Le ministre grec de la politique ­migratoire, Yiannis Mouzalas, lors d’une conférence de presse à Amsterdam, le 25 janvier. | EMMANUEL DUNAND / AFP

A Athènes, le risque d’une reprise des arrivées massives, après la répression qui a suivi le coup d’Etat avorté en Turquie, suscite l’inquiétude. Les cinq « hot spots » (centres d’accueil et de sélection) sur les îles de Lesbos, Chios, Leros, Kos ou Samos accueillent aujourd’hui près de 9 700 migrants pour une capacité de 7 450 places. Surpeuplés, ils ne pourront pas faire face à plusieurs jours d’arrivées à un rythme similaire à celui de l’été 2015, lorsque jusqu’à 4 000 personnes débarquaient quotidiennement.

Le départ des officiers de liaison turcs le 20 juillet a entraîné l’arrêt des renvois de réfugiés vers la Turquie. La Commission européenne assure que les agents turcs partis seront bientôt remplacés afin de permettre la reprise des opérations.

« Si la Turquie nous envoie 500 000 personnes d’un coup, nous devrons peut-être nous résoudre à mettre sur pied cet énorme camp que voulaient nous imposer certains pays européens en 2015 », anticipe, amer, un proche du dossier

Les arrivées de migrants ont augmenté depuis le 15 juillet, mais Athènes relativise cette hausse. « Il y a moins de 100 nouvelles arrivées quotidiennes sur nos îles, soit 97 % de moins qu’à la même époque en 2015. La Turquie respecte donc ses engagements », rassure le ministre grec de la politique migratoire, Yiannis Mouzalas.

M. Mouzalas a promis de soulager les îles en transférant vers le continent les centaines de réfugiés éligibles à l’asile. Cela suppose de continuer à créer de nouveaux camps. Il en existe déjà plus d’une trentaine, répartis à travers tout le pays, où sont hébergées plus de 48 000 personnes. Certains, bâtis dans l’urgence et dans des conditions sanitaires déplorables, sont lentement en train d’être remplacés, mais cela restera largement insuffisant en cas de reprise du flux. Alors ce fameux « plan B » que la Grèce se refuse à commenter officiellement est sur toutes les lèvres. « Si la Turquie nous envoie 500 000 personnes d’un coup, nous devrons peut-être nous résoudre à mettre sur pied cet énorme camp que voulaient nous imposer certains pays européens en 2015, mais que nous redoutons tant », anticipe, amer, un proche du dossier.

Georges Kiritsis, le porte-parole du ministère de la politique migratoire, dément fermement cette hypothèse et appelle à la solidarité européenne.

« Nous devons être prudents avec ce qui se passe en Turquie. Si la situation change, nous essaierons d’élargir rapidement l’accueil à un plus grand nombre de réfugiés mais alors, l’Europe devra prendre ses responsabilités : la Grèce ne pourra pas faire face seule. »

Déjà, lors de la conclusion de l’accord entre l’UE et la Turquie le 18 mars, des renforts en personnel avaient été promis à la Grèce pour gérer la hausse prévisible des demandeurs d’asile. A ce jour, seuls deux spécialistes des questions de renvoi sur les 66 promis par l’UE ont été envoyés. Ou encore 61 sur les 400 traducteurs attendus. Et le processus dit de « relocalisation », censé répartir depuis la Grèce plus de 66 000 réfugiés à travers l’UE d’ici à fin 2017, est encore en sous-régime. Seuls 2 485 réfugiés en ont bénéficié.