A Nice, une dame crache à l’endroit où Mohamed Lahouaiej Bouhlel a été abattu par la police, le soir du 14 juillet, après avoir assassiné 84 personnes et en avoir blessé plus de 200. | JEAN-PIERRE AMET / REUTERS

Deux coups de canon, puis une salve d’applaudissements. Le silence vient d’être rompu, lundi 18 juillet à 12 h 01 sur la promenade des Anglais, à Nice. Le premier ministre, Manuel Valls, et la ministre de la santé, Marisol Touraine, repartent de la cérémonie officielle comme ils étaient venus, sous les huées et les demandes de démission de la foule, qui préfère ovationner ceux qui les suivent : les pompiers et les secouristes.

Colère et recueillement se mêlent aux dizaines de milliers de personnes réunies pour rendre hommage aux victimes de l’attentat qui a frappé Nice, le soir de la fête nationale. Beaucoup de discussions commencent par « moi, j’étais là quand ». Quand le camion a dévalé les 1 700 mètres de la promenade des Anglais, tuant 84 personnes sur son passage et en blessant plus de deux cents. Quand la marée humaine est entrée dans la ville à la recherche d’un refuge, paniquée.

« Tolérance zéro »

Certains déposent une fleur sur les traces de sang déjà recouvertes d’hommages. D’autres ajoutent leurs crachats au tas de détritus amoncelés à l’endroit où Mohamed Lahouaiej Bouhlel a été abattu. Nadine, elle, réserve sa colère au gouvernement : « Des assassins », hurle la Niçoise de 56 ans, tremblante, en s’éloignant d’un petit groupe qui discute de ce qu’« on va bien pouvoir faire, après ». Pour Nadine, c’est simple : « Tolérance zéro maintenant. »

Pour la première fois depuis l’attentat, elle se tient à l’endroit exact où elle était, lorsque le camion est passé. « Je savais que j’allais crier ma haine », explique-t-elle, avant d’aller remercier le patron du Galion, le restaurant de plage où elle s’est réfugiée une partie de la nuit.

Comme autour de Nadine, d’autres petits groupes se forment sur la promenade, où la minute de silence fait place au débat public. La plupart ne se connaissent pas mais partagent la même impression sur la sécurité ce soir-là : « Néant ! » Un jeune homme en tenue de plage affirme à une femme en robe noire que « tout ce qu’ils [le gouvernement] voulaient, c’était préserver la finale de foot. » Lundi matin, des voitures de police ont été positionnées en travers de la promenade, à l’entrée, des roses coincées sous les essuie-glaces.

« La guerre, elle est chez nous. Alors pourquoi ils vont la faire ailleurs ? », se demande Hanan Jamal, au milieu du cercle qui s’est formé. Pour elle, le gouvernement est responsable de la radicalisation en France. Mais pas d’amalgame, répète-t-elle, ajoutant comme pour se justifier qu’elle est elle-même musulmane et d’origine marocaine.

Un vieil homme marche jusqu’à elle pour l’embrasser : « Vous avez bien parlé madame. » En entendant les voix qui s’échauffent, quelques policiers sont tout de même venus en renfort non loin de la jeune femme. Au cas où.