François Hollande à l’ambassade de France à Lisbonne, le 19 juillet. | STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

Le voyage de François Hollande au Portugal devait être consacré à l’Europe. Il a été dominé par le choc de l’attaque djihadiste du 14 juillet à Nice. A Lisbonne, mardi 19 juillet, le président français a lancé un appel à l’unité du pays et de l’Europe, après les attaques de l’opposition sur le manque de réponse du gouvernement face au défi terroriste.

« Le premier devoir, c’est de protéger autant que c’est possible nos concitoyens », a rappelé le président de la République, avant d’indiquer : « L’autre devoir, c’est de faire en sorte que nous soyons unis, rassemblés » face aux attaques djihadistes. « Les terroristes veulent nous diviser, nous monter les uns contre les autres », a expliqué M. Hollande, en réponse aux multiples critiques lancés par plusieurs responsables de la droite.

Il a donné des gages à l’opposition en indiquant qu’il était prêt à prolonger l’état d’urgence de six mois – le gouvernement avait initialement prévu un prolongement de trois mois. Il s’est justifié sur l’annonce, lors de son allocution du 14 juillet, de la fin de cet état d’urgence après l’Euro de football et le Tour de France. Et parce que la loi permettant de renforcer le dispositif pénal de lutte contre le terrorisme avait été adoptée en juin. « J’avais demandé une loi nous donnant les moyens d’agir, pour que les juges et les procureurs (le) puissent aussi. » Répondant aux critiques de l’opposition dénonçant l’impuissance du gouvernement, il a mis en avant les fermetures de sites djihadistes et de lieux de propagandes islamistes.

Refus de la surenchère

Après l’attaque de Nice, il a souhaité prolonger l’état d’urgence « car nous ne savons pas encore si elle ne peut pas donner lieu à des répliques ». Il a assuré qu’il souhaitait « renforcer certaines dispositions dès lors que le juge constitutionnel nous en donne la possibilité ». Le Conseil constitutionnel avait censuré certaines dispositions des précédents états d’urgence.

Mais le président de la République tient à mettre des limites et refuse la surenchère : « Je n’ajouterai pas des mesures aux mesures, si je ne suis pas sûr qu’elles auront leur efficacité, surtout si elles (étaient) contraires à nos principes de libertés et de vie en commun. » Il refuse aussi « des dispositions contraires à notre ordre constitutionnel » et qui feraient que « la France ne serait plus la France ». Une allusion notamment au souhait de la droite de mettre en place des détentions administratives préventives.

« La menace est là. C’est pour ça que nous avons intensifié nos actions en Syrie », a-t-il ajouté, en rappelant qu’il avait annoncé le 14 juillet un appui aux Irakiens pour les aider dans la conquête de Mossoul, aux mains de l’organisation Etat islamique (EI).

Après ses rencontres avec son homologue portugais, Marcelo Rebelo de Sousa, et le premier ministre social-démocrate, Antonio Costa, il s’est félicité du soutien du Portugal, notamment en Centrafrique et au Sahel, et en appelle à la solidarité européenne comme cela avait été le cas après les attentats du 13 novembre 2015. « L’Europe, ce n’est pas seulement un marché et une monnaie, c’est aussi une défense qui doit être renforcée », a expliqué François Hollande qui place la défense au cœur du projet d’une nouvelle Europe à 27 quand le Royaume-Uni aura officialisé son départ.

Eviter « la discorde »

De même qu’il appelle l’opposition à ne pas brader certaines valeurs dans la lutte contre le terrorisme, ils appellent les Français à continuer à « vivre ». Il exclut l’annulation des spectacles de l’été et les rassemblements. « On ne va pas empêcher nos compatriotes de vivre, on ne va pas fermer nos frontières », en rappelant que la France est l’une des premières destinations touristiques du monde. « Ce qui doit être plus fort que tout, c’est la France et les Français, pour assurer la permanence de ce que la France représente aux yeux du monde. »

« Je dois dire aux Français qu’ils doivent vivre et montrer cette capacité de résistance, cette conviction que nous sommes la France et que nous ne mettons pas un genou à terre alors même que l’on veut nous frapper et qu’il y a du sens à défendre nos libertés. »

« Nous devons voir la réalité en face. Il y a une part de tragique dans l’histoire », a-t-il rappelé devant la communauté française de Lisbonne. Avant de réitérer son appel à l’union, pour éviter « la discorde, la désunion et la dislocation. Cela vaut pour la France, comme pour l’Europe ».