Pauline Strong, professeure d’anthropologie à l’université d’Austin au Texas s’oppose au port d’armes dans son cours. | Jay Janner / AP

Tout était calme lundi à l’université du Texas à Austin (UT Austin), rapporte le quotidien The Texas Tribune, alors que plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées pour commémorer le cinquantième anniversaire de la première tuerie de masse intervenue dans une université américaine – le 1er août 1966, l’ex-marine Charles Whitman tuait quatorze personnes et faisait une trentaine de blessés avant d’être abattu. Une stèle à la mémoire des victimes y était dévoilée ce lundi 1er août.

Coïncidence malheureuse, selon un porte-parole de l’université, c’est justement le 1er août que la nouvelle loi autorisant le port des armes de poing dans toutes les universités publiques de l’Etat du Texas est entrée en vigueur. Une loi portée par le gouverneur républicain Greg Abbott, adoptée le 17 février 2015, et contre laquelle étudiants et professeurs, à Austin, ont fait campagne durant des mois. Aujourd’hui, « les gens ne savent pas vraiment comment parler de cette question », témoigne Cecilia Gomez au Texas Tribune, professeure d’anglais. Un « sentiment d’impuissance » domine parmi les étudiants, qui sont « mal à l’aise et troublés ».

Des armes autorisées presque partout

Par respect pour la cérémonie, plutôt qu’une manifestation, les opposants ont préféré organiser un atelier consacré aux questions de sécurité personnelle. Lisa Moore, un des trois professeurs qui viennent de lancer des poursuites devant la cour fédérale pour tenter de bloquer la loi, y a participé. Il s’agit de « rappeler que la majorité des gens, sur ce campus, restent hostiles à la présence d’armes à feu. Et d’essayer de canaliser notre colère et nos craintes », confie-t-elle aux reporters du Texas Tribune.

A la veille de l’entrée en vigueur de la loi, le 29 juillet, lAustin American-Statesman, principal quotidien de la ville, a précisé que seules les personnes âgées de plus de 21 ans et titulaires d’un permis de port d’arme sont autorisées à pénétrer sur le campus avec une arme de poing – soit, selon Bob Harkins, vice-président de l’UT Austin, moins de 1 % des étudiants. Celui-ci rappelle d’ailleurs que les armes étaient déjà autorisées presque partout, sauf à l’intérieur des bâtiments – elles le sont désormais jusque dans les salles de cours.

« J’aime les armes à feu, mais pas dans ma classe », lance de son côté Seeman Yasmin, professeur à l’université du Texas à Dallas, dans une tribune publiée par The Dallas Morning News. « Dans quelques semaines, je vais reprendre mon travail à l’université en sachant que les armes sont autorisées dans ma salle de cours. Et pas seulement dans cette salle. Je n’ai pas peur des armes à feu. Je suis effrayé par cette association : le stress des examens, la maladie mentale non diagnostiquée et la capacité de porter des armes à l’intérieur des bâtiments universitaires, y compris dans certains dortoirs. »

Garder une arme, une question de sécurité personnelle

Selon les partisans de la nouvelle loi, celle-ci permettra au contraire aux étudiants présents sur le campus de se protéger. « Pourquoi un étudiant pourrait-il se rendre dans une salle de cinéma le vendredi, dans un centre commercial le samedi et dans une église le dimanche en portant une arme dissimulée, mais ne pourrait plus le faire le lundi quand il se rend dans son université ? », a ainsi déclaré Antonia Okafor, porte-parole d’une association d’étudiants favorables à la loi, selon les propos rapportés par The Wall Street Journal. « C’est une question de sécurité personnelle. »

Le quotidien économique de New York donne également la parole au président de l’université du Texas, Gregory L. Fenves, qui compte lui-même au nombre des opposants à la loi alors qu’il est « contraint de l’appliquer ». Cité comme témoin par les trois professeurs qui ont lancé en juillet une action devant la cour fédérale, il explique que « cette procédure traduit les sentiments de nombreux professeurs de l’UT Austin, et nos avocats sont en train de préparer avec beaucoup de soin les arguments qu’ils vont faire valoir ».

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