Pharmacie à Paris. | KENZO TRIBOUILLARD / AFP

L’éventuelle introduction d’une clause de conscience fait débat chez les pharmaciens et est l’objet d’une nouvelle consultation au sein de la profession, qui inquiète la ministre des droits des femmes. Mardi 19 juillet, Laurence Rossignol s’est étonnée de cette consultation lancée par l’ordre des pharmaciens, affirmant que si elle était « suivie d’effet, elle ouvrirait clairement la possibilité pour des pharmaciens de refuser de délivrer la contraception d’urgence [pilule du lendemain], la pilule, le stérilet ou même le préservatif ».

En réaction, la présidente du conseil national de l’ordre des pharmaciens, Isabelle Adenot, a jugé ce communiqué « scandaleux », car écrit sur la base de « rumeurs de réseaux sociaux », et a affirmé que « l’ordre a toujours défendu les droits des femmes ». Certains professionels de santé s’en sont en effet inquiétés sur Twitter, tandis que le site le Moniteur des pharmacies estime que « des officinaux pourraient être tentés de s’en prévaloir pour refuser la contraception orale d’urgence, voire la contraception tout court pour des motifs religieux », comme le relève un article de Slate.

Mme Adenot a expliqué qu’un nouveau code de déontologie est en préparation pour remplacer l’actuel, qui date de 1995. Pour rédiger ce nouveau code, qui passe de 77 à 48 articles, le conseil national « a interrogé les 75 000 pharmaciens et tous les syndicats ». « Sur quelque 3 000 pharmaciens ayant répondu début 2016, 85 % voulaient une clause de conscience », sujet qui n’est « pas du tout lié à la contraception mais à la fin de vie, question qui fait énormément débat dans la profession », a-t-elle ajouté.

Acte pharmeutique portant atteinte à la vie humaine

Le conseil national a délibéré début juillet sur un projet de nouveau code mais il était « très divisé » sur l’introduction d’une clause de conscience. Il a donc décidé de lancer une nouvelle consultation, jusqu’au 31 août, sur un unique article, « pas du tout celui qui circule sur Internet, qui n’est qu’un extrait de la phrase ». Le projet d’article soumis à consultation impose en fait « une obligation », a souligné Mme Adenot :

« Sans préjudice du droit des patients à l’accès ou à la continuité des soins, le pharmacien peut refuser d’effectuer un acte pharmaceutique susceptible d’attenter à la vie humaine. Il doit alors informer le patient et tout mettre en œuvre pour s’assurer que celui-ci sera pris en charge sans délai par un autre pharmacien. Si tel n’est pas le cas, le pharmacien est tenu d’accomplir l’acte pharmaceutique ».

Le conseil national de l’ordre se réunira le 5 septembre pour prendre sa décision. Dans une réaction transmise à l’AFP, la ministre de la santé, Marisol Touraine, a exprimé sa « pleine confiance » en Mme Adenot « pour que le droit à la contraception d’urgence et à l’IVG ne soit aucunement remis en cause ». « La ministre ne croit pas que l’ordre ait jamais eu l’intention de porter une proposition qui remette en cause ces droits fondamentaux des femmes », a ajouté son entourage, soulignant que le nouveau code de déontologie devra être validé par Mme Touraine, qui « ne laisserait jamais place à une telle disposition. »