camion. »

D’où des blessures et une gestion de crise très différentes de celles qui ont suivi les attentats du 13 novembre à Paris et Saint-Denis. « A Nice, il y a un nombre de morts monstrueux, avec un afflux de blessés en comparaison anormalement bas », relève le Pr Nicolas Venissac.

« La gestion n’a rien à voir. On n’a pas, comme à Paris, de très nombreux blessés par balle dont l’état va s’aggraver très vite, et qui doivent passer au bloc opératoire de manière extrêmement urgente, poursuit-il. Cette fois, les blessures étaient soit très graves d’emblée, soit des polyfractures qui pouvaient attendre un peu, mais aucune évolutives. On a donc pu gérer les flux de patients, sans trop-plein. »

« Scènes de carnage »

Treize personnes sont passées au bloc, jusqu’à 4 heures du matin, puis encore onze dans la journée de vendredi. Ont été traités en priorité les traumatismes crâniens, les hémothorax et les hémopéritoines (épanchements de sang dans la cavité thoracique ou abdominale) et les fractures ouvertes de membres.

Ensuite, le personnel médical a pris en charge les autres blessures : des écrasements, des chocs directs, des lésions des membres, du bassin et du crâne. « Finalement, c’est comme si on avait dû gérer 100 accidents de voiture à la fois, avec de nombreux polytraumatismes », note M. Venissac.

Vendredi, au-delà de la poursuite des opérations au bloc, et des autopsies des personnes décédées, le personnel médical, qui a reçu la visite de François Hollande en milieu de journée, devait également bénéficier d’une prise en charge psychologique.

« Les urgentistes sur site étaient choqués. Ils ont assisté à des scènes de carnage. Quand on voit arriver autant de patients avec des blessures graves, des lésions délabrantes, de manière très rapprochée, cela évoque une scène de guerre », assure le médecin anesthésiste-réanimateur. Et Nicolas Venissac d’ajouter : « Il va falloir débriefer ensuite et voir comment s’améliorer encore. »

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