Les incendies qui se sont déclarés mercredi 10 août dans le sud-est de la France ont surpris par leur intensité et leur vitesse de progression, notamment dans les Bouches-du-Rhône, où cinq communes étaient concernées dans la soirée (Rognac, Les Pennes-Mirabeau, Vitrolles, Fos-sur-Mer, Istres).

« C’est un incendie de grande ampleur, qui a ravagé déjà plus de 2 000 hectares. La mobilisation des secours est totale, a déclaré le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve. La situation a été rendue difficile en raison de la météo, avec un fort vent et une sécheresse qui dure depuis plusieurs semaines. »

« Apocalypse »

« Le feu a pris tout Vitrolles, c’est un désastre. Du 8e étage où je suis je vois la falaise en feu ce sont des flammes qui ruissellent », témoignait en fin d’après-midi une habitante du quartier des Pinchinades, à Vitrolles. Elle en a été évacuée alors que le feu se trouvait proche des maisons individuelles de ce quartier en bordure de pinèdes, et a pu trouver refuge chez une amie, dans le centre de la commune.

« C’est l’apocalypse, je n’ai jamais vu une chose pareille. On a juste eu le temps de prendre la chienne et la voiture, les pompiers nous demandaient de partir vite. On a quitté la maison noire de cendres, on ne sait pas ce qui s’y passe. On est arrivés chez cette amie nus et crus. »

Comme elle, près d’un millier de personnes ont été évacuées de Vitrolles, selon les premiers chiffres transmis aux médias dans des communiqués de la préfecture et des pompiers.

A Marseille, l’ensemble des accès routiers et autoroutiers était saturé dans la soirée. Dans les quartiers nord, les automobilistes patientent tandis qu’une odeur âcre de fumée a gagné les grandes cités des 15 et 16 arrondissements, obscurcis par une épaisse fumée.

Au dessus du port de Marseille, vers 18 h 30. | Camille Bordenet / Le Monde

L’A8 a été coupée dans les deux sens dans le secteur de Coudoux, entre Coudoux et Aix-en-Provence. L’A55 a été coupée en direction de Lyon au départ de Marseille. Les autoroutes donnant accès à Vitrolles ont été coupées.

Accueil d’urgence

Aux Pennes-Mirabeau, où le feu a traversé le village après avoir ravagé les zones boisées, la municipalité s’organisait dans la soirée pour abriter les habitants évacués. Le confinement a été décidé pour la centaine de pensionnaires de la maison de retraite les Opalines. Avant 22 heures, la décision a été prise d’évacuer le gymnase Alain-Colas, l’une des trois zones de sauvetage ouvertes : le site était à son tour menacé par le feu. La salle polyvalente Tino-Rossi accueillait en début de soirée quelque cent cinquante personnes, pendant que beaucoup d’habitants cherchaient un accueil dans la famille ou chez des amis.

Dans la salle du conseil municipal, où des bénévoles et des fonctionnaires municipaux dressaient des buffets pour servir biscuits et verres d’eau, les premiers habitants ont pris place sur des chaises. Voisines et amies, Marie-Antoinette Goirand et Josette Sibille, ont été évacuées de leurs villas sises dans le village : « La police est venue nous chercher pour nous mettre en sécurité. Ça flambe partout, le feu était dans la colline. Depuis la fin d’après-midi, on était dans la fumée. »

En images : des incendies « de grande ampleur » ravagent le sud-est de la France

Les deux dames espèrent rentrer chez elle, ne sachant pas si elles devront passer la nuit à la mairie. Un vieil homme, allongé sur une table sous une couverture de survie, a été pris en charge par deux infirmières qui ont spontanément proposé leurs services.

Nathalie Geairain a elle été surprise par la proximité des flammes autour du petit immeuble de quatre étages qu’elle habite dans le village : « Ça commençait à brûler juste à côté des appartements. On n’a rien pris, ni les médicaments ni les clés de la maison. » Elle décrit des moments de panique aux ronds-points de la commune, mais la fonctionnaire territoriale salue le professionnalisme des pompiers, des policiers et de la municipalité, qui a informé la population sur les réseaux sociaux et en diffusant des appels enregistrés auprès des administrés.

« J’ai la moitié de la commune qui brûle, je n’ai jamais vu cela, c’est une catastrophe », déplore Michel Amiel, le maire des Pennes-Mirabeau :

« La situation n’est pas maîtrisée, le feu continue. Il a franchi l’autoroute A 7 pour venir au cœur du village. C’est maintenant la nuit, donc les moyens aériens de lutte ne fonctionnent pas. Les pompiers vont se battre avec des moyens terrestres pour protéger la maison de retraite par exemple. »