Quand les Roms de Montreuil collaient les affiches du candidat Patrice Bessac (PCF), au second tour des élections municipales de mars 2014, ils ne se doutaient pas que, deux ans plus tard, ils seraient expulsés sans solution de relogement. Jeudi 28 juillet, 40 personnes, dont 19 enfants, ont été expulsées d’un hangar insalubre. Les Montreuillois se sont mobilisés, mardi 2 août, et se sont rassemblés avec les 13 familles, devant la mairie, soutenus par l’ancienne maire Dominique Voynet (EELV) et l’association Rom Réussite.

Ce campement bénéficiait d’un bail précaire depuis 2010 renouvelé tous les ans sous la mandature de Dominique Voynet. Ce bail n’avait pas vocation à être une solution pérenne, puisque le terrain dont la mairie est propriétaire doit être transformé en écoquartier. Au printemps 2015, le nouveau conseil municipal s’est inquiété de « la dégradation des conditions de vie des familles ». Les états des lieux ont abouti à la conclusion que les bâtiments étaient impropres à l’habitation et dangereux pour les habitants et le voisinage. Un incendie s’est déclenché le 30 septembre 2015 à la suite duquel la mairie a publié un arrêté demandant aux familles de quitter les lieux. La décision a été contesté en justice puis confirmée en appel début 2016. Le recours à la force publique n’est intervenu que le 28 juillet, pendant les vacances, pour ne pas gêner la scolarisation des enfants, assure la mairie.

Le soir de leur expulsion, les 40 Roms ont dormi sur le trottoir du boulevard de la Boissière, devant les décombres de leur ancien campement détruit. Liliana Hristache, la présidente de Rom Réussite, assure qu’elle n’a pas pu fermer l’œil cette nuit-là. « Le soir du 28 juillet, j’avais très peur pour les enfants. Ils n’ont eu que trente minutes pour récupérer leurs affaires personnelles », explique-t-elle. Depuis, les 40 personnes sont devenues des migrants. « Elles ont essayé de s’installer sur la place de la mairie, mais la police les menaçait, alors elles sont allées sur le parvis de l’église, mais on leur a demandé de partir… elles ne savent pas où elles seront ce soir », poursuit Liliana Hristache. La mairie assure que des propositions de relogement ont été faites aux quatre familles avec enfants mais qu’aucune n’a été acceptée.

Relations glaciales

C’est sous les applaudissements que l’ancienne maire de Montreuil est accueillie au rassemblement. « Je connais bien ces familles puisqu’elles sont installées depuis 2008. Au début, ça ne se passait pas très bien. Mais avec l’aide de Rom Réussite, on a réussi à s’entendre », avance-t-elle. L’ex-patronne des Verts, gênée par son soutien au maire PCF Patrice Bessac, en appelle à la responsabilité de l’Etat : « Ce sont 13 familles. On devrait pouvoir trouver de la place pour elles, elles ne sont pas des milliers. C’est à l’Etat, c’est au préfet, de leur trouver une solution plus pérenne. » Dans un courrier adressé au préfet d’Ile-de-France, Jean-François Carenco, l’ancienne élue appelle à « agir maintenant, pour que soit proposé un hébergement à ces familles ».

Au sujet des populations roms, les relations entre la mairie de Montreuil et la préfecture sont glaciales. Une conférence régionale sur le sujet a été organisée à partir d’octobre 2015 avec la participation des maires d’Ile-de-France. Face à des désaccords croissants, neuf maires communistes ont décidé de quitter la conférence, le 13 avril 2015, le jour de rendu des conclusions de stratégie. Ils adressent une lettre à la ministre du logement et de l’habitat durable, Emmanuelle Cosse, où ils dénoncent une démarche du préfet de région « totalement inopérante et inadaptée à la situation de ces personnes qui tentent de vivre dans ces bidonvilles ».