Le président turc Recep Tayyip Erdogan a annoncé, samedi 30 juillet, à la télévision, vouloir contrôler directement les services de renseignement et les chefs d’état-major de l’armée, renforçant encore son pouvoir deux semaines après un putsch raté.

« Nous allons introduire une petite réforme constitutionnelle [au Parlement] qui, si elle est approuvée, fera passer le service national de renseignement (MIT) et les chefs d’état-major [de l’armée [sous le contrôle de la présidence. »

Pour être adoptée, cette réforme devra recueillir une majorité des deux tiers au Parlement. Le gouvernement islamo-conservateur de l’AKP aura donc besoin du soutien de certains partis d’opposition. Deux de ces derniers ont rencontré M. Erdogan il y a quelques jours et s’étaient dit prêts, selon le premier ministre Binali Yildirim, à travailler sur un changement de la Constitution.

Remaniement de l’armée

Le président turc a par ailleurs annoncé samedi son intention de fermer toutes les écoles militaires et de les remplacer par une université nationale chargée de former les forces armées.

Ces déclarations interviennent alors qu’Ankara a procédé cette semaine à un important remaniement de l’armée, dont près de la moitié des généraux (149) ont été limogés après la tentative de putsch de la nuit du 15 au 16 juillet.

Une petite partie des militaires, dont de hauts gradés, s’étaient emparés de chars, avions de chasse et hélicoptères pour renverser le pouvoir, semant la panique dans les rues des grandes villes. Environ 270 personnes avaient trouvé la mort. Instauré pour une durée de trois mois peu après le putsch, l’état d’urgence pourrait être prolongé, comme l’a fait la France après les attentats djihadistes, a déclaré également M. Erdogan.

10 137 personnes en détention préventive

Depuis le 15 juillet, 18 699 personnes ont été placées en garde à vue et 10 137 d’entre elles ont été inculpées et placées en détention préventive, selon le chef de l’Etat turc.

Dix-sept journalistes sur les 21 qui ont comparu devant un tribunal d’Istanbul se sont ainsi réveillés en prison samedi, inculpés pour leurs liens présumés avec « une organisation terroriste », selon l’agence de presse officielle Anadolu. Ankara accuse le prédicateur en exil aux Etats-Unis, Fethullah Gülen, et les partisans de son mouvement, qualifiés de « terroristes », d’avoir organisé le coup d’Etat manqué.

Un total de 758 militaires ont par ailleurs été libérés vendredi soir dont 62 étudiants de l’Académie d’Istanbul dont certains âgés de moins de 20 ans.

Alors que des responsables européens ont critiqué l’ampleur des purges, le président Erdogan a conseillé aux Occidentaux de « se mêler de leurs affaires », dans un discours prononcé depuis son palais présidentiel vendredi soir.

Purges en Turquie : "C'est sans précédent"
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