Christian Estrosi, à Nice samedi 16 juillet. | ERIC GAILLARD / REUTERS

Lancé dans un affrontement médiatique avec l’exécutif depuis l’attentat du 14 juillet, Christian Estrosi n’a visiblement pas l’intention de faiblir. Dimanche, dans un entretien publié sur le site internet du Point, le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur est une nouvelle fois monté au créneau contre le gouvernement. « J’affirme donc que le soir du 14 juillet, les présences policières et militaires étaient insuffisantes », y déclare l’élu du parti Les Républicains (LR) en expliquant avoir lui-même visionné les images de vidéosurveillance. Il n’y aurait vu qu’à peine la « moitié » des 64 policiers nationaux que le ministère de l’intérieur affirme avoir déployés sur la promenade des Anglais. Le responsable LR poursuit :

« Le ministre de l’intérieur et le préfet, au cours de deux points de presse, ont cherché à se défausser sur la municipalité. Mais si les maires avaient en charge la police et l’ordre public, cela se saurait. »

S’il n’est plus le maire de Nice mais seulement son premier adjoint en charge de la sécurité, une décision prise en juin pour se conformer à la loi contre le cumul des mandats, M. Estrosi a été omniprésent dans les médias depuis l’attentat. Dans la nuit de jeudi à vendredi, il avait été le premier responsable politique à tweeter un bilan du nombre de morts, enjoignant aux Niçois de rester barricadés chez eux. Devant des journalistes rassemblés près du lieu du drame, il avait tué dans l’œuf toute possibilité d’unité nationale en s’interrogeant devant les caméras : « Pourquoi l’Etat a-t-il annoncé [jeudi] à midi la levée de l’état d’urgence et décidé [jeudi] soir qu’il faut le prolonger de trois mois ? Tout ça me paraît bien désordonné. »

« Un mensonge d’Etat »

Les trois jours qui ont suivi, le président de la région PACA a multiplié les déclarations. Une activité qui a obligé la préfecture des Alpes-Maritimes à publier, samedi matin, un communiqué destiné à préciser les effectifs de l’Etat déployé, c’est-à-dire 64 policiers nationaux, 42 policiers municipaux et 20 militaires de la mission « Sentinelle ». « Un mensonge d’Etat », a alors répondu Christian Estrosi lors d’une allocution devant sa police municipale le même jour.

Dans la nuit de jeudi à vendredi, il avait été le premier responsable politique à tweeter un bilan du nombre de morts

Ces différentes sorties ont été très peu appréciées au sein du gouvernement. « Les manifestations du 14 juillet ont été préparées en très étroite liaison avec la ville de Nice », a affirmé le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, samedi 16 juillet, avant que Manuel Valls ne laisse transparaître sa colère dans un entretien au Journal du dimanche :

« Si Christian Estrosi, ancien maire de Nice, avait le moindre doute, il pouvait demander l’annulation du feu d’artifice. Il ne l’a pas fait. »

Et le premier ministre de poursuivre : « Une différence nette entre la dignité d’Anne Hidalgo après les attentats de janvier et de novembre et l’attitude de Christian Estrosi. »

Très apprécié d’une partie des Niçois

En quelques jours, l’ancien maire de Nice est devenu un acteur majeur de la polémique qui enfle entre le gouvernement et l’opposition. Une attitude estimée par les sarkozystes. Lundi, le bureau politique de LR, prévu à midi, a été décalé à 18 heures pour permettre à M. Estrosi d’assister aux cérémonies de Nice puis de prendre la parole lors de la réunion. « Il est le mieux placé pour parler de ce qu’il s’est passé et de la sécurité d’une ville », estime un proche de M. Sarkozy rejoint par Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes et spécialiste des questions de sécurité, pourtant opposé au niveau local à M. Estrosi : « Il ne fait qu’exprimer le sentiment de beaucoup de Niçois traumatisés et les déclarations de M. Valls sont une insulte à ces gens. »

Très apprécié par une partie des Niçois pour s’être employé sur le front de la sécurité de sa ville (378 policiers municipaux en 2015, 1 257 caméras de vidéosurveillance), M. Estrosi est un sarkozyste de la première heure. En 2015, juste après les attentats de janvier, l’ancien ministre de l’industrie avait commencé sa campagne pour la présidence de la région PACA en dénonçant la présence d’une « cinquième colonne »  islamiste. Il l’avait emporté face à la frontiste Marion Maréchal-Le Pen, grâce en partie à l’apport des voix de gauche.

Même s’il s’est récemment montré plutôt critique à l’égard de Nicolas Sarkozy, notamment au sujet de la ligne du « ni-ni », il devrait être un élément important du dispositif de campagne de l’ancien chef de l’Etat. Surtout s’il continue à critiquer le gouvernement.