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Mercredi 27 juillet, alors que la convention démocrate de Philadelphie battait son plein, avant le discours très attendu de Barack Obama, le compte Twitter de WikiLeaks a publié un message annonçant la publication de nouveaux documents : les « DNC recordings », pour « enregistrements du comité national démocrate », la plus haute instance du parti politique américain.

Vendredi 22 juillet, juste avant le début de la convention nationale, qui doit voir Hillary Clinton devenir officiellement (jeudi 28 juillet) candidate à la présidentielle, le site spécialisé dans la publication de documents confidentiels avait déjà publié une vaste quantité de documents confidentiels du Parti démocrate : plusieurs dizaines de milliers de courriels internes, baptisés « DNCleaks ».

Plusieurs courriels montraient notamment que les hauts cadres du parti, très majoritairement favorables à Hillary Clinton, avaient tenté de saboter la campagne de Bernie Sanders. La présidente du DNC avait dû démissionner après ces révélations.

Des enregistrements sans intérêt

Mais les « DNC recordings » sont loin d’avoir eu le même effet. Faute d’informations majeures : les 29 fichiers MP3 mis en ligne par WikiLeaks sont des messages laissés au standard du parti. On y entend des militants pro-Clinton se plaindre de la campagne de Bernie Sanders, mais aussi des messages plus personnels, dont un extrait de ce qui semble être une conversation entre un père et sa fille parlant d’un éléphant au zoo.

Le message de WikiLeaks annonçant ces « DNC recordings » a été largement moqué en ligne – aussi parce que les documents avaient déjà été mis en ligne dès vendredi. Plusieurs voix influentes dans le domaine de la sécurité informatique ont critiqué la publication de ces documents, d’autant plus que les DNCleaks contenaient déjà, au-delà des révélations sur le fonctionnement du comité central démocrate, des données personnelles (coordonnées, numéros de passeport, etc.) de donateurs du parti.

Au-delà du contenu des documents, le moment de leur publication a également occasionné une vive passe d’arme entre WikiLeaks, les soutiens de Hillary Clinton et plusieurs médias américains. Les proches de la candidate démocrate accusent le site de faire le jeu de Donald Trump, et l’accusent, de manière à peine voilée, d’avoir acquis les fichiers du DNCleaks par le biais des services secrets russes.

WikiLeaks a nié à plusieurs reprises tout lien avec la Russie, et Moscou a, de son côté, qualifié ces accusations d’absurdes. Mais le calendrier de la publication des documents fait dire à de nombreux observateurs, dont le New York Times, que la date des DNCleaks a délibérément été choisie pour nuire à Hillary Clinton. Une accusation là aussi vivement démentie par WikiLeaks, qui explique avoir choisi de publier le premier jour de la convention démocrate uniquement pour bénéficier du « maximum de visibilité ».

Multiplication des critiques

Depuis plusieurs semaines, WikiLeaks a fait l’objet d’une série de critiques sur sa manière de gérer plusieurs dossiers, y compris – c’est une nouveauté – de la part d’acteurs qui soutiennent habituellement le site de Julian Assange. Aux Etats-Unis notamment, de nombreuses personnalités dites « progressistes » ont peu apprécié de voir WikiLeaks prendre la défense de Milo Yannopoulos, journaliste et activiste néoconservateur banni de Twitter pour avoir à plusieurs reprises incité ses abonnés à harceler des personnes.

En France, la publication par WikiLeaks, sur son compte Twitter, d’images non censurées de l’attentat de Nice a également suscité une vague d’incompréhension. Pris à partie par le journaliste de Télérama, Olivier Tesquet, WikiLeaks a estimé que la publication de ces images était importante pour montrer la réalité « à ceux, à gauche comme à droite, qui veulent la balayer sous le tapis ».

Le site s’est aussi attiré de nombreux reproches après un tweet ambigu, accusé d’antisémitisme, que WikiLeaks a finalement supprimé en accusant les néonazis et les supporters de Hillary Clinton de l’avoir intentionnellement mal compris.

Les courriels de l’AKP

Cette semaine, le site a aussi été vivement critiqué pour sa présentation entourant la publication de ce qu’il appelle les « AKP e-mails », un ensemble d’environ 300 000 courriels piratés sur les serveurs du Parti de la justice et du développement, au pouvoir. WikiLeaks a expliqué avoir obtenu les documents il y a déjà quelque temps, mais avoir accéléré leur publication après le coup d’état raté du 15 juillet et la répression qui a suivi. Immédiatement après la publication des fichiers, le site de WikiLeaks a été bloqué en Turquie.

Seul problème : les courriels, présentés un peu hâtivement par une partie de la presse comme les « Erdogan Leaks », du nom du président turc, ne contenaient en réalité aucune révélation majeure, mais essentiellement des discussions de groupe banales et des messages envoyés par de simples citoyens au parti au pouvoir.

Là encore, la publication de ces informations, juste après la tentative de coup d’état, a provoqué de vives critiques de la part d’activistes et de journalistes turcs, mais c’est surtout un message publié sur les réseaux sociaux par WikiLeaks, avec un lien vers « la source complète » des données, qui s’est avéré le plus problématique.

La source complète, publiée sur le site Archive.org par le chercheur en sécurité Michael Best, qui a, depuis, reconnu avoir fait une erreur, contenait en effet une base de données électorale quasi complète, incluant des données personnelles et les adresses postales de citoyens turcs. Archive.org a ensuite supprimé l’accès aux documents.